Dans un monde globalisé où les forces du marché, s'adossant à une culture de management anglo-saxonne en plein essor dont le culte de la réussite à court terme est une seconde religion, prennent en main la destinée de la planète pour le meilleur comme pour le pire, il est important de préciser le statut de l'entrepreneur dans notre pays, resté, dans un contexte de turbulences financières internationales, à l'abri d'une bulle spéculative mondiale sans précédent, grâce aux mesures prudentielles de notre système bancaire, aux engagements souscrits conformément aux accords Bâle I et II, à l'influence encore réduite des marchés des capitaux sur le tissu industriel local et à l'ancrage, dans la mémoire collective tunisienne, d'une solide culture entrepreneuriale familiale fondée sur la puissance de l'épargne, la promotion de l'actionnariat planifié et le refus d'un capitalisme sans visage, anonyme et prédateur. «Un entrepreneur n'est pas simplement le propriétaire d'une entreprise. C'est quelqu'un plein de fantaisie et d'envie d'innover. Il doit, avant tout, s'amuser tout en étant prêt à prendre des risques pour réaliser ses idées. C'est la partie la plus difficile du métier», nous dit M. Hamadi Ben Achour, fondateur et figure légendaire du groupe Ben Achour, spécialisé dans le transit international, qui a toujours invité ses collaborateurs et ses enfants, une fois aux commandes, insiste-t-il, à faire preuve de créativité, à combattre le perfectionnisme quand il est inutile et à tabler constamment sur le long terme en investissant dans les ressources humaines, véritable pilier de la pérennité de l'entreprise. Finalement, peu de sujets prêtent autant à polémique que celui de l'entreprenariat. Pourquoi ? Est-ce que c'est parce qu'il donne un objectif à l'homme ? Le sublime ? Dote sa vie d'un sens multidimensionnel ? Lui fait goûter le nirvana du succès ? Il s'agit, à n'en pas douter, d'une question au cur de l'itinéraire initiatique des âmes libres et indépendantes. «Pour percer et persévérer dans la quête du «toujours plus», l'entrepreneur tunisien doit garder sa conscience éveillée, accepter les régressions sans pour autant perdre courage, coller à la flexibilité croissante du monde du travail et conjuguer le savoir-être au savoir-faire afin de propager dans les lieux de production et au sein de ses proches collaborateurs les valeurs d'ouverture, du consensus et du dépassement», nous dit M. Hamadi Ben Sedrine, vice-président de l'U.T.I.C.A, chargé du volet social, pour qui l'opérateur économique fait partie intégrante d'une classe créative dont l'objectif majeur est de promouvoir, dans la société, le goût du travail, de la concurrence, de l'effort, de la curiosité, de la mobilité, de la liberté et de l'épargne car, dit-il, ce n'est pas tant la quantité d'argent qui rend les nantis charismatiques, mais le parcours qui les a conduit là où ils en sont.