Avec une reprise prévue soit cet après-midi, soit demain matin, le Dialogue national aura un point primordial, voire ultime, à résoudre parmi les points litigieux de la loi électorale. En l'occurrence la concomitance ou la séparation des élections présidentielle et législatives Alors que le Dialogue national tarde à reprendre ses travaux, les recours formulés à l'encontre de la loi électorale ont ravivé les dissensions parmi les députés de l'Assemblée nationale constituante (ANC) dont certains, les jugeant infondés, ont réclamé d'accélérer leur examen par l'instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des lois. En effet, à un moment où suspense et tension planent sur la vie des partis, notamment ceux influents dans le processus du dialogue, à l'heure des calculs électoraux et autres décisions stratégiques internes, un changement de position d'Ennahdha est attendu par tout le monde, comme l'affirme Noureddine Ben Nticha, l'un des leaders de Nida Tounès. «Tout le monde, indique-t-il, est pour le décalage d'au moins deux mois entre les deux élections. Par contre, Ennahdha campe sur la concomitance et veut que les élections aient lieu le même jour». Et d'ajouter : «Le Quartet lui a donné du temps pour qu'elle revoie sa position et Ennahdha doit s'aligner au consensus. Tout le monde doit comprendre que la séparation des élections protège la Tunisie à long terme d'un éventuel retour de la dictature. Cela favorisera l'équilibre au sein de la société politique où les forces seront équilibrées». Sur la même lancée, Lazhar Bali, président du parti El Amen, estime que la concomitance ne peut qu'engendrer un flou dans l'esprit du peuple autour de la question électorale. Il va plus loin pour dire : «La concomitance est anticonstitutionnelle puisque la Constitution prévoit que le président de la République prête serment devant l'Assemblée du peuple qui, alors, ne serait pas en place. Sinon, en commençant par les législatives, nous aurions un gouvernement manquant deux ministères régaliens, ceux des Affaires étrangères et de la Défense. Pour cela, nous sommes pour le décalage afin d'avoir plus de visibilité et pour que le citoyen comprenne mieux la répartition du pouvoir entre les deux chefs des pouvoirs exécutif et législatif. Ce que nous préconisons comme l'essence même de la Constitution qui cherche un équilibre des pouvoirs qui doivent se contrôler entre eux». Moins explicatif, le secrétaire général du Parti du travail patriotique démocrate, Abderrazek Hammami, estime que tout le monde est d'accord sur le décalage des dates des élections sauf Ennahdha. Recours et feuille de route La question des recours à l'encontre de la loi électorale commence à faire plus de bruit que les leaders des différents partis politiques n'estimaient et le nombre a atteint trente-trois recours. Ils sont formulés principalement par Al Massar, Afek Tounès, Ettakatol, le CPR et le Ppdu, ainsi que d'autres formations politiques considérées comme de petits partis, à l'instar du Parti populaire progressiste (PPP) dirigé par le constituant Hichem Hosni. Ils concernent principalement la parité horizontale et verticale, le vote des sécuritaires, le découpage des circonscriptions électorales à l'étranger et la garantie financière requise pour le dépôt des candidatures à l'élection présidentielle. Selon Hammami, tous les recours sont légitimes et ont une part de logique sauf que ces recours peuvent «cacher» une volonté de faire retarder au maximum les élections. Alors que les délais prescrits pour la réception des recours par l'instance sont déjà épuisés, il estime que «leur examen peut prendre beaucoup de temps, ce qui est de nature à avoir un coup politique et économique certain ne servant aucune partie». Noureddine Ben Nticha pense, pour sa part, que les recours introduits auprès de l'instance «ne peuvent avoir aucun impact sur les délais dans lesquels seront tenues les élections. Quant à Lazhar Bali, il a insisté sur le devoir de respecter les conventions internationales signées par la Tunisie en la matière, tout en affirmant que son parti est pour la participation des sécuritaires et pour la parité horizontale et verticale effective qui aurait dû être prescrite dans la Constitution. Donnant sa lecture des délais de l'organisation des élections, Bali estime qu'il faut entamer le processus électoral en 2014 avec l'inscription et en fin de l'année recevoir les candidatures aux élections. Ainsi, selon lui, on peut organiser le premier tour de la présidentielles au mois de mars 2015, 45 jours après le second tour, et vers la fin du mois de mai les législatives. Faux problèmes de financement Noureddine Ben Nticha a insisté sur le volet de financement des élections qui, selon lui, ne constitue pas de problème et ne peut en aucun cas entraver le travail de l'Isie. Les élections sont financées par l'Union européenne, donc on n'a pas besoin de prendre en compte les dépenses aux dépens du bon déroulement des élections. C'est un faux problèmes de dire que la concomitance nous fera gagner de l'argent et de la mobilisation. Par contre, le décalage des élections donnera plus de visibilité aux citoyens. C'est moins fatigant, et cela présente de meilleures conditions d'observation. L'application de la feuille de route est une condition sine qua non d'un bon déroulement d'élections neutres, transparentes et avec des chances équitables, ce que beaucoup de partis préconisent, autrement ils ne vont pas participer aux élections, a-t-il ajouté. Ben Nticha exploite l'occasion pour rappeler que le gouvernement Jomâa doit se limiter aux tâches qui lui incombent d'après la feuille de route du Quartet.