La privatisation est l'une des stratégies de sortie de l'Etat du secteur public bancaire. Elle devrait se déclencher à un stade avancé de restructuration des banques publiques. Une opération réussie pourrait se traduire par une amélioration des fondamentaux de la banque. L'entrée d'un partenaire stratégique minoritaire ou d'un partenaire technique pourraient aussi améliorer les indicateurs de performance. La situation de la BNA et de la STB est un peu particulière compte tenu de la spécificité de leurs actifs : l'agriculture pour la BNA et le tourisme pour la STB, et les entreprises publiques pour les deux. Si la BH se situe à un stade avancé dans le processus de restructuration, et du coup la plus préparée pour s'engager dans une aventure de privatisation, la STB et la BNA ne sont pas tout à fait prêtes pour une telle opération. Ces trois banques sont engagées dans des contrats de performance ambitieux. Les premiers signes sont satisfaisants. Il faudrait plus de temps pour consolider cette dynamique. Car une privatisation immédiate risque de déstabiliser tout le processus d'assainissement. La privatisation est une opération classique dans une économie moderne, mais pour le cas tunisien la situation est autre. La privatisation devient un exercice de haute voltige surtout si les préalables ne sont pas réunis. Sur le plan économique, la privatisation pourrait contribuer à l'amélioration des indicateurs de la banque. Plusieurs exemples le prouvent, au Maroc, en Jordanie, en Turquie... Elle pourrait faciliter les opérations de fusion dans le secteur. Elle permet d'offrir plus de souplesse pour les banques pour la gestion des créances accrochées. Sur le plan social, l'opération pourrait alimenter la fièvre revendicative surtout si elle est mal ficelée et mal comprise par les salariés. Autrement dit, si la concertation n'a pas été au rendez-vous, toutes les portes de la contestation peuvent être défoncées. La prudence est de mise pour ce type d'opération. L'histoire nous enseigne qu'une opération de privatisation bâclée pourrait facilement fermer la porte des réformes dans le secteur pour des décennies. Nous avons besoins d'une réforme réussie dans le secteur bancaire pour qu'elle soit génératrice d'effet d'annonce positif pour le dossier des entreprises publiques. Pour ce qui est des préalables pour réussir la privatisation des banques publiques : Primo, une dynamique de restructuration débouchant, sur le plan financier, sur une amélioration des résultats qui ne pourrait que valoriser les actifs de la banque. Et qui pourrait aussi déboucher sur un programme de recrutement de jeunes cadres. Secundo, il faut engager en parallèle une dynamique de restructuration dans toutes les entités publiques (entreprises, offices, caisses sociales) pour que leurs déséquilibres financiers n'alimentent pas davantage de fragilité bancaire. Une condition primordiale pour la BNA et la STB qui sont déjà très engagées sur ce créneau. Tertio, une politique de communication efficace pour montrer le bien-fondé de l'opération, et surtout pour expliquer la stratégie de gestion des collatéraux. Sinon l'opération serait interprétée comme une volonté de « brader les bijoux de la famille » au profit du privé, surtout un an et demi après l'opération de recapitalisation et l'importance des fonds publics engagés pour financer le processus de restructuration (full audit, système d'information, programme de formation, nouveau système de rémunération...).