« Des jours incertains attendent la Tunisie. Oui, nous sommes désenchantés, et principalement les femmes tunisiennes, démocrates, modérées, instruites. Dans tout le Maghreb, dans tous les pays arabes, nous sommes musulmans, par essence, par naissance. Mais en Tunisie plus qu'ailleurs, chacun était libre de vivre sa foi, sa conviction religieuse comme il l'entendait. Aujourd'hui, le doute s'installe », a indiqué Fériel Berraies Guigny, ancienne diplomate dans une interview accordée au magazine en ligne « aufeminin.com ». Cette déclaration fait suite à la victoire du parti islamiste Ennahdha aux élections de l'Assemblée constituante en remportant plus de 40% des votes et devenir la première force du pays. Au sujet de l'alliance d'Ennahdha avec les partis démocratiques, Fériel Berraies s'est interrogée sur le droit auquel ces partis de s'allier avec ceux qui défendent des valeurs tellement éloignées des aspirations des femmes : « Nos votes ne leur ont pas donné mandat pour cela. Il n'est sans doute pas à craindre que notre pays sombre dans une théocratie à l'iranienne. Mais, nous ne sommes pas dupes, nous savons qu'ils tiennent un discours politiquement correct, histoire de construire ces nouvelles allégeances du Nord. Déjà échaudés par les orientations du CNT libyen, qui, dès le lendemain de la mort de Khadafi, s'empressait de faire référence à la Charia pour l'établissement de la future constitution, l'Europe ferme les yeux et se satisfait d'un résultat qui n'est pas un signe de progrès, notamment pour les femmes. Sur la victoire d'Ennahdha, elle a fait savoir que « la pilule est très dure à avaler pour nous les musulmans modérés, mais nous acceptons le résultat des urnes. Le peuple tunisien, en tout cas une catégorie du peuple tunisien, a fait son choix et on l'accepte, on ne le comprend pas, mais on l'accepte. Le retour de manivelle est là et le populisme et le pragmatisme aidant, il sera difficile de récupérer cette frange de la population. En réprimant l'intégrisme dans le pays nous l'avons quelque part aidé à mieux se construire pour le futur. Cette mouvance a bénéficié des financements provenant de l'Arabie Saoudite et de l'Iran, ils se sont structurés avec le temps ». Fériel a indiqué plus loin qu'un un véritable Tsunami politique et historique attende notre région. « Ce qui nous attriste c'est que pour la Lybie les femmes ont été récompensées de leur bravoure par l'adoption de la Charia et de la polygamie. Quant à Ennahda, elle s'est imposée parce qu'elle s'est adressée à une population en désespérance sociale, parce que le « petit peuple » pouvait s'identifier à ses représentants qui avaient eux aussi été opprimés et qu'en prime, elle a bénéficié de certaines largesses (Arabie Saoudite, Iran). Maintenant, et c'est tout l'exercice de la démocratie, nous comptons sur l'opposition pour limiter les dommages collatéraux et pour faire contrepoids ». Investir en Tunisie