Ce projet évalué à 1.000 milliards de dollars implique environ 65 pays comptant 4,5 milliards d'habitants, soit 70% de la population mondiale, et représentant environ 55% du PIB mondial et 75% des réserves énergétiques de la planète. Les pays d'Afrique du Nord sont concernés à plusieurs titres par le méga-projet des nouvelles routes de la soie, initié en 2013 par le président chinois, Xi Jinping, qui ambitionne de hisser la Chine au premier rang mondial à l'horizon 2049, a souligné l'expert Mehdi Taje, directeur du département de politique publique à l'Institut tunisien des études stratégiques (Ites) lors de son intervention à l'occasion du premier séminaire international organisé à Gammarth les 10 et 11 avril, par le Programme régional sud Méditerranée de la Konrad-Adenauer-Stiftung, en collaboration avec Global Prospect Intelligence, sous l'intitulé «Le projet des nouvelles routes de la soie : le retour de la Chine en Méditerranée». Regroupant des experts d'horizons divers, le séminaire vise à contribuer à lever le voile sur ce projet et apporter les réponses et les propositions à certaines interrogations. Constitue-t-il l'amorce d'un nouveau modèle de développement économique alternatif? Quelles sont les visions des pays d'Afrique du Nord? Comment est-il perçu par le premier partenaire économique des pays du Maghreb, l'UE ? Et, surtout, comment positionner au mieux la Tunisie pays au cœur de la Méditerranée, afin qu'elle tire le meilleur parti de ce projet? Quels impacts sur les pays d'Afrique du Nord ? Dans son étude présentée à cette occasion pour lancer le débat autour de ce projet, Mehdi Taje explique que le concept se réfère aux anciennes Routes de la soie, vieilles de plus de deux millénaires, ayant marqué l'histoire de l'humanité en tant que voie de fécondation mutuelle des civilisations euro-asiatiques et africaines, voie de riches échanges commerciaux et de transmission de connaissances et d'avancées technologiques. Ce projet évalué à 1.000 milliards de dollars implique environ 65 pays comptant 4,5 milliards d'habitants, soit 70% de la population mondiale, et représentant environ 55% du PIB mondial et 75% des réserves énergétiques de la planète. Les pays d'Afrique du Nord sont concernés à plusieurs titres par ce projet qui représente une opportunité historique ouverte à tous les pays sans exception. Leur appartenance à l'Afrique les positionne non seulement en tant que destinataires mais également en tant que candidats à intégrer les chaînes de valeur à créer. Leur situation géographique sur les rivages sud de la Méditerranée les met directement au contact de la route maritime de la soie vers l'Europe. Les postures des pays d'Afrique du Nord à l'égard de ce méga-projet sont marquées par une forte différenciation, allant de l'adhésion pour le Maroc et l'Egypte, à une certaine frilosité de l'Algérie, en passant par un relatif attentisme de la Tunisie, souligne l'expert Mehdi Taje. Quelle posture pour la Tunisie ? Comment positionner au mieux la Tunisie, pays au cœur de la Méditerranée afin qu'elle tire le meilleur parti de ce projet ? L'enjeu est de taille et l'expert Mehdi Taje explique dans son étude de recherche que notre pays devra s'atteler à renforcer ses relations avec l'Asie et plus précisément avec Pékin. La Tunisie n'a pas bénéficié d'un statut particulier à la hauteur de l'enjeu historique de la part de l'UE. A ce stade, le partenariat avec l'UE n'est pas en mesure d'offrir l'élan décisif apte à permettre à la Tunisie d'assurer sa sécurité, de relancer durablement son économie et d'assurer sur le long terme son ancrage démocratique. L'expert ajoute que pour notre pays, les performances insuffisantes en matière de connectivité, de logistique et d'infrastructure constituent de sérieux handicaps pour la montée en gamme dans les chaînes de valeur mondiales et par conséquent pour une adhésion à ce projet, ce qui nécessite l'identification des pistes en mesure de donner un nouvel élan aux relations tuniso-chinoises et de permettre l'insertion de la Tunisie au sein de ce projet dans les meilleures conditions. A cet effet, Mehdi Taje propose des pistes de réflexion dont il conviendra d'examiner l'opportunité et la faisabilité. Parmi ces réflexions, la constitution d'une commission interministérielle en charge d'évaluer les avantages et les inconvénients de l'insertion de la Tunisie au sein de ce projet, l'établissement en Tunisie d'une plateforme de production et d'innovation à forte valeur ajoutée, l'examen de l'opportunité de se positionner en porte d'entrée de la Chine vers la Libye et des modalités d'implication de la Chine dans la réalisation des grands projets et infrastructures routières, ferroviaires et maritimes visant à désenclaver les régions intérieures et à accroître l'indice de connectivité de la Tunisie, tout en relançant l'économie du pays. Sabri Bachtobji, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, a mis en valeur la coopération tuniso-chinoise qui ne date pas d'aujourd'hui et qui s'est accentuée ces dernières années sur fond de concrétisation de plusieurs projets dans le cadre d'une solide relation bilatérale liant les deux pays. Il a confirmé l'intérêt que porte notre pays pour ce projet et les concertations avancées avec la Chine en vue d'adhérer à ce projet d'ici quelques mois en raison de son importance et son impact positif sur l'économie de la Tunisie en matière d'investissement et de création d'emplois pour les jeunes.