Ce titre emprunté de l'ouvrage de Murray Rothbard (1926-1995), économiste et philosophe, s'adapte bien à la situation sociale qui prévaut dans nos contrées ces jours-ci. La reconquête des libertés publiques, cet idéal fruit de la révolution du 14 janvier 2011, et surtout l'expression de ces libertés notamment au vu de la prolifération des « sit-in » impromptus et paralysants, des grèves sauvages et autres turbulences et des critiques destructives et déstabilisantes à l'encontre d'un gouvernement sitôt débarqué iront-elles jusqu'à rendre le rêve du vrai changement utopique ? Statu quo. C'est le constat de l'économie tunisienne qui se dégage d'après le communiqué du Conseil d'administration de la Banque centrale de Tunisie (BCT) suite à sa réunion mensuelle en date du 18 janvier 2012 : des réserves de change couvrant 113 jours d'importations, un taux d'inflation se situant à 3,5%, un repli de l'investissement intérieur et étranger, une baisse des créations d'emplois, une dégradation des équilibres financiers (déficit de la balance des paiements courante estimé à 7,1% du PIB au terme de 2011, ...), etc. A vrai dire, la diapo n'a pas énormément changé durant ces deux derniers mois, une situation qui fait mal, qui occasionne un sérieux manque à gagner, mais qui, surtout, n'aide aucunement à ce que les choses puissent s'améliorer sur le double front économique et social. La théorie du chaos Ceci nous amène à nous référer à la théorie du chaos : c'est quand un système dynamique et non linéaire peut se comporter de manière à la fois déterministe ou non aléatoire et imprévisible. Appliquée au domaine socioéconomique, cette thèse considère la société et l'économie comme des systèmes complexes qui pourraient s'autoréguler (comme sous l'action de la main invisible d'Adam Smith). En définitive, c'est de ce désordre que devrait émerger l'ordre. Pour ce faire, il faudra une bonne dose de bonne volonté et d'un peu de patience, mais surtout d'une révolution culturelle cette fois, qui devrait aider à distinguer la liberté du chaos, l'ordre du laisser-aller ou du désordre, et le Droit de l'anarchie ou de l'arbitraire. En effet, de quelle liberté parle-t-on, si elle peut nous condamner à l'abîme et au purgatoire ? Certes, les troubles sont inévitablement associés aux bouleversements du choc révolutionnaire, mais après la mise en place d'un gouvernement légitime et l'amorce de l'apprentissage de la démocratie, il est temps que les choses se stabilisent pour appuyer la relance de l'appareil économique sans quoi aucune amélioration au plan social ne saurait être réalisée. Il y a lieu de privilégier, enfin, le patriotisme économique et social aux dépens de tout intérêt partisan ou privé. Les revendications syndicales ne doivent, en fin de compte, aucunement avoir des motivations politiques ou personnelles strictes. Il faudra également une bonne communication. On ne le répétera jamais assez : la communication reste au cœur de toute stratégie qui réussit : elle est à même de couper court à ce péril dévastateur qu'est la rumeur et toutes autres manœuvres déstabilisantes. D'ailleurs, ce «déficit de communication» n'est pas à reprocher au gouvernement uniquement, les entités économiques (entreprises publiques et privées, administrations) ont également du mal à parler à leurs salariés. Or, en cette période post-révolutionnaire délicate, rien ne vaut la multiplication des signaux rassurants envers les différentes parties prenantes pour faire décanter la situation. La réussite de cette communication reste tributaire aussi de l'adoption d'un discours sincère et réaliste (et non optimiste et idéaliste) afin de provoquer cette union sacrée qui fait actuellement cruellement défaut, seule à même de préserver notre grand acquis qu'est cette belle harmonie dans laquelle nous vivions juste au lendemain de la révolution du 14 janvier 2011 (solidarité tous azimuts et préservation de l'intérêt national aux dépens de toute autre considération) «Indispensable conjugaison des efforts pour garantir le rétablissement de la stabilité sécuritaire et sociale afin de permettre la reprise du rythme normal de l'activité économique dans les plus brefs délais» et «élaboration d'un schéma de développement et l'adoption d'une politique économique et financière claire tout en mettant en place un programme de financement qui tient compte des capacités du pays à mobiliser des ressources intérieures et extérieures et à préserver les équilibres globaux », telles sont les deux recommandations émanant des travaux du dernier Conseil d'administration de la BCT qui s'imposent de fait pour dépasser cette période sensible sans encombre. L'heure est désormais à l'engagement et à la mobilisation pour sauver ce qui peut être sauvé, pour ne pas ternir cette image d'un peuple mature qui a conquis l'estime mondiale et pour mériter en définitive cette démocratie naissante et cette liberté chèrement acquise au sang des martyrs de la révolution.