Une démarche down to up (traduisez : de bas en haut ou de la base au sommet), fondée sur l'interactivité entre les citoyens d'une part, et les décideurs et professionnels, de l'autre Le ministère de la Santé et les représentants de la société civile œuvrant dans le domaine de la santé ont tenu, hier à Tunis, et avec l'appui de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), un séminaire sur le déroulement du projet de dialogue sociétal sur les politiques, les stratégies et les plans nationaux de santé. Lancé le 8 octobre 2012, ce projet ambitieux a été interrompu pendant quatre mois, pour retrouver, finalement, son chemin vers la reconstruction d'un système de santé nouveau, adapté au contexte démographique et épidémiologique actuel et répondant aux exigences de la population. L'objectif étant, désormais, d'opter pour une démarche tout à fait contraire à celles conventionnelles : une démarche down to up, fondée sur l'interactivité entre les citoyens d'une part, et les décideurs et professionnels, de l'autre. Ouvrant les travaux de cette rencontre, M. Mohamed Salah Ben Ammar, ministre de la Santé, a indiqué que le secteur de la santé est à la fois vital et délicat dans la mesure où il constitue un pilier fondamental du développement mais qui présente des défaillances de taille auxquelles il faut remédier. Il a souligné la spécificité du dialogue sociétal qui use des délibérations régionales sur la santé afin de fixer les lignes directrices de la réforme envisagée. M. Ben Ammar a rappelé les principales caractéristiques du contexte sanitaire actuel. Notre pays connaît, en effet, des mutations démographiques et épidémiologiques nécessitant la mise en place de plans d'application appropriés au nouvel aspect médico-économique. Le ministre s'est montré optimiste quant à la réforme, surtout que le contexte actuel dépourvu, selon ses dires, des obstacles institutionnels et politiques de jadis, s'avère être favorable au changement pour le mieux. Il a insisté également sur les déterminants sociaux comme étant des données de base indispensables à l'élaboration de ladite réforme, et ce, dans le cadre d'une approche innovante, car participative, interactive, multilatérale et pérenne. Un projet unique en son genre De son côté, Mme Ann-Lise Guisset, consultante en système de santé à l'OMS, qui apporte un appui financier aux projets sur les politiques, aux stratégies et aux plans nationaux de santé auprès de 19 pays, a salué ce projet, le qualifiant d'unique en son genre. En effet, l'expérience qu'entreprend la Tunisie est singulière, puisqu'elle est la seule à parier sur le sociétal. «Certains ont essayé de nous dissuader quant à cette option. Mais nous avons tenu bon, car nous sommes convaincus de l'utilité, voire de l'efficacité, de cette approche. D'ailleurs, la Tunisie a déjà entrepris des dialogues et des consultations à l'échelle nationale, mais qui sont restés, à ce jour, sans suite notable. Le dialogue sociétal sur le système de la santé grandit jour après jour, comme une boule de neige. Il finira par donner ses fruits », a souligné l'oratrice. Et d'ajouter que le choix du moment est plus qu'idéal, car il s'agit d'une période-clé pour construire, non sans difficulté certes, mais aussi non sans enthousiasme. Prenant la parole, M. Zouhaïer Ben Jemaâ, porte-parole du dialogue sociétal et président de l'Association 20 millions de consommateurs, a insisté sur l'étroite et indispensable corrélation entre la réforme et la communication en temps réel, et ce, afin de mieux vulgariser l'information avant, pendant et après l'élaboration du projet. Bientôt, les délibérations régionales Présentant le dialogue sociétal, Imène Jaouadi, universitaire, a indiqué que le choix du dialogue-approche est significatif à plus d'un titre. Contrairement aux discours à sens unique qui convergent généralement vers des planifications stratégiques mono-sectorielles, le dialogue consiste en l'interactivité entre les différents acteurs, notamment les citoyens, les professionnels de la santé, les experts aussi bien nationaux qu'internationaux, les représentants de la société civile et les politiciens. Il s'agit, donc, d'un débat public visant à construire une compréhension commune des enjeux de la réforme sanitaire. « C'est une approche à la fois réaliste et visionnaire. Elle nous permet, a expliqué Mme Jaouadi, de reconstruire à partir des moyens disponibles et de réformer le système afin qu'il soit pérenne et innovant. Les actions de réforme proprement dites seront mises en œuvre entre 2017 et 2030. Les résultats de ce projet seront palpables à moyen terme ». Elle a ajouté : « Nous avons réussi pendant l'été et l'automne 2013 à diagnostiquer l'état des lieux du système de la santé, et ce, par le biais de plusieurs rencontres avec la population, les professionnels mais aussi grâce aux panels et aux ateliers thématiques organisés à cet effet. Aujourd'hui, nous nous apprêtons à entamer les délibérations régionales, qui s'étaleront sur deux mois (avril - mai). Cette étape nous permettra de regrouper les opinions et les suggestions des citoyens ainsi que celles des professionnels. Les résultats seront annoncés et validés en juin 2014 ».