Avec l'euphorie que connaît aujourd'hui le rythme de consommation chez les ménages tunisiens, il y a lieu de s'interroger sur les raisons qui freinent le développement des sociétés spécialisées dans les crédits à la consommation. Des sociétés comme CETELEM et SOFINCO en France et comme Wafasalaf au Maroc opèrent activement pour faciliter les lignes de crédits et diversifier les produits offerts aux ménages tout en garantissant le contrôle des flux de la monnaie en circulation. Les sociétés de gestion des crédits à la consommation peuvent être une aubaine pour la création davantage d'emplois et une orientation stratégique pour hisser la branche au niveau du professionnalisme souhaité, à condition d'éviter le Krach de BATAM. En Tunisie, l'octroi des crédits à la consommation reste un « métier » et même une vocation des banques commerciales et les sociétés de gestion spécialisées des crédits tardent à trouver leur place sur le paysage bancaire et financier. L'absence de cadre réglementaire régissant les sociétés de crédits à la consommation et la crainte de perte de contrôle, de déséquilibre du marché en plus des éventualités de détournement de fonds, peuvent expliquer la réticence de la Banque Centrale à autoriser la création et l'essor des sociétés de crédits à la consommation en tant que structures indépendantes des banques. Autrement dit, faire en sorte de séparer l'activité bancaire de financement des investissements de l'activité d'attribution de crédit à la consommation. Contrairement au secteur leasing, il s'agit de réussir une ségrégation entre les banques et les sociétés de crédits à la consommation tout en consolidant les relations de complémentarité entre les deux institutions (banques et sociétés de crédit à la consommation) considérées comme des établissements de crédit à part entière. Il faut dire qu'après l'affaire BATAM, l'appel à la temporisation est légitime : une inadéquation entre les crédits en circulation et la capacité de remboursement des ménages a mené la première société de vente à crédits en Tunisie à la ruine. Ceci n'exclut pas les vertus des sociétés de crédits à la consommation dans la restructuration et la spécialisation de la branche. En effet, nul ne peut nier l'extension des sociétés de crédits à la consommation dans plusieurs pays dont le Maroc et le rôle qui leur sont impartis en matière de contrôle, de facilitation et d'impulsion des crédits à la consommation. Lors d'une visite récemment effectuée dans les locaux de Wafasalaf, filiale du groupe Attijariwafa bank et de la société française Sofinco, nous avons pris connaissance de l'élan de cette activité au Maroc. La loi régissant le secteur a été mis en vigueur en 1993. Près de 19 sociétés spécialisées dans les crédits à la consommation opèrent au Maroc, dont 4 d'entre elles accaparent 80% du marché. Wafasalaf, considéré comme le leader du secteur au Maroc est une institution bancaire indépendante qui intervient dans l'ensemble des domaines du crédit à la consommation : financement sur le lieu de vente, vente directe, partenariats et « service-providing ». « Dans le domaine du financement de l'équipement des ménages, Wafasalaf a mis en place un accord de première importance avec Marjane. En matière de financements automobiles, les performances de Wafasalaf sont dues à la mise en place de partenariats avec de grandes marques comme par exemple Renault ». Avec 510.OOO clients au portefeuille, wafasalaf a accaparé 34% de part de marché. La société profite de la dynamique économique et de la conjoncture favorable sur le marché marocain. Développement du secteur de la grande distribution moderne (30 hypermarchés présents sur le marché), délocalisation sur le site marocain de 400.000 véhicules Renault à l'export..., ventes de 103.000 véhicules, forte concurrence bancaire, envolée de l'immobilier sont autant de facteurs qui mobilisent l'activité de crédits. Outre les indicateurs considérés comme des stimulateurs de la demande, la politique d'octroi de crédits adoptée par wafasalaf se base sur un système de gestion de risque (notation de score développé par Experian). Le système permet à la société d'optimiser la maîtrise de risque et de mettre en place une approche de recouvrement plus rationnelle. A ce titre, M.Khaled Boukantar, directeur de distribution à wafasalaf nous a révélé que le taux de risque est évalué à 1% au sein de la société. Ce faible seuil de tolérance est expliqué par ailleurs par le système de prélèvement mis en place du fait que la société de crédit en question procède à un prélèvement direct sur les comptes du trésor public, de manière à éviter toute possibilité de non remboursement de crédits. Ainsi la société de crédits à la consommation pourra développer une palette de produits tout en garantissant le retour sur fonds d'investissements et le remboursement des encours de crédits. Par ailleurs le développement de sociétés de crédits de consommation est une source de création d'emplois pour les diplômés du supérieur. Elles présentent également l'avantage de présenter des offres compétitives aux clients tout en permettant aux banques de jouer leur rôle de financement de l'économie et de mobilisation de l'épargne nationale à long terme. En Tunisie et outre le lancement de certains produits bancaires spécifiques à la consommation, les sociétés spécialisées dans les crédits à la consommation n'ont pas jusque-là de place sur le marché bancaire et financier, malgré les opportunités qu'elles présentent.