Par Adel LATRECH Dans cette cacophonie de témoignages et d'avis discordants qui, souvent, manquent de justesse et de conformité à cause des écarts observés dans les analyses, les débats sont passionnés et alarmants. Certaines de ces interventions n'ont pas dérogé au principe et au droit d'être à l'écoute des aspirations légitimes du peuple et de les soumettre à son examen et à son jugement. D'autres, plus audacieuses, n'ont pas hésité à agir avec beaucoup de sincérité face aux multiples périls qui guettent une révolution encore balbutiante. Au plus près des convulsions sociales et politiques qui ébranlent et traumatisent la rue tunisienne, les intervenants ont décortiqué et épluché minutieusement et avec lucidité les problèmes et les difficultés qui ont consumé, à force de corruption et aussi d'incompétence, d'inaptitude et d'incapacité, toutes les forces vives de la nation. Sur tous les plans, on assiste avec effroi à la déliquescence de pratiquement tous les rouages de l'Etat et des ressources physiques et intellectuelles du peuple. La dictature de Ben Ali a ruiné et mis à plat l'économie du pays. Elle a vidé de toute substance le caractère fondamental de l'esprit du changement. C'est ainsi que l'Etat tunisien a fini par perdre toute crédibilité et a cessé d'être digne de confiance. Dès sa prise du pouvoir le 7 novembre 1987, Ben Ali et sa clique ont mené un travail de sape pour détruire, par une action progressive et secrète, les fondements de tout le tissu économique du pays. On a découvert avec une grande épouvante le tort fait au bassin minier de Gafsa, M'dhilla, Moularès et Redeyef, de la sidérurgie et d'El Fouladh, de la région de Jérissa et de tous les secteurs de l'activité économique de la Tunisie. Le tourisme n'échappe pas non plus à tous ces écarts honteux et révoltants. La crise structurelle a frappé de plein fouet ce secteur vital, vecteur d'importants dividendes. L'échec flagrant de la stratégie mise en place après 1987 se manifeste par le recul des entrées. Au début des années 1960, la Tunisie, pionnière en la matière, servait de référence aux pays de la rive sud de la Méditerranée. Les Turcs s'inspiraient, en ces années-là, du modèle tunisien et les Marocains suivaient de près les premiers pas du tourisme tunisien. Aujourd'hui, où en sommes-nous‑? Le retard accumulé, ainsi que la mauvaise gestion d'un secteur pourtant hautement stratégique, nous font envisager l'avenir avec beaucoup d'appréhension. Le Maroc, l'Egypte et la Turquie occupent actuellement un rang dominant en Méditerranée sans risque d'être concurrencés par la Tunisie. Sur le plan de l'enseignement, arme fatale de l'excellence tunisienne, la situation est désastreuse. La qualité du système dont se prévalaient les Tunisiens a cessé d'être. L'université tunisienne a dégringolé dans l'échelle des statistiques et ce ne sont nullement les annotations et les rapports du CCI (Centre du commerce international), de la Banque africaine de développement ou de la Banque mondiale ou même du Forum économique de Davos, sur de prétendues performances distillées dans le seul but de nous induire en erreur et de nous faire prendre les vessies pour des lanternes, qui vont nous rassurer. A présent, basta ! Notre patience est à bout…