Le débat politique télévisé est un genre télévisuel à part entière. Il s'agit d'un produit qui englobe la linguistique c'est-à-dire la parole et l'audiovisuel, une situation télévisée qui oppose un duel de deux acteurs politiques, ou un invité politique face à des chroniqueurs, le tout orchestré par un présentateur télé. Vendredi soir sur la chaine Attessia et après une longue absence des plateaux télés, un débat politique a réuni la présidente du PDL Abir Moussi, avec les trois chroniqueurs politiques de la chaîne Borhène Bssais, Néji Zairi et Khélifa Ben Salem, animé par Malek Baccari. Hier soir la forme et le contenu de ce produit télévisuel hebdomadaire a prit une tournure autre, imposée implicitement par l'invitée elle-même. L'émission RDV9 démarre avec un VTR (vidéo tape recorder) qui résume sommairement le parcours de Abir Moussi ces derniers mois et qui était censé lancer le débat. De suite, Abir Moussi casse la cadence de l'émission en demandant de revenir sur le VTR, chose qui n'a pas été faite, et impose de suite le tempo de l'émission avec une joute oratoire remarquable. D'une discussion de plateau, l'émission prend une tournure d'interrogatoire, Moussi en face de trois chroniqueurs qui ne réussissent pas à maitriser l'échange ni la cohérence des questions face à une Abir Moussi très déterminée à revenir sur tous les détails du VTR déclenchant une tension, un long moment de déséquilibre télévisuel de trois contre une. Comme elle a réussi à installer une certaine pression dès le début, Abir Moussi, arrive à détendre l'atmosphère sur le plateau (au bout d'une heure de direct) en échangeant quelques taquineries avec Borhène Bssais. De suite, l'émission prend une tournure plus intéressante en langage télé et amène Borhène Bssais à « rétablir l'ordre de l'émission » et creuser dans un débat plus profond et mieux ciblé. Le débat politique télévisé se doit d'être porté par l'objectif d'information et nourrit par une dimension polémique de la communication. L'émission politique est porteuse de discours et de tout un système de représentation conversationnelle qui ne refuse pas la mise en scène de certaines émotions, le débat du vendredi soir en est la preuve. Le débat politique télévisé direct non seulement il porte cette production de la vérité mais aussi de tout un dispositif du spectaculaire influençant explicitement le téléspectateur / électeur. L'aspect talk show des débats politiques télévisés, hasardeux le vendredi soir provoqué par l'invitée, assure justement cette mixture et propose une vérité autre sur le débat lui-même et par conséquent sur l'invité politique. L'épisode de l'émission de RDV 9 du 09 avril avec Abir Moussi qui, visiblement semble revoir sa stratégie de communication, incarne un moment intéressant de télévision qui devrait être plus élaboré pour un enjeu différent d'influence et de représentation de symboles. Cela changerait, probablement, la conception télévisuelle des débats télévisés tunisiens qui semblent s'enfermer dans un format audiovisuel et conversationnel rigide aussi bien dans la forme que le contenu. Pour tout politicien, la télévision demeure une véritable machine électorale. Henda Haouala Maitre de conférences en techniques audiovisuelles et cinéma Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!