L'étude réalisée par l'Institut Tunisien des Etudes Stratégiques (ITES) met en lumière le taux alarmant de l'émigration parmi les ingénieurs tunisiens, soulignant son impact sévère sur le développement économique et social du pays ainsi que sur sa capacité à réussir ses transitions écologiques, numériques et environnementales. L'émigration des ingénieurs de la Tunisie représente une menace significative pour la croissance de la nation, avec environ 3 000 ingénieurs quittant le pays chaque année. Le pic a été atteint en 2022 avec 6 500 ingénieurs, selon l'Ordre des Ingénieurs Tunisiens. Cette tendance s'inscrit dans un défi plus large de rétention des talents nationaux et d'attraction des compétences internationales. Au cours des deux dernières décennies, la Tunisie a vu une augmentation notable de l'émigration des ingénieurs. Des accélérations clés ont eu lieu dans les années 2000, après la révolution de 2011 et suite à la pandémie de la COVID-19, avec un pic en 2022. Les principales destinations incluent la France, le Canada, l'Allemagne, le Qatar et la Belgique, avec de nouvelles opportunités dans les pays du Golfe, les Etats-Unis et le Canada. Plusieurs facteurs motivent cette émigration : des conditions de travail inadéquates, des salaires bas et une détérioration du cadre de vie. Les ingénieurs sont attirés par des salaires plus élevés et de meilleures perspectives professionnelles à l'étranger, le marché local offrant des opportunités d'emploi limitées. L'Organisation Internationale du Travail (OIT) souligne la précarité de l'emploi et la faiblesse des salaires pour les ingénieurs en Tunisie, révélant une inadéquation entre le nombre d'ingénieurs formés et les opportunités d'emploi disponibles. L'émigration massive des ingénieurs met en danger la stabilité économique, l'innovation et la compétitivité internationale de la Tunisie. La perte affecte divers secteurs, y compris l'énergie, l'environnement et la fabrication, créant une dépendance sur les importations technologiques et entravant le développement local. Cette fuite des cerveaux exacerbe les disparités avec les nations industrialisées, érodant la base de talents nécessaire pour l'enseignement et la recherche tout en réduisant les investissements directs étrangers. L'étude propose dix actions prioritaires pour retenir les ingénieurs et prévenir la fuite des compétences. Il est crucial d'améliorer les conditions de travail et les rémunérations, d'établir des programmes de formation continue et de croissance professionnelle et d'adapter les programmes académiques aux besoins du marché. La stabilité politique et économique doit être renforcée par des réformes de lutte contre la corruption. Il est essentiel de développer une infrastructure à haut débit et d'investir dans la R&D, de simplifier les processus administratifs pour les startups et de créer des fonds de capital-risque. De plus, l'amélioration des pratiques de gestion, la modernisation des laboratoires et des centres de recherche ainsi que le développement de partenariats internationaux sont nécessaires pour créer un environnement attractif pour les ingénieurs expatriés.