À l'approche de la fin de l'année, l'intérêt pour la nouvelle loi des finances et le budget de l'Etat pour l'année prochaine grandit. Les réunions se multiplient au niveau du ministère des Finances et du gouvernement. Même le chef de l'Etat, fraîchement plébiscité pour un nouveau mandat, qui n'est pourtant pas très porté sur les chiffres, s'est penché sur le dossier économique et a eu une entrevue avec son chef de gouvernement autour de la prochaine loi des finances. Avec le recours au recoupement des déclarations des ministres concernés, des députés, des acteurs économiques et des experts, on arrive à dessiner les grandes orientations de la loi des finances pour l'année 20025. Mieux encore, on connait même quelques mesures qui seront entérinées par cette nouvelle loi. Parmi ces « nouvelles » mesures, il y a l'intention du gouvernement d'annuler une décision prise depuis 2014 interdisant aux citoyens d'avoir une somme d'argent excédant cinq mille dinars sans pouvoir justifier l'origine de cette somme.
Dans le temps, on a soutenu pour expliquer cette mesure, qu'elle s'insère dans le cadre de la lutte contre la corruption, l'évasion fiscale et l'économie parallèle. Elle devait encourager le contrôle des circuits de distribution et le développement d'un système monétaire plus moderne. Dix ans après, on nous explique ce rétropédalage par le fait que cette mesure a montré ses limites et qu'elle a augmenté les difficultés rencontrées par les petits commerçants et les petits agriculteurs. Au moment où le pouvoir fait de la lutte contre le blanchiment d'argent, la corruption et la spéculation son cheval de bataille et brandit le slogan « pas de retour en arrière », cette mesure vient comme un cheveu dans la soupe. Rappelons que dans les pays occidentaux, présenter un billet de cinquante euros en public est suspect. Cet acte est considéré comme un indice de tentative d'arnaque ou que le porteur de ce billet est trempé dans des activités illicites notamment la prostitution ou le trafic de drogue. Il faut dire que depuis longtemps, toutes les transactions, même les plus anodines, sont faites par carte bancaire, ou plus simplement par téléphone.
Toujours dans le cadre du non retour en arrière, le parti salafiste Ettahrir a organisé cinq jours seulement après l'élection présidentielle une marche et une manifestation sur les marches du théâtre de la ville de Tunis. À sa manière, il a salué cette élection, en appelant au retour du système de califat et en qualifiant d'hérésie et d'apostasie la République et du système démocratique. On croyait que ce parti avait été interdit depuis longtemps. Qu'on nous explique alors pourquoi il manifeste tranquillement. Nous ne sommes pas contre les libertés publiques mais nous sommes pour l'application stricte de la loi sur tous, sans exception. Avant Hizb Ettahrir, le lendemain de l'élection présidentielle, des jeunes ont été molestés pour avoir manifesté au même endroit, pour les mêmes motifs. En plus, pour être clair, honnête et dire la vérité sans fards, nous croyons que la démocratie n'est pas un tigre en papier et qu'elle doit se défendre et combattre ses ennemis qui visent son anéantissement. Hizb Ettahrir fait partie des ennemis de la démocratie dans notre pays, tout comme les partis fascistes et nazis en Europe qui y sont interdits et poursuivis pour défendre la démocratie européenne.
Annoncer qu'il n'y aura pas de retour en arrière est incompatible avec l'existence dans le paysage d'une formation primitive et archaïque comme Hizb Ettahrir. En effet, le modèle qu'il nous propose est un modèle hors d'âge et anachronique. Sur les quatre premiers califes supposés être les modèles à suivre, trois ont été assassinés pour des raisons simplement politiques et de pouvoir. Les anciens « salaf » qu'ils veulent suivre les traces sont, sauf quelques rares exceptions, des gueux, ignorants et sanguinaires. Non, merci, sans façons.