• Le candidat n'est généralement pas informé sur les compétences requises pour le poste ni des tâches à accomplir. • Un manque de spécialistes pour assurer la formation des cadres supérieurs de gestion des établissements de tourisme. L'arbre ne doit pas cacher la forêt. Certes, les effets collatéraux de la crise, notamment le climat d'insécurité, ont pesé lourd sur le secteur du tourisme, mais les causes réelles sont aussi variées que profondes, d'ordre structurel et organisationnel. En effet, les résultats de cette saison n'ont fait que confirmer la courbe à pente négative qui se dressait depuis l'année 2001. Une dégradation continue de la qualité des services, un bradage des prix et une marginalisation des compétences. «La gestion des ressources humaines est une variable capitale pour revitaliser le secteur, souffrant de plusieurs anomalies et, généralement, délaissées par les responsables», note M. Moëz Kacem, membre de l'Association mondiale pour la formation hôtelière et touristique (Amforht) et enseignant universitaire. Lors du dernier Forum mondial Amforht annuel, tenu à Chypre du 10 au 13 novembre, il a tenté de présenter une nouvelle approche basée sur la gestion prévisionnelle des ressources humaines et une communication interne efficace. La marginalisation des nouvelles recrues A vrai dire, le personnel du secteur souffre d'un manque d'encadrement à tous les stades, du recrutement à la promotion en passant par l'insertion et éventuellement le licenciement. Les problèmes commencent, dès le recrutement. «Le candidat n'est généralement pas informé sur les compétences requises pour le poste ni des tâches à accomplir», indique le spécialiste. Ensuite, au niveau de l'insertion dans le groupe de travail, la nouvelle recrue est délaissée face aux innombrables lacunes et ambiguïtés. Il explique : «L'esprit de leadership est le parent pauvre de la gestion des ressources humaines dans les unités hôtelières». De plus, saisonnalité oblige, la nature des contrats, les retards des rémunérations, l'organisation «forcée» des congés et la précarité des postes génèrent une instabilité sociale démotivante. En somme, le jeune travailleur, délaissé, peu confiant en son avenir et soucieux des fins du mois, n'est pas en mesure de fournir et de préserver un service de qualité. De l'autre côté, en Tunisie, il existe trois types d'organismes de formation pour le secteur touristique: les écoles et les centres de formation professionnelle et les établissements universitaires. «En effet, peu de spécialistes assurent la formation des cadres supérieurs censés se spécialiser dans la gestion des établissements de tourisme», estime-t-il. Déjà, plusieurs professionnels jugent que les diplômés en gestion hôtelière et touristique souffrent d'un manque dans leur formation universitaire et nécessitent une période d'adaptation plus ou moins longue depuis le recrutement. «Je pense que les décideurs dans le secteur touristique doivent donner plus d'importance à la formation en tourisme et en hôtellerie pour veiller à la garantie de la qualité des prestations d'une part, mais aussi pour bien répondre aux besoins du marché en matière de main-d'œuvre, d'autre part», recommande M. Kacem. En conclusion, avec des diplômés non opérationnels et des emplois précaires, on ne fait que raccourcir la durée de vie des savoir-faire. D'où une perte, garantie de tout avantage compétitif et une difficulté de rattrapage des concurrents. Un sombre bilan Cette année, le secteur du tourisme tunisien a vécu, probablement, la plus douloureuse crise de son histoire. Le bilan est très sombre. Tous les indicateurs, sans exception, virent au rouge par rapport aux résultats de l'année dernière, 2010, déjà considérée comme une année de crise. En effet, le secteur a connu une grave régression de presque 50% des recettes, une chute de 40% des nuitées passées, des taux d'occupation dérisoires... En conséquence, de nombreuses unités hôtelières ont fermé leurs portes, d'autres travaillent en veilleuse et tout le monde est en difficulté. Ce qui a engendré une effrayante perte d'emplois directs et indirects. Et les écarts ne cessent de se creuser en cette basse saison, ce qui pourrait allonger la liste des partants. Cependant, il convient de préciser que c'est depuis une décennie que le secteur souffre des chocs consécutifs, des dysfonctionnements structurels et des politiques de relance et de communication inappropriées.