En général, on parle plutôt de désobéissance civile pour exprimer son rejet des lois injustes ou dépassées par la réalité et l'évolution. A ce propos, Aristote avait coutume de dire dans ses promenades quotidiennes avec ses élèves : « Quand les lois sont mauvaises personne ne les applique » ! Ceci doit-il justifier la désobéissance à la loi, pourtant déclassée et désadaptée ! Cicéron, le sénateur romain, lui répond, quelques siècles plus tard: «Dura Lex ced Lex»... La loi est dure mais c'est la loi ! Aujourd'hui, ce que nous vivons dans ce qui reste de ce pays, défiguré par trois ans de manipulations à tous les niveaux, idéologique, religieux, sécuritaire sans parler du délabrement total de l'environnement urbain et citadin, c'est une sorte « d'indifférence civile » qui est une forme de rejet de tous ces « projets » et « modèles » de société que les partis de la revanche et de l'inquisition veulent imposer à un peuple éduqué au réformisme, à la tolérance et à la liberté raisonnable depuis la nuit des temps. L'Etat national moderne sans les dérives de Ben ali, aurait pu évoluer correctement et méthodiquement vers l'Etat institutionnel et démocratique avec l'économie d'une « Révolution » dénaturée et confisquée par les nouveaux seigneurs de l'irrationnel qui avaient hâte de détruire l'Etat déclaré « corrompu et despotique » sans jamais prouver une fois au pouvoir qu'ils avaient fait mieux. Bien au contraire, les bilans « provisoires » comme tout le reste d'ailleurs, montrent à quel point la nation est malade de « sa » « transition » qu'elle a acceptée mais jamais voulue. D'où l'indifférence générale et généralisée avec ce sentiment d'impuissance à faire face et à réagir. Ça fait trois ans qu'un Etat ébranlé dans ses finances, sa sécurité, son environnement et sa matière de vivre et d'être, héritée de plusieurs siècles est gouverné à vue sans feuille de route ni plan de navigation et où les lois ne sont plus perçues par les Tunisiennes et les Tunisiens comme « obligatoires » parce que décidées et conçues par un « Parlement » partisan et orienté par une majorité dominante et hégémonique. La plupart des sondages donnent cette impression que ce nouvel « Etat » pour les Tunisiennes et les Tunisiens, en bonne majorité, n'est plus le « leur » et qu'il ne les concerne plus. Avec Ben Ali « la politique » était sanctionnée d'où le déficit pluraliste et avec le nouvel Etat post-révolutionnaire, le déficit a embrasé l'économie et imposé de nouvelles « hiérarchies » du « parallèle » dans tout le corps de la nation. Qui peut, aujourd'hui, assurer que les mosquées sont véritablement orientées vers la parole de Dieu et son Prophète, alors que des chefs de partis supposés être « civils et démocratiques » y font la prêche du vendredi et même les discours des prières quotidiennes ordinaires. Au fait, sont-ils des chefs de « partis » ou des imams ! Le nouvel « Etat » a décidé qu'ils seront les deux à la fois avec la complicité et l'indifférence de tous. Par conséquent, tous ceux qui estiment que la politique relève de l'activité « humaine » et qu'elle est sujette à l'erreur alors que la religion est la représentation de la vertu (Al fadhila), voulue par Dieu, mais sans contrainte, ni violence, se trouvent marginalisés et culpabilisés. Cette culpabilisation a été, par ailleurs, diffusée très largement par cette transition « dite démocratique », pour mettre à genoux l'Etat national moderne et ses acquis considérables dans tous les domaines de la vie active mais aussi au niveau des valeurs universelles. M.Béji Caïd Essebsi est triste et regrettel'absentéisme de la jeunesse mais le leader de Nidaa Tounès sait parfaitement qu'elle a perdu ses repères devant l'invasion des propagandistes d'orient, ces « invités » de l'intolérance qui ont appelé pendant plus de deux ans à la décomposition de l'Etat issu de la modernité qui a été portée par plus de deux siècles de réformisme tunisien, et de mouvements d'idées. M. Karadhaoui n'a-t-il pas béni le nouveau « Fath » de l'Ifriquiya ! Qui pourrait réconcilier notre peuple avec « son » Etat qui a été en partie démembré par cette transition-buldozer acharné contre la tunisianité et la culture spécifique de notre peuple ! Difficile de répondre car le mal est bien profond et le bateau Tunisie vit l'ivresse et l'incohérence de la propagande de l'irrationnel ! Il faudrait une volonté titanesque de patriotisme pour remettre ce pays à flots ! Mais, les Tunisiens sont comme paralysés... ils laissent faire... la nouvelle culture du déterminisme (Al kadha wal kadar). Tant pis, Abou Kacem Chebbi fera une pause ! Les « Ghaylen » de Mahmoud Messaâdi ne croient plus aux défis, dans cette Tunisie sclérosée et fatiguée par cette transition interminable. D'où le défaitisme généralisé. Eh oui, il faut des bâtisseurs pour construire les nouveaux « barrages » du progrès ! La culture est plutôt à... l'indifférence... civile ! K.G