Le professeur universitaire en sciences économiques, Ridha Chkoundali, est revenu, lundi 11 mars 2024, sur le dernier communiqué de Fitch Ratings, écartant certaines mauvaises interprétations de ce document. L'universitaire a indiqué, au micro d'Elyes Gharbi lors de son passage à l'émission Midi Show sur Mosaïque Fm, que le coût de l'endettement a augmenté ce qui a poussé les Tunisiens (personnes physiques ou morales) à temporiser leurs investissements. M. Chkoundali a relevé qu'il fallait ajouter à cela un mauvais climat des investissements, une baisse de l'importation de la matière première et des produits semi-finis et le gouvernement qui favorise l'utilisation des devises disponibles pour le remboursement des dettes extérieures du pays. Ces éléments, selon l'expert, ont fait qu'il y avait une disponibilité de liquidité auprès des banques permettant à l'Etat d'emprunter plus. « Mais, cela aurait de graves risques notamment la hausse du coût de l'emprunt avec la hausse de la demande et une hausse de l'inflation », a-t-il soutenu.
M. Chkoundali a souligné, dans ce cadre, que Fitch Ratings n'a pas dit que le gouvernement tunisien pouvait recourir librement et sans conséquences à l'emprunt intérieur. Et de rappeler que l'approche suivie en 2023 par le gouvernement et selon laquelle il a privilégié le paiement des dettes de d'Etat aux dépens de tout le reste, a eu de lourdes conséquences : une croissance de 0,4%, une baisse des recettes fiscales de plus de deux milliards de dinars. Cela a augmenté les besoins de recourir à l'endettement intérieur ou extérieur. L'expérience de 2023 a montré, toujours selon ses dires, que ce processus a engendré de grandes pressions sur les équilibres budgétaires de l'Etat. Pour lui, il n'y a pas d'autre solutions que d'encourager l'initiative privée et l'investissement pour la création de richesse et de croissance.
L'économiste a noté les difficultés que rencontre le gouvernement pour mobiliser des emprunts extérieurs, ce qui se traduira selon lui, par des pressions sur les liquidités intérieures via une extension du financement direct auprès de la Banque centrale de Tunisie ou en recourant encore plus au financement auprès des banques tunisiennes. Conscient qu'il est en train de dresser un tableau sombre, Ridha Chkoundali a rappelé que le gouvernement suit une approche comptable où on délaisse les dépenses d'investissement, et qui ne permet pas de parvenir aux objectifs qu'il s'est fixés. Une approche qui augmente l'effet boule de neige pour l'endettement extérieur.
Rappelons que Fitch Ratings a estimé que la capacité du secteur bancaire à répondre aux besoins de financement intérieur de l'Etat en 2024 s'explique « par une croissance saine des dépôts (plus de 6 %) et une faible demande de crédit (…) ce qui suggère des conditions de liquidité adéquates ». L'agence prévoit « que les besoins de financement budgétaire atteindront ou dépasseront 16% du PIB par an en 2024-2025, soit l'un des pourcentages les plus élevés parmi les pays dont la note souveraine est « CCC+ » ou inférieure » et que « le gouvernement pourrait ne pas être en mesure de lever plus de 2,5 milliards USD auprès de sources de financement extérieures en 2024, ce qui laisserait un écart d'au moins 2,5 milliards USD par rapport au financement extérieur prévu ».