Le Temps-Agences - La Coordination nationale pour le changement démocratique (CNCD) a de nouveau échoué hier à attirer nombre de sympathisants pour sa manifestation hebdomadaire à Alger, ne regroupant qu'une cinquantaine de personnes sur la place du 1er Mai, a-t-on constaté sur place. Le dispositif policier n'a pas eu de difficulté à contenir les manifestants, qui scandaient les mots d'ordre habituels "Algérie libre et démocratique", "pouvoir y en a marre" ou encore "la jeunesse au pouvoir". Fidèle à lui-même, le vieux militant des droits de l'Homme et président d'honneur de la Ligue de défense des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdenour, a tenu à être présent, sans toutefois cacher sa déception devant la faible mobilisation. On recensait quelques députés du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), ainsi que des responsables du Parti laïc démocratique (PLD) et du Mouvement démocratique et social (MDS). "Le pouvoir empêche de s'exprimer les forces qui revendiquent le changement politique pacifique, alors qu'il multiplie les concessions contre les casseurs", a dénoncé le syndicaliste estudiantin Massine Aouili dans une allusion aux troubles quotidiens qui éclatent un peu partout en Algérie et face auxquels le gouvernement d'Ahmed Ouyahia a opté pour la politique de la carotte par crainte d'un soulèvement généralisé.
Jeunes, martyrs et vivants Ils sont jeunes, précaires et ne croient pas du tout en un avenir dans leur propre pays, l'Algérie. Un constat visiblement trop lourd à assumer pour trois Algériens âgés de 20 à 35 ans qui ont voulu déclarer en personne leur avis de décès auprès de l'Etat civil. L'un est étudiant en droit, l'autre journalier et le troisième ouvrier. Tous trois se sont présentés, le 22 mars, devant l'Assemblée Populaire communale (APC) d'Aïn-Tinedamine, dans la daïra (sous préfecture) de Moulay-Slissen, pour faire inscrire leur décès dans les registres, rapporte Le Soir d'Algérie. Selon ce quotidien, «les jeunes ont déclaré ne pas faire partie des vivants et ne pas avoir leur part dans cette vie, étant donné la précarité dans laquelle ils ne font que s'enliser». Essuyant un premier refus, ils ont demandé à rencontrer le maire qui n'a pas voulu accéder à leur requête «inédite et aberrante». Sans se démonter, les trois jeunes hommes "à l'article de la mort administrative" se sont dirigés vers la daïra pour demander une audience au chef de la circonscription. Au final, «il a fallu des heures pour les raisonner». L'histoire insolite de ces jeunes algériens n'est peut-être pas si anecdotique au regard des mouvements révolutionnaires qui ont renversé les régimes voisins en Tunisie et en Egypte. Dans ces deux pays, la jeunesse a joué un rôle majeur. En Tunisie, la Révolution du jasmin est venue d'un acte de désespoir d'un jeune tunisien, Mohammed Bouazizi, qui s'était immolé par le feu pour protester contre la confiscation de son étalage ambulant de fruits et légumes par les autorités de Sidi Bouzid. Dans une chronique du Quotidien d'Oran, un journaliste algérien s'interroge sur le refus obstiné des dirigeants arabes de dialoguer avec le peuple, longtemps étouffé mais bien vivant. Une attitude qui en Tunisie et en Egypte a causé leur chute, au prix de la perte de nombreuses vies humaines. «Pourquoi les régimes arabes ne commencent-ils pas par dialoguer au début de la crise et non vers la fin de la Révolution? Pourquoi se cabrent-ils férocement dès qu'on leur adresse une demande?» se demande le quotidien algérien. Et le chroniqueur algérien de conclure: «Chez nous, le Pouvoir ne dialogue qu'avec les martyrs morts! il dit qu'il leur parle chaque nuit, qu'ils lui ont dit de continuer à gouverner le pays avec le regard dur, qu'il sont heureux, qu'ils veulent que d'autres les rejoignent, que l'indépendance a été une réussite et qu'ils embrassent tout le monde et leur disent "mangez-bien!".»