Les caisses sociales sont en difficulté. Au lieu de dire la vérité et de désigner les vrais responsables, on contourne la réalité pour invoquer de faux-fuyants. Les entreprises doivent 3.000 milliards de nos millimes à la Cnss. Qui en parle? Personne. Alors face à l'indigence des pouvoirs publics, une action citoyenne salvatrice est nécessaire pour éviter l'irréparable Les caisses de sécurité sociale et celle de l'assurance maladie, qu'on se le dise d'emblée, sans détour et avec force, sont des mutuelles appartenant à leurs affiliés. Ce sont eux les pourvoyeurs de fonds pour ces caisses. La part versée par l'employeur, qu'il soit l'Etat, les entreprises publiques ou privées, se fait au nom de cet affilié encore actif et elle est réglementée selon une loi bien définie. Elle ne peut, par conséquent, être considérée —comme certains employeurs le pensent— comme une sorte de faveur faite sous la contrainte de la loi. Cet argent versé sous forme de cotisations mensuelles est le bien de cette communauté des affiliés à qui —pour la précision—, même à la retraite, on continue à prélever de leur pension une certaine somme reversée dans ces mêmes caisses sous forme de cotisation, à côté bien sûr de l'impôt dont ils s'acquittent et qu'on prélève à la source. Pourquoi un tel constat, dira-t-on? Et en quoi cela pourrait être utile? A vrai dire, cela —et on le sait d'avance— va déranger, surtout les bonnes âmes qui acceptent difficilement qu'on leur dise certaines vérités qui vont à contre-courant de ce qu'elles ont l'habitude de croire. Ce n'est certes pas de leur faute, parce qu'on a toujours agi ainsi du côté du pouvoir, comme si ces caisses étaient des entreprises publiques. Et c'est de là que viennent tout le mal et tous les problèmes auxquels sont confrontées aujourd'hui les trois caisses qui jouent un des tout premiers rôles socioéconomiques. Les difficultés auxquelles elles font face sont dues, pour l'essentiel, à cette perception où les pouvoirs publics pesaient et pèsent encore de tout leur poids et décident de tout pour ces caisses. La mauvaise gestion n'en est qu'une des conséquences de cette ingérence qui mène droit à la faillite. Rôles socioéconomiques ! Il n'y a pas très longtemps, la Cnss disposait d'un fonds de plus d'un milliard et demi de dinars, voire plus quelques années auparavant. Cet argent était placé sur le marché, il générait des dividendes conséquents. La caisse s'était même lancée dans l'immobilier. Que de familles ont profité des fameux logements sociaux ! Aujourd'hui, on craint sérieusement pour la pérennité des services de la Cnss. Idem pour la Cnrps qui, de son côté, disposait d'un certain trésor lui permettant d'entrevoir l'avenir sans trop de soucis. La situation de cette dernière est encore plus alarmante. Pour la Cnam, ce n'est pas non plus la joie, avec les retards enregistrés dans les remboursements, que cela soit pour les assurés ou pour les partenaires de la caisse (pharmacies, cliniques ou médecins). Il faut dire que la création de la Cnam était l'une des plus grandes aberrations en matière d'assurance maladie, étant donné que plusieurs régimes existaient auparavant et parvenaient à fournir des services qui satisfaisaient les assurés. Mais ce qui est fait est fait, et il faudrait sans doute prospecter plus d'une voie pour sortir nos caisses de l'impasse. Toutefois, on ne peut omettre de signaler, au passage, que la situation financière alarmante dans laquelle se trouve la Cnss est due aux milliards que lui doivent plusieurs entreprises. Un chiffre effrayant : trois milliards de dinars. Eh oui, trois mille milliards de millimes! Ce chiffre, nous l'avons puisé à la meilleure des sources qui puisse être dans la caisse. Voilà comment on dilapide des années de labeur des pauvres affiliés. L'argent, cet argent-là qui revient de droit à la caisse et à ses affiliés bien sûr, à moins d'une réelle volonté des décideurs politiques, risque de ne jamais être récupéré. A-t-on jamais parlé de ces dus ? Mais on doute fort qu'une telle volonté puisse voir le jour. On ne parle presque jamais de ce que des milliers d'employeurs privés doivent à la Cnss. On fait tout pour escamoter cette réalité. Les difficultés de cette caisse et des autres également sont expliquées par la diminution du nombre des actifs et l'augmentation de celui des retraités, mais jamais de ce grand vol du siècle, car il s'agit bien d'un vol. Et ses auteurs ne sont autres que cette catégorie d'hommes d'affaires véreux qui ne s'acquittent pas de leur devoir d'imposition. Des milliers de sangsues qui font saigner tels des vampires cette pauvre Tunisie et sa classe laborieuse, sous l'œil complice d'un pouvoir incapable de la moindre réaction, à même de faire croire à un semblant de justice sociale. Trop, c'est trop! Et si cela ne peut bouger d'en haut, il faudrait qu'une action citoyenne se manifeste pour sauver ces caisses qui font vivoter des centaines de milliers de familles qui n'ont d'autres ressources que cette modique pension perçue à la fin de chaque mois. L'Etat sait et se tait ! Il n'ose affronter la caste des bandits qui fait la pluie et le beau temps dans un pays livré à lui-même et dont les classes les plus démunies payent le lourd tribut de la rapacité d'une minorité plus que fortunée et qui n'a de cesse de réclamer plus d'avantages et de facilités d'accès à l'argent de la communauté nationale. Ainsi, et au vu de l'absence d'une autorité capable de jouer son rôle d'arbitre et de faire respecter la loi, il est du droit des citoyens d'exiger à ce que des comptes leur soient rendus quant à la manière dont ces caisses sont gérées, et qu'une certaine représentation au sein même de ces caisses soit prévue dans l'avenir pour une réelle transparence à tous les niveaux et pour, aussi, optimiser au maximum le rendement du personnel pléthorique de ces caisses, et dont des centaines sinon davantage alourdissent le fardeau, sans pour autant être d'une quelconque utilité. Pis encore, nombre d'entre eux sont d'un comportement qui fait fi du minimum requis de délicatesse et de correction vis-à-vis de ceux qui sont leur raison d'être. Il est vrai qu'à la manière dont sont gérées ces caisses depuis leur création, on se croit dans un de ces domaines «beylics» où règnent l'anarchie et l'insolence. Les lois et la réglementation régissant ces caisses doivent impérativement changer pour que le citoyen puisse s'assurer du bon usage de l'argent qu'il dépose durant toute une vie active et pour qu'on ne tolère plus aux véreux de telles largesses au point de se permettre de voler des centaines de milliers de Tunisiens profitant de la complaisance passée et présente des pouvoir publics.