Comme tout le monde le sait maintenant, c'est donc une association (ou plusieurs peut-être) qui a invité le prédicateur'' Wajdi Ghoneim à venir donner une série de prêches dans les mosquées de diverses villes du pays. En amont, le message sous-entendu a, sur nous tous ou presque-, l'effet d'une paire de gifles: étant donné que les Tunisiens sont très peu éclairés sur leur religion; attendu surtout qu'il n'y a pas dans notre pays un seul Tunisien qui ait un minimum de connaissances en théologie musulmane, il était donc nécessaire de faire appel à un Egyptien pour nous donner des leçons dans ce sens. Qu'une association invite un Prix Nobel de physique ou de médecine à donner une conférence sur la portée et l'impact de son invention est une très bonne chose, mais qu'on invite un n'importe qui à venir nous donner des leçons sur l'islam (à nous, pays musulman depuis 642), est une insulte pour tout un peuple. Et c'est impardonnable. Le nommé Ghoneim était donc venu sensibiliser les Tunisiens sur les bienfaits de l'excision. On ne peut que frémir à l'idée pour peu que son prêche ait fait mouche auprès de la nation entière d'une telle catastrophe: faire de la future femme tunisienne un objet (même pas un animal) juste nécessaire à produire des enfants pour perpétuer la race humaine, en lui déniant le droit d'avoir des sens comme tout être humain. Mais on n'en est pas là, fort heureusement. D'abord à Mahdia où il a été hué, ensuite par le ministère de la Santé publique qui a fait paraître un communiqué officiel sur le danger de l'excision, l'Egyptien en question a donc essuyé, au moins, deux camouflets cuisants. Son passage en Tunisie n'aura finalement été qu'une plaisanterie de très mauvais goût. Mais voilà que les journaux de cette semaine nous apprennent qu'un deuxième prédicateur'' s'apprête à venir nous donner d'autres leçons sur l'islam. Celui-ci, apparemment du nom de Laârifi (sur la photo, il semble n'avoir même pas 27 ans), viendra début mars nous dire que le père n'a point le droit d'embrasser sa fille, ni de lui tenir compagnie en l'absence de la mère. Pourquoi?... Parce que, lors de ce tête-à-tête entre père et fille, Satan pourrait faire des siennes. C'est la meilleure celle-là! On ne s'étonnerait donc pas si un troisième prédicateur'' venait interdire la moindre rencontre entre oncles et nièces. Qui sait? Arrivés maintenant à ce stade-ci, nous commençons à deviner un peu le plan mis petit à petit en place et dont voici les prochaines étapes: interdiction de la mixité dans les écoles, les lycées et les facultés; retour définitif de la fille et de la femme à la maison; intensification des cours de théologie musulmane au détriment des sciences; interdiction de toute forme de culture (tout est péché: le cinéma, le théâtre, la musique, la littérature, les arts plastiques, la photographie, etc.); retour en bonne et due forme de la polygamie et autres unions pour la jouissance (sans même un contrat de mariage). Or, l'Egypte du cher Ghoneim continue, elle, à encourager les expressions culturelles: le pays du Nil vit encore et toujours de cinéma, le théâtre multiplie les productions, la chanson fabrique tous les jours de nouvelles vedettes, et on ne compte plus le nombre de chaînes de télévision égyptiennes. Seule la Tunisie, devenue un laboratoire où pseudo-prédicateurs viennent tester l'impact de leurs prêches tordus, doit mourir sur les plans éducationnel et culturel. On n'en est pas encore là. Mais une chose est sûre: le danger frappe sérieusement à la porte Tunisie.