L'encre des législatives n'a pas encore disparu que les Tunisiens ont eu, hier, un autre rendez-vous électoral en se rendant aux urnes pour choisir leur futur président. Partout aux quatre coins du pays, les électeurs ont repris le chemin des écoles, érigées pour la circonstance en centres de vote. L'événement semble être haut en couleur. A l'école primaire Ibn Mandhour à El Mourouj I, un des quartiers les plus peuplés de Ben Arous, l'ambiance était plus qu'ordinaire. Et l'opération électorale s'est déroulée dans un climat de sérénité totale, où les procédures de vote étaient, somme toute, marquées par une grande souplesse. Sans retard ni longues files d'attente, l'exercice de ce droit citoyen s'est ainsi traduit dans ses belles illustrations démocratiques. C'est que pour la première fois, la Tunisie est appelée à donner sa voix, à prendre librement son destin en main. Important est ce défi, mais «ce qui importe le plus est de choisir la Tunisie qu'on aime tous», ainsi s'exprimait un citoyen en accédant à l'un des neuf bureaux de vote du centre d'El Mourouj I. « On veut, tout bonnement, finir avec ce provisoire qui a duré plus que prévu, afin de pouvoir inaugurer la stabilité attendue », espère-t-il avec un air peu tendu. Aux alentours de l'école, un potentiel de sécurité a été déployé. Armée et forces de l'ordre agissaient côte à côte, sous haute surveillance. Les lieux ont été presque fermés à la circulation automobile. Le passage a été cédé aux votants, aux piétons pour ainsi dire. Mais la participation n'était pas, à la matinée, à son plus haut degré, a-t-on remarqué. Aux yeux de certains observateurs, cela ne peut pas forcément expliquer une position passive des élections. Car le facteur temps et la facilité d'accès à tout moment de la journée, peuvent également entrer en ligne de compte. Tentatives d'influence Au niveau des bureaux, tout semblait aller bien, comme l'a affirmé la majorité des observateurs. Qu'ils soient issus de la société civile ou représentant des candidats à la course présidentielle, ces observateurs accrédités par l'Isie ont été unanimes sur le bon déroulement de l'opération. «Rien à signaler au centre d'El Mourouj», révèle un des délégués du candidat Moncef Marzouki. Et d'ajouter que «tout se passait dans les bonnes règles du jeu». Avis partagé par le représentant de l'autre candidat Beji Caid Essebsi qui a tenu à nous livrer une impression toute positive. Sauf exception qui mérite d'être relevée : certains sympathisants du candidat Slim Riahi ont procédé à la manipulation des électeurs, en leur affichant le numéro lui correspondant sur le bulletin de vote. Aussitôt identifiés, ils ont été écartés par les forces de sécurité, a-t-il rapporté. Un autre acte considéré comme infraction s'est aussi produit in extremis. Le rang dans lequel s'est positionné Marzouki sur la liste des candidatures s'affichait sur le mur du centre. Ce qui a poussé à intervenir pour l'effacer. C'est là une tentative d'influence sur l'opinion de vote que d'autres observateurs disaient avoir constatée ici et ailleurs. D'ailleurs, l'Association tunisienne pour l'intégrité et la démocratie des élections (Atide) n'a pas manqué de mentionner les abus enregistrés dès les premières heures d'ouverture des bureaux de vote à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Aussi remarquables soient-ils, ces dépassements sont jugés moins graves que ceux observés au cours des législatives du 26 octobre dernier, à savoir violation du silence électoral, entrave à l'observation des centres de vote et non-respect de certaines procédures de vote. D'un autre côté, une représentante du candidat Hamma Hammami nous a révélé que l'ambiance était bon enfant, alors que l'affluence était en deçà des attentes. Bien qu'ils soient présents sur place, certains observateurs de la société civile refusaient de nous parler sur le taux de participation ou le déroulement de cette opération. Ce fut le cas de « I Watch » et «Atide» qui avaient déclaré avoir reçu des consignes strictes dans ce sens. «Ne donne aucune révélation aux médias...! », répliquent leurs représentants.