On serait en droit de se poser des questions en rapport avec le bilan assez mitigé de Habib Essid à la tête de son premier cabinet, dans le sens où ce bilan frappe d'emblée par des contrastes flagrants en matière de performance, ou disons, d'efficacité. En effet, d'un côté, il, est indéniable que le gouvernement Habib Essid a gagné en efficacité dans le domaine de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme, notamment après qu'il ait opéré des changements radicaux à la tête des départements les plus sensibles du ministère de l'intérieur, sachant que ces changements sont toujours en cours, et qu'ils vont finir par intéresser toutes les grandes directions sécuritaires impliquées dans la lutte contre le terrorisme, notamment. Mais d'un autre côté, force est de constater qu'il n'a pas avancé d'un iota en ce qui concerne les autres grands maux du pays, à savoir l'économie et l'emploi des chômeurs. Il n'a pas avancé, au point que, lassés d'attendre et de ne rien voir venir, de nombreux tunisiens ont désespéré et ont laissé éclater leur mécontentement et leur colère, avec ce que çà a généré, dernièrement, comme incidents que tout le monde connait. Alors, pourquoi ces deux poids, deux mesures, et pourquoi il n'a rien réussi dans ces registres, alors qu'il a excellé dans celui de la sécurité ? Eh bien, tout simplement, parce qu'au niveau de la sécurité, il a « osé » faire le ménage et débarrasser le département de toute la vermine dont il avait été infesté, lors du règne de la Troïka. Et encore ! Il doit, certainement, être au courant du millier d'agents qui ont été recrutés par un grand parti de Feue la Troïka, avec comme unique condition à l'embauche, un dévouement indéfectible à ce parti et à son idéologie. Et il doit, de ce fait, savoir qu'ils sont toujours là, terrés dans les bureaux ou dans les casernes où ils avaient été affectés, en attendant l'Hallali. Ce qui implique qu'il devra, pour être sûr de contrôler ses services sécuritaires, aller chercher ces individus et les renvoyer séance tenante pour les empêcher d'accomplir le dessein pour lequel ils avaient été recrutés. On comprend, dès lors, pourquoi, il n'a rien pu faire sur le plan de l'économie, quand on sait que ce même grand parti membre de la Troïka a vidé les caisses de l'Etat pour verser des dédommagements à ses anciens guerriers, repris de justice, au nom d'une certaine amnistie générale. Comme il a détourné des sommes astronomiques reçues par le pays sous forme de dons et de prêts, pour ses propres intérêts, en les offrant à des associations douteuses, et même en en distribuant, forcément, une bonne partie à ses membres ce qui pourrait expliquer l'enrichissement foudroyant et flagrant qu'ils ont affiché, à peine ils avaient mis les pieds dans les postes qui leurs avaient été donnés, postes qui, soit dit en passant, n'ont rien de particulièrement enrichissant, question salaires. Et c'est pareil pour ce qui est de son échec dans le domaine de l'emploi, quand on voit que ce département, on ne peut plus vital, a été « confié » à un membre de ce même parti de la Troïka, avec comme seul objectif de maintenir clos le dossier de l'emploi, de peur de remettre en question les milliers de recrutements dont ont bénéficié les partisans de cette formation politique et leurs enfants, en guise de dédommagement pour leurs crimes commis par le passé. D'ailleurs ce ministre « en charge de l'emploi » a bien déclaré dernièrement, qu'il est hors de question de recruter tous les chômeurs, sinon l'Etat coulerait, car il sait de quoi il parle, puisqu'ils avaient bein réussi à couler l'Etat, auparavant avec leurs milliers de recrutements. Des recrutements qui ont bourré l'administration tunisienne d'incapables, d'inexpérimentés et d'incompétents, et qui ont ôté tout espoir d'embauche pour les autres, ceux qui souffraient du chômage depuis des années, et notamment les diplômés du supérieur, et ceux qui ont été, en quelque sorte, au départ de ce qu'on a convenu d'appeler « Révolution du jasmin ». Ce qui nous amène, forcément, à parler d'un autre registre pour lequel Habib Essid n'a rien pu, et ne pourra rien, celui du blocage de l'administration, dont il ne cesse de se plaindre, avec des projets au point mort, et des milliers de millions bloqués et inexploités par la faute de ces « bleus » qui ont pris possession de tous les rouages de l'administration tunisienne, lui ôtant ses capacités et son efficacité. Voilà, donc, pourquoi, Habib Essid n'a rien pu, et ne pourra, d'ailleurs, rien faire pour sauver le pays et le sortir du gouffre, car tant qu'il reste allié avec ceux qui ont conduit à ce désastre, et tant qu'ils contrôlent avec lui les postes clés du gouvernement et de l'administration, et tant qu'il n'a pas osé ouvrir des dossiers comme celui des dédommagements perçus par les amnistiés, ou celui des dons détournés par quelques uns, à l'instar du fameux milliard de l'affaire du Sheraton, ou, alors, celui de la purge qu'a subie l'administration tunisienne pour la vider de ses compétences et les remplacer par des nuls... Tant qu'il n'a pas ouvert tous ces dossiers, Essid ne pourra jamais rien faire de bon dans ces chapitres.