Par Abdelhamid Gmati La lutte contre la corruption se poursuit avec intensité et se traduit, régulièrement, par des mandats de dépôt contre des personnalités soupçonnées de corruption. Les derniers en date sont Lassaâd Hmaïed, déjà assigné à résidence surveillée depuis le 16 octobre dernier par le ministère de l'Intérieur et ayant comparu devant le juge du pôle judiciaire financier pour détournement et Mohamed Louati, assigné à résidence pour blanchiment d'argent, fraude douanière et infractions de change, pour un montant global dépassant les 20 milliards. Et les dossiers s'accumulent. Au 31 octobre dernier, le rapport de l'Instance nationale de lutte contre la corruption faisait état de 94 dossiers transmis à la justice. Et on rappelle que le 15 juin dernier, le porte parole du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, Sofien Sliti, a révélé que 1.700 dossiers de corruption ont été remis à la justice dont 600 ont été déjà traités. La traque aux corrompus ne concerne pas seulement le milieu des « affaires » mais s'étend à d'autres secteurs. Dernière action en date : hier et aujourd'hui se tient, à Ain Draham, un atelier de réflexion sur les principes de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption dans les milieux universitaires en Tunisie. Il semble que la corruption dans les milieux universitaires et étudiants est devenue une pratique courante. Ces journées «Etudiants contre la corruption», incluent une session de formation destinée à un groupe représentatif d'étudiants qui permettra de concevoir un plan de lutte contre toutes les formes de corruption en milieu universitaire. L'objectif est d'inciter ces groupes d'étudiants à élaborer une charte, un plan de lutte contre la corruption, qu'ils seront appelés par la suite à promouvoir et à mettre en œuvre. Et une étude, publiée à la fin du mois d'octobre, affirme que « la corruption est devenue endémique en Tunisie ». Et la Fondation Carnegie pour la Paix internationale (Carnegie Endowment for International Peace) précise que « les citoyens ordinaires s'engagent dans des pratiques corrompues et en bénéficient. De nombreuses mesures juridiques et initiatives de la société civile ont été mises en œuvre pour lutter contre la corruption, mais elle est perçue comme étant encore plus répandue aujourd'hui que sous Ben Ali ». D'après ce cercle de réflexion, créé par le département de la Défense des Etats-Unis, on assiste à l'émergence « de la petite corruption généralisée ». Depuis 2011 et en réplique à ce qui se passait dans l'ancien régime, tout le monde accuse tout le monde de corruption. Les politiques, les riches et même le « petit peuple » y passe. Et comme il ne peut y avoir de corrompu sans corrupteur... une véritable psychose à la corruption. En fait, il faut relativiser et tenir compte du terme arabe «fassad» qui est un «fourre-tout». Il peut signifier corruption mais aussi prévarication, passe-droits, déviation sexuelle, voleur... Il est vrai que la corruption se retrouve dans tous les milieux. Mais elle ne concerne que quelques individus. Tous les hommes d'affaires ne sont pas corrompus et tous les politiques non plus. Ne peut être corrupteur que celui qui dispose de moyens importants. Et ne peut être corrompu que celui qui dispose du pouvoir d'octroyer une autorisation, ou un service normalement difficile à obtenir par tout le monde. Il n'en reste pas moins que cette lutte contre la corruption doit être menée avec détermination et sérieux. La tâche est complexe. On rappelle qu'une stratégie nationale de lutte contre la corruption (Snlcc) a été officiellement signée vendredi 9 décembre 2016. « Elle vise à faire de la Tunisie, un pays où l'obscurité de la mauvaise gouvernance et de la corruption cède face à la lumière de l'intégrité, de la transparence et de la justice ». Elle implique la participation de tous les citoyens à quelque niveau qu'ils se trouvent. Et il importe de cesser cette psychose qui ne fait qu'envenimer la situation.