Il fait vraiment de la peine à voir, notre pauvre chef du gouvernement, tout technocrate qu'il est. Ou plutôt, justement, parce qu'il n'est en fin de compte, qu'un simple technocrate. Pourtant, il croyait bien faire, Mehdi Jomâa, boosté qu'il était par les décharges successives des hormones de l'amour de la patrie, déclenchées par autant de vils et lâches coups assénés par les ennemis de son pays. Il croyait bien faire en promettant d'inonder les avenues et les rues de sa Tunisie, par du rouge. Le beau rouge de notre vénéré drapeau national. Il croyait bien faire, car il pensait qu'on allait, réellement, fêter la république ! Pauvre Mehdi Jomâa, qu'est qu'il peut être à côté de la plaque, par moments. Mais à sa décharge, il faut avouer, qu'il ignorait qu'une partie de la classe politique de la Tunisie, et pas n'importe quelle partie, celle-là, justement, qui dirige en ce moment, et qui décide de la politique du pays, ne possède pas le sens de la nation, ni le sentiment d'appartenance à ce petit bout de lopin de terre qu'on appelait jadis Ifriquiya. Non Monsieur le chef du gouvernement ! Non ! Chez nous on ne fête pas notre république ! On ne célèbre, d'ailleurs, aucune fête nationale ! Chez nous, Monsieur Jomâa, les jours de fête, on tue les patriotes. Chez nous, les jours de fête, on tabasse ceux qui ont le culot de vouloir fêter ! Chez nous, Monsieur, on fête plutôt les massacres perpétrés sur les personnes de nos vaillants soldats ! Et chez nous, quand il s'agit d'organiser des manifestations pour dénoncer le terrorisme, on a le culot de crier au terrorisme d'Israël, qui est en train de tuer nos frères à Gaza. Par contre, ces bonhommes qui sont morts au Chaâmbi, ne représentent presque rien pour nous. Quelqu'un n'a-t-il pas dit, que les soldats sont payés pour être tués ? Ou alors, on pourrait, à la limite, fêter autre chose ! Tiens ! Par exemple, on pourrait, au lieu de fêter notre république, ou du moins ce qu'il en reste. Au lieu de vous laisser tenter ce qu'il y a à tenter pour secourir cette république exsangue, et en proie aux terroristes de tous bords, nous on investirait, plutôt, les rues pour dénoncer les attaques subies par Gaza. C'est vrai que ce qui se passe à Gaza est atroce. C'est vrai qu'il faudra, par tous les moyens, aider à stopper cette ignominie ! Mais c'est vrai, aussi, que nous avons notre patrie, à fêter, ou, du moins, à faire semblant. Nous avons notre sentiment d'appartenance à cette nation qui part à la dérive, et que nous devrions essayer de sauver ! Mais non ! Chez nous, le sentiment de la nationalité n'a plus sa place dans les valeurs des politiciens. Nos valeureux politiciens de nos jours, sont bien plus grands que la simple, la toute petite Tunisie. Nos valeureux politiciens voient plus grand ! Il y en a qui ne jurent que par les intérêts d'une sombre confrérie aux allures mafieuses, alors qu'il y en a d'autres, qui pire encore, n'ont aucun sentiment d'appartenance à aucune nation ni civilisation. Ils n'ont d'yeux que pour de drôles de gens qui s'habillent de robes, et qui ne portent pas de chaussures, pour mieux piétiner les dunes de leur désert infecté de pétrole. Alors désolés, Monsieur Jomâa, il va bien falloir remballer vos fanions rouge et blanc qui ne sont plus de mise dans nos contrées. Demain, c'est décidé, on ne va pas fêter, on va pleurer ! On va pleurer les enfants de Gaza.