Démission en cascade au sein du mouvement « Echaab » Ça ne va pas très fort, ces derniers jours, chez les nationalistes arabes tunisiens. Le Mouvement unioniste et progressiste « Echaab » déplore depuis une semaine plusieurs dizaines de démissions en son sein. Déjà à la naissance de ce parti, fruit d'une coalition entre deux sensibilités nationalistes menées par deux leaders plutôt incompatibles, les observateurs les plus perspicaces donnaient peu de chances de survie à cette « union » si friable. La première conférence de presse tenue en avril dernier par cette coalition n'a pas drainé un grand monde et aboutit à un petit fiasco au niveau de son organisation et de son contenu : il n'y avait presque pas de journalistes dans la salle du Mondial où le point de presse fut donné, on entonna très mal l'hymne nationaliste arabe et l'on n'annonça aucun programme politique, économique ou autre. A propos du Congrès du Mouvement, on n'avait pas non plus d'idée sur la date de sa tenue. D'ailleurs, jusqu'aujourd'hui, il n'y a toujours pas de certitude le concernant. Au sein du mouvement, on se pose encore des questions sur son opportunité. De nombreux adhérents doutent même que leur parti puisse être prêt pour participer aux élections de la Constituante. Maître Béchir Essid (coordinateur du Mouvement Echaab et l'un de ses leaders) a, paraît-il, passé l'été de conciliabule en conciliabule pour « rapprocher les vues » et dissiper les mésententes et les malentendus. En juillet, il dut publier une mise au point dans les journaux pour démentir les rumeurs selon lesquelles son parti préparait une alliance avec le mouvement islamiste Ennahdha. Il faut dire que les déclarations à la télévision et dans les journaux de quelques membres influents du parti donnaient parfois raison à ceux qui flairaient ce rapprochement, à leurs yeux, compromettant et préjudiciable à la ligne du Mouvement unioniste et progressiste « Echaab ». En ce moment, les démissions pleuvent au sein d'Echaab à cause, entre autres, de « déviances » constatées chez certains dirigeants par rapport aux principes du nationalisme arabe. Un contexte défavorable D'un autre côté, il faut reconnaître que depuis leur déclenchement, la crise libyenne et la répression en Syrie ne font qu'accentuer les divisions à l'intérieur des panarabistes de tous les horizons. En Tunisie, les désaccords à ce sujet sont plus évidents et plus tranchés en raison de la campagne électorale qui bat actuellement son plein. Et nous pensons que Bachar El Assad et Mouammar Kadhafi desservent plutôt celle des nationalistes arabes tunisiens. Non seulement, nos unionistes ont de la peine à resserrer leurs rangs et à concilier leurs idées, non seulement ils n'arrivent pas à se disculper totalement à propos de leurs intentions « nahdhaouistes », mais en plus, ils doivent faire face aux critiques acerbes qui les visent en raison de leur soutien (déclaré ou implicite) aux deux dictateurs syrien et libyen. A l'heure où les peuples arabes s'insurgent contre les tyrans qui les dirigent et militent pour plus de liberté et de démocratie, nos nationalistes arabes tentent par tous les moyens et avec des arguments très contestables de trouver des excuses à Assad et à Kadhafi, voire même à Abdallah Saleh, l'ex-maître du Yémen. On invoque par exemple des manœuvres sionistes et impérialistes qui viseraient la déstabilisation et l'affaiblissement de ces deux « bastions » de la lutte pour l'honneur arabe ! Assad et Kadhafi seraient donc les nobles héritiers de Nasser et de Saddam Hussein, et à ce titre il faudrait les soutenir dans leur combat contre l'hégémonie américaine et l'expansionnisme israélien ! A ce propos, nos unionistes progressistes d'Echaab sont Nassériens jusqu'à la moelle. C'est leur droit, bien sûr ! Mais s'ils comptent conquérir la sympathie des jeunes, ils ont du pain sur la planche. Nasser avait la cote auprès des jeunes générations des années 60 et 70 du siècle passé. Est-il aussi adulé par les temps qui courent ? Et d'abord qui le connaît parmi les Tunisiens de moins de 25 ans ? A peine entendent-ils parler de lui ! Comment s'y prendra donc Echaab pour rajeunir sa « base » en continuant de soutenir les dictateurs d'aujourd'hui et les tyrans d'hier. Franchement, nous voyons mal les Nationalistes tunisiens sortir de l'impasse où ils se sont engagés et où les entraînent encore leurs passions nationalistes. Le contexte arabe actuel leur joue un mauvais tour. Ce n'est pas le cas des Nahdhaouis qui bénéficient toujours de ce retour en force des islamismes dans le monde. Mais eux au moins ils ne brandissent ni le portrait de Khomeiny ni celui de Ben Laden, même s'ils n'en pensent pas moins !