Le projet de loi des finances pour 2018, tel que concocté par le gouvernement, ne cesse de délier les langues et de susciter des réactions de toutes parts. Parmi les secteurs qui se verront lourdement pénalisés, si jamais la loi de finance 2018 passait telle qu'elle, il y a le secteur des activités numériques, toutes spécialités confondues. TunisieNumérique s'est entretenue avec Mr Kais Sallami, président de la fédération nationale des TIC à l'UTICA, qui a tiré la sonnette d'alarme, concernant le secteur du numérique, qui va être profondément lésé et pénalisé par les nouvelles mesures proposées dans le cadre de la loi de finances 2018. Kais Sallami a commencé par rappeler que le secteur du numérique est très important et représente un secteur clé pour le développement et l'économie en Tunisie. Ensuite, il a déploré la politique du « double discours » tenue par l'Etat envers ce secteur. Il a précisé qu'il y a, d'un côté, un discours oral qui prétend tout faire pour encourager et promouvoir ce secteur, mais que d'un autre côté, et sur le plan actions et faits, il y avait de une lenteur dans la mise en marche des projets du secteur du numérique, de même qu'une pénalisation du secteur sous différentes manières, dont la dernière, celle de la surtaxation prévue dans la loi de finances 2018. Il a rappelé que cette surtaxation sauvage et subite a commencé depuis l'année dernière, quand, du jour au lendemain, l'Etat décida d'une taxe de 20% sur certains produits utilisés par les opérateurs de téléphonie mobile. Mais après les protestations des professionnels qui ont expliqué qu'ils n'avaient pas prévu cela dans leurs comptes et leurs prix pour l'année, cette taxe a été suspendue. Mais quelle n'a été notre surprise de la retrouver sur la table, à nouveau cette année. Or l'Etat semble ne pas saisir l'importance du secteur numérique qui constitue la clef du développement de tous les autres secteurs, comme la santé, l'industrie, le commerce... Et une surtaxation de l'ordre de 20% sera, obligatoirement, impactée par les entreprises sur leurs coûts, ce qui va, finalement toucher de plein fouet, le consommateur. Sans oublier que les difficultés des entreprises se traduiront par une libération de personnel, donc, une aggravation du chômage, et la fermeture de certaines entreprises. Or, il ne faudra plus prendre les équipements du numérique pour des équipements de consommation. Ce sont, plutôt, des équipements d'investissement et d'infrastructures, a-t-il martelé. Mr Sallami a, par ailleurs, abordé un autre point, concernant l'intention de l'Etat de surtaxer d'autres équipements numériques, comme les smartphones et les ordinateurs. Il s'est étonné que l'Etat considère ces équipements comme des produits de luxe, alors qu'ils font désormais des équipements de base et nécessaires à chaque tunisien. Il a averti qu'en surtaxant ces produits d'usage courant, l'Etat va augmenter de façon brusque les prix chez les revendeurs agréés. Du coup, l'Etat va ouvrir grande la voie devant le marché parallèle qui va inonder le pays de produits de contrebande qui seront, eux, exonérés de taxes et d'autres droits, sans oublier l'impact qu'aura cette mesure sur le chômage chez les prestataires de services dans ce domaine, pourtant pourvoyeur d'emplois. Car cette surtaxation surviendrait en pleine période de crise pour ces entreprises qui sont, déjà, lourdement pénalisées par la dévaluation du Dinar. L'absurdité de ce projet de loi, selon notre interlocuteur, est que l'Etat est en train de malmener le secteur formel, et de le pénaliser, et çà depuis quelques années, alors qu'à côté, le secteur informel, qui représente au moins 50% de l'économie, demeure intouché, et prospère sans qu'on ne l'inquiète. C'est exactement le contraire des politiques mondiales qui parlent de formalisation de l'informel, alors que chez nous, apparemment, on prône, l'in-formalisation du formel.