vLes prix ont bien chuté par rapport aux mois derniers en raison de l'abondance de l'offre La flambée du prix de la viande rouge a incité de nombreux Tunisiens à apporter quelques modifications à leur panier. Le poisson, apprécié mais évité pour son coût assez salé, est devenu, indéniablement, l'une des alternatives alimentaires de la classe moyenne. De la sardine au «mannani» ( mérou soit-il ou cernier ), le consommateur se permet de choisir parmi les variétés disponibles le poisson qui satisferait son palais et qui n'abuserait pas de son porte-monnaie. Il est 11h en ce jour d'octobre 2013. Au marché central, le pavillon poissonnerie suit son train-train quotidien : des commerçants qui vantent leurs produits, des clients qui hésitent encore à céder à la tentation, alors que d'autres quittent déjà les lieux, un sachet de poissons à la main. Abdellatif Touati, fonctionnaire, fait partie de la première catégorie. Il se présente comme un client fidèle du marché central. «Pour l'instant, je ne fais qu'observer les prix affichés. Manifestement, il y a des poissons aux prix inaccessibles, notamment pour un père de famille. D'autres sont plutôt abordables. Encore faut-il faire ses comptes car, pour un père de famille, acheter un kilo de rouget à 6dt ne constitue point une bonne affaire», indique-t-il. Il est évident pour un père de famille comme lui, de réussir l'équilibre entre les envies à la fois gourmandes et élémentaires, d'une part, et le budget, d'autre part. Aussi, consacre-t-il une quinzaine de dinars par semaine pour l'approvisionnement en tout ce qui est poisson et produits de la pêche. Abdellatif insiste tout de même sur le pouvoir d'achat dégringolant des Tunisiens. «Si vous jetez un coup d'œil sur l'ensemble du pavillon, vous remarquerez sûrement que le seul étal qui séduit bon nombre de clients n'est autre que l'étal des sardines dont le prix n'excède pas 1dt500. Cela veut tout dire...», ajoute –t-il, souriant. Ce qui est d'ailleurs vrai. La lotte : 4dt980 le kilo Cependant, et si on compare l'offre et la demande par rapport aux mois précédents, l'on constate une nette évolution de l'offre et une régression sensible au niveau des prix. En effet, et en parlant des prix, on découvre que la seiche est à 8dt600 ; les chevrettes sont à 6dt800. «Kalb lebhar» ( le chien de mer ) est à 4dt980 . Par ailleurs, «el Bouri» ( le mulet ) est à 6dt 800 le kilo, le petit rouget coûte 5dt le kilo , le maquereau est à 4dt, le catarelli à 3dt 600 et la lotte est à 4dt 980 le kilo. «Les prix ont bien chuté par rapport aux mois derniers car l'offre est abondante. Toutefois, les ventes restent limitées. Cela revient entre autres à la baisse du pouvoir d'achat. D'autant plus que les familles tunisiennes sont, actuellement, absorbées par les préparatifs de l'Aïd et ses lourdes dépenses interminables», explique Mokhtar Chehibi, poissonnier. Un avis que partage Achraf, un autre commerçant, qui évoque également le problème sécuritaire, les contraintes de stationnement aux alentours du marché central ainsi que l'invasion des poissons en provenance de Libye sur nos marchés. «Les pêcheurs tunisiens viennent tout juste de reprendre leurs activités après un repos biologique qui a duré trois mois. Il s'agit d'une technique adoptée depuis huit ans par les pêcheurs. Elle consiste en l'interruption de l'activité de la pêche de manière à permettre à la biodiversité marine —y compris les poissons— de bénéficier d'une période d'accalmie. Entre-temps, des produits libyens envahissent nos marchés et sont proposés à des prix gonflés», indique Achraf. Les poissons nobles : moins chers en fin de matinée Tout comme les pêcheurs qui usent de la patience pour mieux savourer les moments de la bonne récolte, les marchands de poissons démarrent la journée dans l'espoir de vendre la totalité de leurs produits, ce qui n'est pas évident pour tous. Un peu plus loin, se trouve le stand de Radhouane Ferjani, commerçant spécialisé dans la vente des poissons nobles en tranches. Bien que la clientèle ne se bouscule point devant son étal, Radhouane ne fait pas la moue. Les généreuses tranches de «sfen» (ange de la mer) sont plus sollicitées durant les week ends. «Les poissons en tranches sont demandés par une clientèle bien particulière. C'est surtout les samedi et dimanche que des clients aisés affluent au le marché. Mais le reste de la semaine, l'activité est à peine passable. D'ailleurs, la plupart des commerçants ne vont pas tarder à baisser les prix», souligne-t-il. Une prémonition qui ne tarda pas à se concrétiser : plusieurs poissonniers ont, en effet, remplacé les prix initiaux en leur substituant d'autres, plus tentants. La dorade n'est alors plus à 11dt800 mais à seulement 10dt. Les sardines, elles, sont proposées à seulement 1dt le kilo. En dépit de l'abondance de l'offre, certains clients s'interrogent sur la disponibilité des poissons de mer —et non d'élevage ou de semi-élevage. C'est le cas de Chedly Haddad, qui quitte le marché, un kilo de catarelli au panier. Une question à laquelle répond Ahmed Jelassi, poissonnier depuis 15 ans. Selon son avis, les poissons de mer sont aussi disponibles que ceux d'élevage. Ces derniers, en revanche, sont vendus durant toute l'année. «El warka (les dorades), la lambouka (la coryphène) et tous les poissons bleus sont disponibles sur le marché. Certaines personnes sont interdites de manger de la viande pour des raisons de santé. D'autant plus que les restaurants environnants s'approvisionnent à partir du marché central. C'est pourquoi le poisson reste un aliment de prédilection à coup sûr», fait remarquer Ahmed.