La situation sécuritaire en Libye est très précaire et elle est en butte à de grandes menaces quant à sa sûreté nationale. L'arrivée de Daech enfonce le clou et son expansion met une pression de plus sur la Tunisie dont les frontières avec la Libye sont exposées à un grand danger . En mars 2014, un employé de l'ambassade de Tunisie en Libye, Mohamed Becheikh, a été kidnappé en Libye alors qu'il quittait son travail. Quelques semaines après, un deuxième kidnapping avait lieu. Un groupe armé avait pris Laaroussi Gantassi, un diplomate tunisien, en otage. La nouvelle avait alors fait le tour de tous les plateaux médiatiques et le ministre des Affaires étrangères de l'époque, Mongi Hamdi, avait mis en place une cellule de crise consacrée au suivi de l'évolution de l'affaire. Ce n'est qu'en juillet 2014 que les deux diplomates ont réussi à s'en sortir et ont atterri, sains et saufs, sur le sol tunisien. Aucun détail n'avait été donné quant à cette libération à part un petit communiqué de la présidence de la République qui assurait que c'était grâce aux efforts de l'ambassadeur tunisien en Libye, Ridha Boukadi, que les deux personnes ont pu retourner sainement en Tunisie. Depuis cette affaire, il n'y a eu que quelques petits incidents visant des ressortissants tunisiens en Libye, des incidents normaux vu la crise que traverse notre voisin. La crise était cependant réapparue avec l'enlèvement des deux journalistes tunisiens, Sofiene Chourabi et Nadhir Guetari, partis en Libye au début du mois de septembre 2014, pour réaliser un reportage sur les conditions dans lesquelles vit l'Est du pays. Quelques jours après leur arrivée, une source sécuritaire libyenne a annoncé l'enlèvement des deux journalistes. Depuis, les autorités tunisiennes ont établi les contacts nécessaires et nos confrères ont été relâchés peu de temps après. Seulement voilà, ils ont été kidnappés, de nouveau, par une milice non identifiée à Ajdabia. Le 8 janvier 2015, au lendemain de l'attentat commis contre le siège de Charlie Hebdo, une information a été véhiculée par les médias et les réseaux sociaux confirmant l'exécution de nos deux compatriotes par les groupes de Daech. Une information qui a été aussitôt démentie par les autorités et le Syndicat National des Journalistes Tunisiens. Trois mois après, personne ne sait rient encore quant au sort des deux journalistes et personne n'est en mesure d'affirmer qu'ils sont en vie et ce malgré la cellule de crise et les différentes initiatives. Un autre cas de disparition a été signalé dans la journée d'hier, par une famille habitant dans un village du gouvernorat de Kairouan. Pour en savoir plus, nous avons contacté Najoua K, sœur de deux des disparus. Ses frères et cousins qui travaillent en Libye comme maçons, ne donnent plus de signe de vie depuis dimanche dernier. « Mon frère nous a appelés pour nous dire que la police Libyenne était venue les chercher tous les six parce qu'ils ne disposent pas du certificat médical qui leur permet de résider en Libye. Il nous a dit qu'il allait nous rappeler et depuis, plus rien. Nous avons contacté un citoyen libyen qui est ami avec notre famille depuis des années. Ce dernier a bien voulu nous rendre service en faisant le tour de tous les postes de police de la région mais en vain ; mes frères et cousins sont introuvables et leurs téléphones éteints. Hier nous avons reçu une autre information selon laquelle un groupe armé aurait kidnappé mes cousins et frères en leur confisquant portables et passeports dans la région de Krimia, près de Tripoli. » Une situation rocambolesque où nous avons tenté de poser nos questions au ministère des Affaires étrangères. C'est Mokhtar Chaouachi, porte-parole officiel du ministère, qui nous a répondu. Malheureusement, il n'a répondu à aucune de nos questions, ni à celles qui concernent l'affaire des six disparus, ni à celle de la disparition de Sofiene Chourabi et de Nadhir Guetari. Il a juste expliqué que les responsables du ministère des Affaires étrangères étaient en train de faire tout ce qui était en leur pouvoir afin de clarifier la situation. Nos tentatives de contacter le ministre des Affaires étrangères, Taïeb Baccouche, ou encore le Secrétaire d'Etat chargé des Affaires arabes et africaines, Touhemi Abdouli, ont été vaines. Plus la situation empire en Libye, plus l'angoisse s'installe en Tunisie. Personne ne peut nier les efforts fournis par nos autorités dans le but de préserver la sécurité des Tunisiens qu'ils soient sur les territoires Libyens ou Tunisiens, mais, vu les disparitions, cela reste insuffisant.