Vous vous plaignez souvent du poids trop lourd de votre couffin et du mauvais état de votre portefeuille durant le mois de Ramadan, mais avez-vous jamais songé à l'état de votre estomac lors de la rupture du jeûne ? C'est un tableau que n'auraient pas renié Pantagruel ou Gargantua. Cela commence avec un verre d'eau, histoire de préparer le terrain. Pour certains, ce sera une datte, symbole de frugalité. Une austérité de courte durée, puisque s'annonce une Chorba bien chaude où baignent de petits bouts de viande. Suivent deux salades en moyenne, l'une crue et l'autre Méchouia. Sans trêve, on enfile des Briks dégoulinant d'huile, un Tajine bien gras noyé dans de la sauce, le tout arrosé d'une boisson gazeuse ou de jus chimique, et un petit verre de thé " pour digérer ", promettent les croyances traditionnelles. Après cette grande invasion, le Tunisien va passer la soirée à grignoter. On commence par déguster des pâtisseries, puis on goûte aux Zlabias du bout des lèvres, on enchaine sur un bol de Bouza et encore une fois du thé où baignent quelques pignons, pour digérer cette deuxième salve de nourritures terrestres. Et aux sucs gastriques de se débrouiller pour résoudre cette équation gargantuesque à plusieurs inconnues. Et entretemps, on doit regarder des séries TV qui ne font pas rire et des feuilletons qui ne font pas pleurer, en ingurgitant des milliers de spots publicitaires idiots qui poussent à la consommation, encore et encore... Pour rappel, les besoins quotidiens d'un adulte pratiquant une activité normale sont de trois mille calories. Or chaque soir durant ce mois, nous ingurgitons dix fois plus. " J'ai pris cinq kilos depuis le début de Ramadhan ", affirme une dame. Normal avec cette grande bouffe nocturne. Déjà que 71% des tunisiennes sont en surpoids, vous imaginez le tableau ! Des modèles parfaits pour Botero qui ne peint que des femmes rondes. Et pour convaincre les plus incrédules, jetez un coup d'œil sur la taille des poubelles ces jours-ci, sur le nombre de personnes hospitalisées pour des problèmes de diabète, de pression artérielle ou de problèmes cardiaques.