Dans le cadre de son programme annuel couvrant, à travers les tables rondes, les débats et les conférences, les principaux domaines d'activité relatifs aux énergies renouvelables, aux changements profonds intervenus dans le secteur, à la maîtrise de la consommation énergétique et à la problématique pétrolière et gazière dans le pays, l'Association tunisienne du pétrole et du gaz (ATPG), née en 1989 afin de regrouper la crème des experts tunisiens dans le domaine des hydrocarbures et de renforcer les liens générationnels entre les différents responsables, a organisé, le 25 novembre 2009, dans la banlieue de Tunis, à l'occasion de la célébration de son vingtième anniversaire, un déjeuner-débat autour du thème : «Nouvel ordre énergétique mondial et de la crise financière et pétrolière internationale». «Il s'agit d'une conférence centrée sur les perspectives d'avenir de la politique énergétique de notre pays et les aspects de coopération et de partenariat, esquissés dans la région, à l'ombre d'un environnement économique mondial instable», déclare M. Ezzedine Khalfallah, président de l'ATPG, qui met l'accent sur l'augmentation substantielle du nombre de permis de recherche, le développement rapide et sans précédent du gaz naturel (plus de 40% de la totalité des ressources énergétiques) en Tunisie grâce aux différents projets réalisés ou en phase de finalisation (Miskar, Hasdrubal, Gaz du sud, le transméditerranéen, le transtunisien), la maîtrise de la production pétrolière en cours, la nécessité de recourir aux techniques de forage les plus évoluées et l'amélioration du taux de découvertes (une vingtaine entre 2005 et 2008). Dans ce cadre, dit-il, l'ATPG peut, à travers l'espace de rencontres et d'échanges entre les ingénieurs, contribuer, à côté de l'Etat législateur et régulateur, à la mise en place d'une synergie public/privé, d'une dynamique sectorielle pétrole/gaz et d'un programme d'action visant l'organisation de congrès scientifiques et techniques liés aux différentes branches des hydrocarbures, le décryptage des nouveaux défis énergétiques sur le marché international, le renforcement du cadre légal et contractuel régissant les activités d'exploration des compagnies opérantes dans le pays. Dans les coulisses de l'événement, au fur et mesure de l'arrivée des participants, cadres supérieurs au sein du ministère de l'Industrie, de l'Energie et des Petites et Moyennes Entreprises et autres responsables du secteur pétrolier dans le pays, le bruit d'une revitalisation salutaire des puits d'El Borma, champs pétrolifères découverts en 1964 et mis en production deux ans plus tard (1966), étaient dans toutes les bouches. Certains ont même évoqué des découvertes gazières importantes dans la région de Gdamès, au fin fond du sud tunisien, ce qui amènera, a-t-on entendu, à soulever, dans un proche avenir, la question de l'exportation. D'ailleurs, d'après certaines sources autorisées, le nombre de permis validés durant l'année 2009 est de 53, couvrant environ 70% de la superficie totale de la Tunisie. Les dépenses finales relatives à l'exploration de l'année 2008 ont atteint 396 millions de dollars contre 328 millions de dollars en 2007 et 200 millions de dollars en 2006. Les prévisions des investissements de l'année 2009 sont de l'ordre de 250 millions de dollars pour le forage de 12 puits d'exploration et l'acquisition de 700 km2 sismique 3D et 3000 km sismique 2D. Crise économique ou crise pétrolière ? L'invité d'honneur de ce déjeuner-débat, M. Mourad Preure, directeur du cabinet MP Strategy Consulting et professeur de stratégie et de géopolitique de l'énergie, a insisté, dans son intervention, sur la réalité structurante de la mondialisation, la fin des organisations tayloriennes, l'extension du champ de la concurrence à tous les niveaux sans exception, et l'émotivité excessive qui entoure la crise financière internationale et ses retombées sur les marchés pétroliers. Selon lui, le récent choc baissier des cours du pétrole est lié à l'effondrement de la galaxie finance, au culte du court terme et à la sacralisation anglo-saxonne de la fameuse «main invisible du marché», ce qui doit, en toute logique, insiste-t-il, réhabiliter, à l'avenir, le long terme, véritable horloge de l'économie réelle, encenser le retour de l'Etat-providence, décrié depuis deux décennies et réduire la volatilité et la spéculation des marchés pétroliers. «Le monde avait vécu deux décennies durant faussement l'illusion de l'abondance et d'un pétrole bon marché puisque les prix, partis d'un plancher artificiellement bas, depuis la crise asiatique de 1998, ont été multipliés par six en six ans, passant de 20 à 100 dollars le baril, puis en juillet 2008, atteignant le pic historique de 147 dollars», déclare notre interlocuteur, pour qui l'intérêt de tous les acteurs, Etats comme compagnies, est de construire un «new deal», de créer les conditions d'un réel partenariat énergétique mondial, fondé sur de réelles complémentarités afin d'ouvrir des perspectives tangibles autant de développement que d'autosuffisance énergétique à long terme. A la fin de son exposé, l'hôte de l'ATPG a prédit un statut plus technologique au pétrole avec, dit-il, à la moitié du siècle, une planète vraisemblablement orientée vers un nouveau paradigme énergétique de plus en plus décarboné et de moins en moins lié aux sources fossiles, ce qui doit pousser, d'après lui, les pays producteurs, au firmament de leur pouvoir de négociation actuellement, de mettre la science et la technologie au cur de tous les projets partenariaux internationaux, de saisir l'enjeu des challenges du futur dans un contexte international versatile, où la souveraineté se délocalise de plus en plus vers les universités, les centres de recherche et la compétitivité des entreprises, assimilées à de véritables champions nationaux.