L'autisme touche un enfant sur 160 dans le monde et trois enfants sur mille en Tunisie. Le diagnostic de ce handicap est d'autant plus difficile à établir que la plupart des parents en ignorent le tableau clinique. L'annonce du handicap de leur enfant est vécu comme un véritable drame par la majorité des couples qui ont du mal à l'accepter. De la souffrance à l'acceptation, le parcours est long et difficile. Frustrés et impuissants, les parents sont confrontés au monde hostile de l'autisme dans lequel est encroûté l'enfant qui, malgré lui, se replie sur lui-même, dressant un mur invisible avec l'extérieur. Les échanges affectifs et la communication sont réduits au strict minimum, l'enfant interagissant peu avec ses parents. Le regard souvent absent, il répète les mêmes gestes et les mêmes mouvements sans être capable de leur transmettre aucun ressenti émotionnel ni de décoder leurs intentions et leurs émotions. En Tunisie, les parents sont d'autant plus désemparés que la prise en charge dans les établissements éducatifs est inadaptée aux besoins des enfants autistes. Dr Wahid Koubaâ, pédopsychiatre, a bien voulu nous éclairer sur ce trouble du comportement. Entretien Quelles sont les causes et les manifestations de l'autisme chez l'enfant? L'incidence de l'autisme est en pleine croissance au point que cela devient aujourd'hui inquiétant . Elle était, il y a 20 ans, de un enfant sur 2.500 au Tennessee aux USA, elle est actuellement de un enfant sur 68. En Tunisie, on compte un enfant autiste sur 112 et un sur 39 en Corée du Sud. Il y a certes l'affinement du diagnostic et la vigilance des parents mais il y a certainement d'autres facteurs qui expliquent cette explosion et l'autisme qui est devenu un fléau majeur et un problème mondial de santé. Les causes ne sont pas encore connues. On a incriminé une allergie alimentaire, un excès de chlore dans le sang, la vaccination contre la rougeole, une origine immunologique, la télévision... mais rien n'est sûr. Je pense que c'est surtout le changement du mode de vie moderne avec des enfants qui étaient auparavant ensemble dès les premiers pas et qui se trouvent désormais seuls ou devant un écran ou une tablette. Si la majorité des enfants s'en sortent ainsi sans dégâts une petite partie d'entre eux développe des éléments autistiques. L'isolement ou le manque de stimulation humaine exprimerait une vulnérabilité génétique qui n'aurait peut-être jamais vu le jour s'ils avaient été hyperstimulés par leurs pairs et les autres enfants. En général et dans le tableau le plus fréquent , l'enfant qui paraissait normal jusqu'à 9/12 mois et qui commençait à dire quelques mots change progressivement de comportement, ne regarde que quelquefois quand on l'appelle, son regard devient moins vif et mois interactif et plus vide ou transparent ou regard en coins, il ne supporte plus les changements dans l'environnement, le contact avec les enfants et les gens qu'il ne connaît pas, les bruits intenses le terrorisent et ses pleurs deviennent fréquents. Il a tendance donc au retrait autistique,il se désintéresse de ce qui l'entoure et il est souvent isolé dans un coin même au jardin d'enfants. Le langage régresse ou ne se développe plus ou progresse très lentement et il semble coupé du monde. On reconnaît un enfant autiste à ses jeux qui sont stéréotypés et répétitifs, tel que ranger, tourner des objets ou les roues,jeux de ficelles... Quand apparaissent les premiers signes ? Le diagnostic est en général fait entre 12 et 36 mois mais pour une mère attentive qui a élevé des enfants auparavant, elle peut remarquer des anomalies du comportement dès les premiers mois. En Tunisie et grâce aux médias, à la vigilance des parents et des pédiatres et au développement de la pédopsychiatrie, le diagnostic se fait de plus en plus tôt et les résultats sont meilleurs. Trouvez-vous que la prise en charge sanitaire et éducative répond aux besoins des enfants autistes en Tunisie? En Tunisie, il y a quelques associations qui prennent en charge ces enfants mais il faut des techniciens habitués à ce genre de pathologie et il faut mettre les cas légers dans une crèche ou un jardin d'enfants où on ne laisse pas les enfants regarder trop longtemps la télévision. Le diagnostic et la prise en charge seront dictés par des médecins spécialisés dans ce genre de pathologie