Cette affaire examinée par le tribunal de première instance du Kef est parmi celles qui ont suscité les réactions les plus vives des journalistes et des associations de défense des droits de l'Homme, lesquels ont tiré la sonnette d'alarme, afin d'attirer l'attention, aussi bien des autorités que celle des membres de la composante civile sur la menace qui commence à peser sur les médias d'une façon générale. Car au même moment où Hana Medfai, jeune journaliste à radio du Kef, a été poursuivie dans la présente affaire pour diffamation, deux autres journalistes l'humouriste Megalo, et le blogueur Yassine Ayari ont été également inquiétés. Ce dernier est d'ailleurs encore aux arrêts, suite à son implication dans une affaire de diffamation, encore pendante devant la cour d'appel militaire. La présente affaire entre donc, selon la plupart des observateurs, ainsi que la HAICA et le Syndicat des journalistes tunisiens, dans le cadre du harcèlement pratiqué de plus en plus sur les journalistes et les médias audiovisuels exerçant de ce fait un véritable haro sur la liberté d'expression. Dénonciations n'est pas diffamation Les faits dans le cas d'espèce remontent au mois de mars de l'année dernière. Hana Medfai traitait dans le cadre de son émission à caractère social, le cas des harcèlements sexuels dans les écoles. Un thème qui ne doit pas être considéré comme un tabou, et qu'il faut donc dénoncer énergiquement et sans aucune hésitation. Au cours de l'émission un auditeur est intervenu, pour citer le prénom de l'un des adeptes de cette pratique dans les écoles. Contactée, la jeune journaliste qui a manifesté sa joie suite à décision équitable du tribunal, a précisé qu'aucun nom de famille n'a été cité, tant par elle-même que par l'auditeur intervenu au cours de l'émission. « L'acquittement par le tribunal n'a été que justice, car il n'y avait aucune preuve de diffamation à l'égard de quiconque, sauf peut-être pour celui qui se sentirait visé en entendant prononcer un prénom, pouvant être le sien comme celui de mille et autre personnes ». « Je continuerai dans la même voie, afin de lever le voile sur certaines exactions qui sont occultées, et dont les victimes appartiennent aux démunis et à ceux qui n'osent pas se manifester par pudeur ou par manque d'information sur leurs droits. » Loi sur les délits de presse, ignorée Hichem Senoussi membre de la HAICA avait déclaré quelque temps auparavant que les délits de presse ne sont nullement sanctionnés par des peines de prison et ce, en vertu du décret-loi 115 du 2 novembre 2011, relatif à la liberté de la presse. Or des journalistes sont poursuivis en vertu du code pénal pour des délits de droit commun. « Le procureur de la République n'a pas à exercer l'action publique pour les délits de presse » a encore précisé le président de la HAICA. Ce à quoi il est rétorqué par d'autres observateurs, que le procureur de la République a l'opportunité des poursuites, étant tenu d'intervenir, chaque fois qu'il estime que l'ordre public est menacé. De son côté, Neji Bghouri, président du Syndicat national des journalises tunisiens avait déclaré que les procès intentés contre la journaliste Hana Medfai, ainsi que contre d'autres confrères constituent une véritable menace pour la liberté de la presse. L'acquittement de la journaliste par le tribunal du Kef, constitue une évolution de la jurisprudence dans le sens de l'équité et de la préservation des valeurs consacrées par la Constitution de la deuxième République.