Pour célebrer les révolutions tunisienne et égyptienne, le ministère de la Culture et l'ambassade d'Egypte en Tunisie ont organisé, jeudi dernier au Théâtre municipal, un spectacle musical assuré par la troupe Massar Egbari (parcours obligatoire). Sa musique n'aurait jamais pu trouver le chemin des scènes et des événements officiels, n'eut été le printemps arabe. Le groupe, composé de Hany El Dakkak à la guitare et au chant, de Mahmoud Siam à la guitare, de Ayman Massoud au synthétiseur, de Ahmed Hafez à la basse, de Toussy à la batterie et de Hamdoun à la percussion, a donné son concert à Tunis après un passage par Gabès et Sfax. Connus et appréciés par les amateurs de la musique underground en Tunisie, ils ont été, de surcroît, remarqués par les cinéphiles lors de la projection du film Microphone de Ahmad Abdallah, pendant les JCC 2010. Et c'est loin d'être le seul film où leur musique est présente. De quoi trouver regrettable que, jeudi soir, l'entrée fût uniquement sur invitation et que des jeunes – les premiers concernés par la musique du groupe et par la révolution— n'ont pas pu assister au concert. Ce dernier a commencé quand les Massar Egbari ont gagné la scène, accompagnés des membres de la troupe théâtrale tunisienne «Al Masrah al badil» (le théâtre alternatif) pour interpréter ensemble un poème d'origine pharaonique. Le concert a ainsi commencé en douceur, avant que le groupe ne montre le vrai son de sa musique, celle qu'il charge depuis ses débuts (2005) des problèmes sociaux de son pays, en particulier ceux de sa ville, Alexandrie, dont le passé cosmopolite montre clairement ses influences sur les Massar Egbari. Ces derniers essayent, en effet, de créer des mélodies où se rencontrent jazz et musique orientale, le mélange des instruments aidant au résultat. L'un de leurs principaux projets a été un spectacle hommage à Sayed Darwish dont ils ont joué une partie du répertoire, principalement «Ahou da elli sar» et un medley d'autres chansons célèbres de cet artiste alexandrin. Quant à leurs propres titres, ils retracent des scènes de la vie quotidienne et parlent d'amour : «Di mouch tariqa» (ce n'est pas une façon), «Mersel li habibti» (un messager à ma dulcinée), «Mafich haga» (il n'y a rien) ont à leur tour mis de l'ambiance dans la salle qui n'a pas été indifférente à leur reprise de titres de Sayed Makkawi et de Cheikh Imam. Le parti pris de Massar Egbari est donc d'innover, tout en puisant dans les racines. A la fin du spectacle, une surprise attendait le public. Le groupe a appelé sur scène le rappeur tunisien Mehdi R2M qui a chanté «Ana tounsi» avant d'interpréter en duo avec le groupe leur titre commun «Nehlam» (je rêve), suivi des deux hymnes nationaux, tunisien et égyptien, pour une soirée au programme complet, à la hauteur de la bonne musique et de la révolution.