LE BARDO (TAP) - Au cours de son audition par la commission des droits et libertés de l'Assemblée nationale constituante, mercredi matin au Bardo, le professeur de droit à la faculté des sciences juridiques et politiques de Tunis, Kais Saïed, a suggéré la proclamation d'une "déclaration tunisienne des droits de l'homme et du citoyen", une déclaration selon lui qui aura un rang supérieur à la constitution. Il a estimé qu'il serait préférable que l'Assemblée constituante mette en place cette déclaration avant d'être présentée à un référendum. Ce document a-t-il ajouté comprendra l'essentiel de droits et libertés autour desquels il y aura un consensus et qui ne pourront être révisés ou dépendre du pouvoir législatif lors de l'élaboration de la nouvelle constitution. Il a également mis l'accent sur la nécessité de trouver un équilibre entre les différents pouvoirs indépendamment de la nature du pouvoir politique, qu'il soit parlementaire ou présidentiel en plus de trouver un équilibre entre les pouvoirs législatifs et exécutifs et même au sein du pouvoir exécutif quand il est bicéphale. Il a en outre suggéré de mentionner dans la constitution l'indépendance du pouvoir judiciaire "car les libertés et les droits ne peuvent être garantis que si le pouvoir judiciaire est indépendant sans qu'il y ait pour autant une rupture totale avec le pouvoir exécutif". Il a souligné l'importance de faire participer les représentants de la magistrature à l'élaboration de la loi organisant le pouvoir judiciaire. M. Kais Saïed a également évoqué l'échec de la constitution de 1959 en raison de la rupture entre le texte et la pratique. Il a appelé dans ce contexte à mettre en place de véritables mécanismes pour garantir ces droits et libertés au niveau de la pratique en la hissant à un niveau qui ne permet pas son amendement. Il a mis en garde contre l'énumération de droits sans garantir leur application dans la réalité. Il a relevé dans le même contexte que la mise en place de mécanismes de concrétisation de ces droits et libertés permet le passage d'un Etat de droit à une société de droit et qu'on ne peut atteindre que si la loi exprime effectivement la volonté collective. Cette séance d'audition a été largement suivie par les membres de la commission mais aussi par des personnes extérieures à l'instar du président de l'Assemblée Nationale Constituante, Mustapha Ben Jaafar, de sa vice présidente Meherzia Laabidi. Le rapporteur général Habib Khedr, présent également à la réunion, a estimé que les principes généraux de cette "déclaration tunisienne des droits de l'homme et du citoyen" peuvent être intégrés dans la constitution avec des dispositions qui assurent que ces articles ne pourront pas être amendés facilement.