Tweet Share TUNIS (TAP) - Le dossier de la justice transitionnelle s'est posé en Tunisie avec acuité depuis la révolution du 14 janvier. Plusieurs formules ont été avancées, à ce propos, par les décideurs politiques et les composantes de la société civile. Dans ce contexte, le ministère des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle a organisé une série de rencontres auxquelles avaient été conviées de nombreuses personnalités nationales et représentants de la société civile (partis, associations et organisations). L'objectif de ces rencontres est de mieux faire connaître les différentes opinions sur la question en débat afin de parvenir à mettre en place une approche globale et consensuelle sur la loi relative à la justice transitionnelle en Tunisie et partant, préparer au mieux la conférence nationale sur la justice transitionnelle prévue le 14 avril courant. Dans une déclaration à l'agence TAP, plusieurs personnalités actives dans la société civile ont été unanimes à souligner la nécessité de mettre en place une justice transitionnelle en Tunisie capable de divulguer les atteintes graves aux droits de l'homme et de favoriser la réconciliation nationale sur la base de la reddition de comptes. Les définitions doctrinales avancées par les experts en la matière s'accordent à établir un lien étroit entre la justice transitionnelle et le caractère transitoire d'une conjoncture politique donnée. Trois hypothèses ont été avancées à ce sujet, en l'occurrence la transition d'un conflit interne armé vers un état de paix civile, le passage d'un conflit politique interne accompagné de violence armée vers une paix interne ou encore la transition d'un régime de dictature vers une situation d'ouverture et de réconciliation politique. Le président de l'Institut Arabe des Droits de l'Homme (IADH), Abdelbasset Ben Hassen a estimé que la justice transitionnelle est un instrument qui repose sur une série de mécanismes juridictionnels et quasi-juridictionnels ayant pour objectif de découvrir la vérité, de poursuivre les auteurs des violations aux droits de l'Homme et de réparer les dommages causés aux victimes. Dans une déclaration à l'agence "TAP", M. Ben Hassen a affirmé que la justice transitionnelle est "un processus qui nécessite une vision approfondie des droits de l'Homme, loin des considérations politiciennes et des intérêts partisans étriqués". Selon M. Ben Hassen, la mise en oeuvre de ce mécanisme exige des méthodes de travail spécifiques et une mobilisation des ressources humaines dotées de compétences pluridisciplinaires. L'étude de la justice transitionnelle constitue un moyen efficace permettant de mieux cerner les spécificités des régimes d'autocratie afin d'en décortiquer les origines, d'engager des réformes législatives et de mettre en place des institutions garantes du respect des droits de l'homme. Le processus de justice transitionnelle, a-t-il relevé, permet d'instaurer des politiques socio-économiques et culturelles qui font de la dignité humaine le point focal d'une nouvelle culture basée sur la promotion des droits de l'homme. Evoquant l'expérience tunisienne, M. Ben Hassen a affirmé que le débat en Tunisie s'est cantonné jusqu'à maintenant aux simples controverses doctrinales, insistant sur la nécessité de placer la justice transitionnelle dans la réalité qui est la sienne, à l'abri des tiraillements politiques ou de la mainmise d'une quelconque partie. Il a affirmé que les concertations sur le sujet de la justice transitionnelle demeurent, à l'état actuel des choses, l'apanage des politiciens, critiquant à ce propos la mise à l'écart des experts et des spécialistes en la matière. L'étape à venir, a-t-il constaté, commande impérativement de placer le processus de la justice transitionnelle dans l'orbite des droits de l'homme, appelant à la nécessité de créer une instance indépendante de justice transitionnelle et d'organiser un débat national, franc et constructif, qui dépasse le cadre des couloirs des colloques et des conférences. De son côté, Me Imen Trigui, présidente de l'organisation "liberté et équité" a estimé que la justice transitionnelle en Tunisie ne devrait pas concerner seulement les victimes des crimes de torture mais aussi ceux du régime de Bourguiba et de Ben Ali. Mme Trigui s'est dite favorable à l'élargissement du mécanisme de la justice transitionnelle à tous ceux qui n'ont pas bénéficié de l'amnistie générale et de la réparation matérielle et morale. Me Trigui a enfin appelé à la mise sur pied d'une structure indépendante spécialisée, placée en dehors des tiraillements politiques ayant des chambres juridictionnelles regroupant des médecins, des avocats et plusieurs composantes de la société civile concernées par le sujet. Tweet Share Suivant