Le mouvement d'Ennahdha bénéficiait d'un statut assez spécial sur la scène politique: grâce à la solidarité de ses dirigeants – sur le plan médiatique – le mouvement a laissé les analystes croire que sa source idéologique lui épargnait toute forme d'indiscipline partisane. Cela a été la règle chez Ennahdha jusqu'à la tenue, en mai dernier, de son dixième congrès. A la grande surprise des observateurs, des dirigeants phares d'Ennahdha, à l'instar de Samir Dilou ou encore d'Ameur Laârayedh, ne s'étaient pas pointés à ce grand rendez-vous célébré en grandes pompes par le mouvement. Quelques jours après le congrès, un nouveau discours a commencé à se propager au sein d'Ennahdha et a fini, quelques jours plus tard, par exploser au niveau des médias: la réélection de Rached Ghannouchi à la tête du mouvement et le choix d'aller vers le consensus plutôt que vers les élections pour la composition des différents bureaux du mouvement ont déplu à quelques uns. Abdelatif Mekki et Abdelhamid Jelassi sont, depuis cette date, les principaux porte-parole de ceux qui s'y sont opposés. Jelassi a d'ailleurs assuré, lors d'une intervention accordée à Shems FM, qu'il est temps aujourd'hui de se pencher sur la question de la succession de Rached Ghannouchi. Pour Abdelfattah Mourou, il est tout à fait normal qu'une telle question se pose puisque le chef d'Ennahdha « n'est plus le jeune homme de trente ans qu'il était ». Intervenant sur les ondes de la radio Express FM, le président du bloc parlementaire du mouvement, Noureddine Bhiri, a été invité à s'exprimer sur la crise que traverse Ennahdha. Fidèle à lui-même, Bhiri a tout rejeté en bloc en assurant que, contrairement aux autres partis, Ennahdha demeure concentré sur les problèmes qui menacent l'avenir du pays et que ses dirigeants placent leurs conflits partisans et personnels au second plan et ce afin d'être plus efficaces dans leur travail pour l'intérêt du pays. Selon Nourredine Bhiri, et depuis la tenue du dixième congrès, Ennahdha a œuvré afin de s'ouvrir encore plus aux Tunisiens et est devenu un parti national ouvert à toutes les compétences et les tendances. Nourredine Bhiri est, soit dans le déni total, soit dans une stratégie de communication bien stricte dictée par la délicatesse de ce qui se déroule dans la cuisine interne de son mouvement. Les conflits d'Ennahdha sont aujourd'hui exposés au niveau des médias ce qui pourrait amener ses dirigeants à aller vers des interventions médiatiques restreintes et sans aucune réelle information. Toutefois, Ennahdha est chanceux puisque, avec tout ce qui s'y déroule actuellement, Nidaa Tounes lui vole, largement, la vedette en matière de discordes, voire de scandales médiatiques. Entretemps, les deux grands partis politiques tunisiens semblent peiner à avancer et à se structurer correctement, le tout dans un paysage économique et social en perpétuelle dégradation...