Le ministre des Affaires religieuses doit se dire qu'il a été gratifié d'un vrai cadeau empoisonné. Après plus de 100 jours de sa prise de fonctions, il se rend compte que la gestion de ce ministère n'est pas une sinécure, que les problèmes accumulés au fil des ans et hérités de l'ère de la dictature sont intenses et que la nouvelle donne dans le pays créée par la Révolution et par l'accession au pouvoir d'un parti islamiste, place le ministère sous les feux des projecteurs et soumet chacune de ses décisions à une analyse minutieuse empreinte souvent d'acerbes critiques et d'accusations de laxisme et de prise de position partisane. Parce que le ministère s'apparente au parti dominant au gouvernement, donc, contraint par idéologie à suivre la ligne politique de son parti. Cette attitude s'est manifestée hier, avec évidence, quand les journalistes ont « poussé » le ministre à évoquer la question épineuse de la montée du salafisme et quelle stratégie faut-il adopter pour traiter avec ses adeptes. Le ministre prône le dialogue et écarte complètement l'approche sécuritaire. On est complètement d'accord, car rien ne vaut le dialogue pour la résolution des problèmes et la préservation de la paix sociale. Sauf que ce sont là des redondances déjà entendues. Cette même approche a été suggérée par le guide d'Ennahdha, M.Rached Ghannouchi qui, bien avant le ministre des Affaires religieuses avait appelé à établir un dialogue avec les salafistes et de le poursuivre jusqu'à convaincre le plus grand nombre d'entre eux à renoncer à l'extrémisme et bannir la violence. La question qui se pose, cependant, est la disposition de la partie adverse à se plier aux règles du dialogue, à consentir des concessions, à respecter les libertés individuelles et à bannir le recours à la violence pour imposer un choix de société contraire aux mœurs tunisiennes. Les agissements des salafistes au cours des derniers mois n'incitent pas à l'optimisme, mais il est toujours utile d'essayer.