Il importe de prendre à bras-le-corps et mettre en branle audacieusement des mesures à même de renverser la vapeur et initier un cercle vertueux pour l'économie et le vécu du commun des Tunisiens. Autant dire des projets structurants qui favorisent la création d'emplois, la relance des investissements et l'augmentation massive des exportations. Le gouvernement doit dépasser le seul effet d'annonce, cesser les déclarations d'intention, si généreuses soient-elles, redoubler d'imagination et d'audace Nos responsables politiques aiment visiblement faire la sieste. Aux dépens, risques et périls de notre économie. Souvenons-nous. Les 29 et 30 novembre 2016, se tenaient dans nos murs les assises de la Conférence Tunisia 2020, appelée aussi Conférence internationale pour l'économie et l'investissement. Plus de 70 pays et 1.000 participants, dont des entreprises et institutions internationales, y avaient pris part. M. Youssef Chahed, chef du gouvernement, avait annoncé alors 15 milliards de dinars d'accords signés et 19 milliards de dinars de promesses enregistrés au cours de la conférence, soit 34 milliards de dinars en tout. On avait conclu alors que Tunisia 2020 s'est achevée sur fond de fierté et d'optimisme. Mais qu'en est-il au bout du compte ? Pratiquement rien. Ou peu, ou prou. Et dire qu'il s'agissait de la deuxième conférence du genre, après la révolution de 2011, destinée à soutenir l'économie tunisienne. Une conférence similaire avait eu lieu en 2014. Avec les mêmes résultats. Une fois l'euphorie des lendemains qui chantent tombée, le train-train quotidien, borné et poisseux, a repris le dessus. Et les levées de boucliers sociales de reprendre périodiquement, sur fond de marasme économique de plus en plus accusé, désespérance et ras-le-bol généralisés. Aujourd'hui, l'euphorie a repris à l'issue de la visite officielle en Tunisie du président français Emmanuel Macron, achevée jeudi dernier. Les responsables voguent sur un nuage rose, l'optimisme et la fierté sont de mise, encore une fois. La veille de la visite du président français, le chef du gouvernement s'était entretenu avec Mme Christine Lagarde, Directrice générale du FMI, en marge d'une conférence internationale tenue à Marrakech, au Maroc. Evoquant devant un parterre de journalistes les réformes engagées par la Tunisie, Mme Christine Lagarde avait estimé que «parmi les principales réalisations (de la Tunisie) figurent la loi de finances 2018, ainsi que la stratégie de réforme de la fonction publique visant à améliorer la qualité du service et à ralentir la croissance de la masse salariale». De son côté, M. Jihad Azour, directeur du département Moyen-orient et Asie centrale du FMI, a déclaré qu'avec la loi de finances 2018, la Tunisie prend le bon cap, même si les stipulations de ladite loi avaient provoqué la colère de bon nombre de Tunisiens. À en croire M. Jihad Azour, «toute réforme passe par une phase de transition. Pendant cette phase, il est important de considérer des facteurs d'atténuation, tels que de bons programmes sociaux». Il a déclaré que les coupes dans les subventions des hydrocarbures, qui avaient profité principalement aux riches, dégageront des fonds pour des projets sociaux plus ciblés. Morale de l'histoire, les citoyens sont mécontents, le FMI est satisfait, notre gouvernement jubile. Oui mais la fête, toute fête, si illusoire et nourrie d'autosuggestion soit-elle, finit par retomber. L'avis de nos partenaires internationaux importe, certes. Mais les vraies réponses à la profonde crise économique et sociale que nous subissons passe outre les déclarations ampoulées et autres jubilations de circonstance. Il importe de prendre à bras-le-corps et mettre en branle audacieusement des mesures à même de renverser la vapeur et initier un cercle vertueux pour l'économie et le vécu du commun des Tunisiens. Autant dire des projets structurants qui favorisent la création d'emplois, la relance des investissements et l'augmentation massive des exportations. Pour ce faire, le gouvernement doit dépasser le seul effet d'annonce, cesser les déclarations d'intention, si généreuses soient-elles, redoubler d'imagination et d'audace. Parce que seule l'audace est payante, et la torpeur sanctionne. Encore faut-il également que le chef du gouvernement retape son staff. On juge aussi le responsable selon les gens qui l'entourent. Jusqu'ici, les politiques superficielles, défendues bec et ongles par certains conseillers qu'on dirait totalement coupés de la réalité, ont perpétué et accentué la crise. Et lorsqu'on est pour ainsi dire abonné à l'échec, il y a un jour où l'on doit faire ses valises et partir. Le monde autour de nous change, se restructure, à une vitesse vertigineuse. La mer Méditerranée regorge de potentialités et peut être érigée en hub reliant l'Europe, les pays du bassin méditerranéen et les pays africains, chantres de la croissance pour les années à venir. Or, nous tournons volontiers le dos à la mer. Moyennant notre position géographique privilégiée, notre carnet d'adresses et notre réputation, nous partons malgré tout en pôle position dans le starting-block. Encore faut-il avoir la volonté pour agir...