Par Abdelhamid Trabelsi Au départ, l'Etat avait pensé faciliter le retour au bercail de nos concitoyens qui ont séjourné un certain temps à l'étranger, (au moins 2 ans). Il avait alors été décrété qu'à l'occasion de leur retour définitif, on les dispensait de payer les droits de douanes sur leurs biens personnels, meubles et voitures, qu'ils ramenaient avec eux et qu'ils allaient continuer à utiliser pour leur propre usage. Ainsi on vit apparaître ce qui a été convenu d'appeler: avantages fiscaux accordés dans le cadre du retour définitif (FCR). On a alors vu alors défiler les jeunes diplômés des universités étrangères rentrer au volant des plus belles Mercedes et autres BMW, comme s'ils en avaient gagné eux-mêmes le prix. Les gens de ma génération déploraient qu'à notre époque, les plus gâtés d'entre nous, avaient juste droit à une 2 CV. Mais nous avions très vite eu la consolation de comprendre que le salaire qui les attendait ne leur permettrait jamais d'entretenir ce bien facilement acquis, si ce n'est grâce à un complément d'apport de la part de la famille. Malheureusement, très vite le statut du FCR a dérapé. D'abord on a autorisé les conjoints, les ascendants et les descendants à conduire la voiture, au point où la jolie Mercedes ramenée par le jeune diplômé s'avéra destinée à papa. Puis on a autorisé la revente de la voiture après paiement d'une taxe douanière nettement réduite. C'est donc devenu une source légale de profit. À l'ancien étudiant récemment diplômé, personne ne demande comment il a gagné l'argent qui lui a permis de s'acheter la grosse berline toutes options qu'il venait de ramener, mais en plus on lui permettait de la revendre en toute légalité et d'empocher un bénéfice substantiel après avoir bénéficié d'un important abattement sur les droits de douanes. Aussitôt, nos gros bonnets de la contrebande se sont mis à ouvrir des boutiques, avec pignon sur rue, afin de vendre ces voitures ex-FCR, faisant de facto concurrence aux concessionnaires officiels. Mais cela ne leur suffisait pas. Il leur fallait plus de voitures. Alors ils se sont déplacés à l'étranger à la recherche des tunisiens de 2ème et de 3ème génération qui n'avaient plus aucune attache avec le pays et qui n'envisageaient aucunement d'y rentrer. Ils continuaient seulement à renouveler, peut-être par habitude, leur passeport tunisien. Alors on les recrutait, et contre un séjour gratuit, tous frais payés dans un hôtel touristique en Tunisie, on leur faisait signer les documents d'un faux retour définitif qui permettait à nos mafieux de faire rentrer au pays la belle voiture FCR ou le container de meubles, en franchise totale de tous droits et taxes. Nous sommes en droit de nous demander si un tunisien qui travaille quelques années à l'étranger ne gagne pas suffisamment d'argent par rapport à son concitoyen resté au pays, pour qu'on plus on lui accorde le droit de s'enrichir au détriment de la communauté nationale ? Est-ce que les tunisiens n'ont pas montré suffisamment d'ingéniosité pour s'enrichir à travers la contrebande devenue ici institutionnelle pour qu'on crée de nouvelles failles ? POURSUIVONS: Nous croisons tous les étés sur nos routes et autoroutes, des voitures immatriculées à l'étranger surchargées de ce que nous pouvons à peine imaginer: les valises, le réfrigérateur, les bicyclettes, les pneus, les tapis et tout ce qui peut ou ne peut pas se transporter. Pourquoi? Pour faciliter l'attrait de nos citoyens de l'étranger pour la mère patrie, on leur avait accordé une grande franchise de douanes pour les biens qu'ils peuvent ramener à l'occasion de leurs vacances dans le pays. Bien entendu, toutes ces marchandises ne sont pas destinées à un usage personnel ni à être distribués en cadeaux. Ce sont des marchandises destinées presque exclusivement à la revente. Alors cessons de demander d'où viennent les marchandises de contrebande! Ensuite nous devons savoir que trop de tunisiens vivent à l'étranger d'activités marginales : drogue, prostitution, travail au noir, activités douteuses et toutes sortes de vols. En fin d'année, ces gens disposent d'un pactole qu'ils ne savent pas envoyer par les voies légales. Le financement en devises des réseaux des barons de la contrebande, ainsi que la voiture qu'ils sont autorisés à ramener au pays, plus toutes les marchandises qu'ils sont légalement aptes à ramener, ne sont-ils pas des moyens de blanchiment d'argent ? Il n'y a aucune raison qu'un tunisien qui gagne à l'étranger 5, 6 ou même 10 fois plus que son concitoyen resté au pays bénéficie d'autant de ressources d'enrichissement. Cette personne a bénéficié d'un enseignement gratuit dans le but de servir son pays. Que lui rend-il ? Avide d'argent, il fait bénéficier les étrangers de son savoir. Je ne voudrais pas les condamner, sachant comme il est difficile pour lui de renoncer à tout ce que lui offre l'immigration, mais je ne partage pas le fait que nous lui donnons encore plus de moyens de s'enrichir au détriment du Trésor Public. IL FAUT QUE CELA CESSE ! Les personnes qui ont résidé à l'étranger pourraient ramener voiture et meubles à l'occasion d'un retour définitif s'ils justifient en avoir gagné légalement le prix. Mais cela doit rester exclusivement à usage personnel. La voiture ne pourra plus être conduite que par son propriétaire ou par son conjoint. Elle ne pourra plus être vendue avant un délai d'au moins 4 ans. De plus, les droits de douanes devraient être exigés sur la valeur résiduelle après de larges abattements. Enfin, la Douane devrait pouvoir exercer un droit de contrôle, même plusieurs mois après le retour définitif, pour s'assurer que les meubles sont bien placés au domicile de la personne qui les a importés. Nous devons moraliser la vie publique en supprimant les usages, devenus avérés, favorisant le marché parallèle et le blanchiment d'argent qui ne dit pas son nom.
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