Lequel des deux, la plaignante et le suspect, dit-il vrai ? S'agit-il d'un enlèvement, comme elle voudrait le faire croire, ou plutôt le laisser entendre, ou bien un coup monté, comme tient à assurer son vis-à-vis ? Dur dans de telles conditions de prendre parti pour l'un ou l'autre, bien que les enquêteurs aient franchi le pas lors de la première étape de l'affaire pour la boucler, peut-être à la hâte ! Il faut dire qu'elle est intervenue à un moment crucial, puisque juste au lendemain de la révolution, en tout cas, quelques mois plus tard, au temps de l'instabilité et de l'insécurité. Bref, l'affaire en question a eu son point de départ le jour où une jeune femme s'est présentée au poste, du côté de la localité de Sidi Hassine, pour déposer une plainte en bonne et due forme, accusant le neveu de son mari d'avoir tenté de l'enlever. Et ce n'est pas tout, puisqu'elle affirmait qu'au moment des faits, le neveu en question était accompagné par un autre type, un ami du voisinage, jouant le rôle du complice. Il va sans dire, a-t-elle assuré par ailleurs, que les deux gaillards étaient éméchés, ce qui supposait qu'ils étaient emportés par cet état d'ébriété. Aussitôt la déposition mise noir sur blanc, les auxiliaires de la justice ont pris l'affaire en main, pour procéder tout d'abord à l'interpellation du suspect principal et son complice, ceux-ci se trouvant mis en examen, avant de passer en jugement. Pourtant, le premier suspect avait avancé une tout autre version des faits, niant au passage toutes les accusations portées à son encontre par l'épouse de son oncle paternel. Il a en revanche avoué avoir eu une altercation avec le fils de la plaignante. Juste un différend au départ, mais qui allait conduire les deux belligérants à en venir aux mains, le suspect finissant d'ailleurs par avoir le dessus, ce qui aurait poussé son adversaire à s'aider d'un couteau pour lui porter un coup le blessant au bras. Une blessure qui aurait nécessité la pose de trois points de suture. Craignant alors pour son fils, au cas où le blessé aurait intenté un procès, la mère aurait dès lors pris les devants en imaginant ce scénario d'enlèvement, espérant ainsi sauver son rejeton. Le témoignage du complice est venu par ailleurs corroborer cette version. Il fut également soutenu par l'avocat de défense qui a fait remarquer de surcroît l'absence de preuves matérielles à même de confirmer l'agression. En tout cas, aurait-il conclu, il y avait plusieurs zones d'ombre entourant l'affaire. Ce qui explique que la cour l'a mise en délibéré, d'autant que la femme a fini par retirer sa plainte…