Au cours d'un point de presse tenu hier au palais du gouvernement à la Kasbah, MM. Houcine Dimassi, ministre des finances et Sélim Bèsbès, secrétaire d'Etat chargé de la fiscalité, ont présenté les grandes lignes du projet de loi de finances complémentaire pour 2012 devant remplacer après son adoption officielle par le gouvernement et l'Assemblée nationale constituante la loi de finances initiale adoptée par l'Assemblée constituante fin décembre 2011. Le ministre a indiqué que les chiffres relatifs aux dépenses et recettes de l'Etat ainsi qu'aux diverses mesures prises dans le cadre de ce projet de loi de finances complémentaire ne sont pas définitifs et qu'il s'agit encore de propositions qui font l'objet de discussion au niveau du gouvernement et quand le gouvernement approuve le projet, il le présentera à l'Assemblée constituante pour l'examiner et l'adopter et c'est alors qu'il revêtira son aspect officiel. Le projet de loi de finances complémentaire pour 2012 a été élaboré avec la consultation des parties concernées que ce soit au sein des directions administratives chargées de ces questions ou au sein du Conseil national de la fiscalité composé de représentants des divers ministères concernés et des partenaires sociaux comme l'UGTT , l'UTICA et les autres structures professionnelles concernées par la fiscalité, à l'instar du Conseil des experts comptables , la compagnie des comptables et la chambre syndicale des conseillers fiscaux. S'agissant du contenu et pour ce qui intéresse principalement le grand public, le projet de loi de finances complémentaire pour 2012 a préconisé le principe d'une contribution exceptionnelle des citoyens au financement du budget de l'Etat pour 2012 , mais cette contribution sera volontaire et ouverte à tous les citoyens sans exception et elle ne concernera pas uniquement les salariés, et ce en tant que mesure conjoncturelle répondant, comme toutes les autres mesures du projet, aux exigences de la situation que traverse la Tunisie et aussi en concrétisation de la démarche gouvernementale tendant à s'appuyer essentiellement sur les moyens et ressources propres pour financer les dépenses de l'Etat. Il est, en outre, proposé un ajustement à la hausse du droit d'enregistrement qui passera de 15 à 20 dinars, et aussi un ajustement à la hausse de la taxe relative à la recharge des portables et aux factures ramenée à 400 millimes, contre 300 millimes auparavant. Il a été institué une taxe proportionnelle sur les actes de transfert des propriétés, fixée à 1 pour cent de la valeur de la propriété. Le projet de loi de finances complémentaire pour 2012 comporte un ensemble de mesures destinées à favoriser l'accomplissement du devoir fiscal, au profit des contribuables ,notamment ceux qui ont des dettes envers le fisc dans ce domaine. Il a été décidé de les exonérer des amendes de retard à condition de régulariser leur situation avec le fisc en payant une partie du principal des dettes quitte à payer le reste selon un calendrier convenu. Il ne s'agit pas d'amnistie fiscale comme l'ont affirmé les responsables mais d'incitations pour accomplir le devoir fiscal, car il n'est pas question pour l'administration d'abandonner le principal des dettes. Sur un autre plan, et dans le souci d'impulser l'investissement et d'offrir à tous l'opportunité de participer à la production et à la création des richesses, il a été convenu d'adopter la voie de la réconciliation avec certains hommes d'affaires dont l'activité a été gelée et qui sont interdits de voyage à l'étranger, pour diverses raisons, afin qu'ils reprennent leurs activités et leur participation à l'animation de l'économie. Leur nombre est environ 430 personnes. Au même moment, ceux qui ont des épargnes d'argent dissimulées ou sous d'autres formes seront encouragés à les injecter dans le circuit économique sans craindre d'être inquiétés ou poursuivis en ce qui concerne la situation fiscale de ces sommes d'argent épargnées. La fiscalité doit être au service de l'économie. Les entreprises totalement exportatrices vont pouvoir écouler une partie de leur production sur le marché local, à hauteur de 40 ou 50%, au lieu de 30% ,comme c'est le cas actuellement. La promotion de l'emploi a bénéficié d'un intérêt particulier dans le cadre de ce projet de loi de finances complémentaire pour 2012, à travers la proposition de nombreuses mesures tendant à encourager les recrutements des demandeurs d'emploi de toutes les catégories , à titre de premier recrutement. Budget de l'Etat fixé à 25,4 milliards dinars S'agissant des dépenses et recettes de l'Etat, le projet de loi de finances complémentaire pour 2012 a fixé les dépenses de l'Etat ou le budget de l'Etat à 25,4 milliards dinars, avec une augmentation de 5,5 milliards dinars par rapport aux chiffres de la loi de finances initiale. Cette augmentation sera couverte par les revenus provenant de la cession des biens confisqués au profit de l'Etat et qui appartenaient anciennement au président déchu Ben Ali, à son épouse, aux membres de sa famille et ses gendres, ainsi que d'une part des réserves de l'Etat provenant de la vente du tiers du capital de la société Tunisie Télécom, en 2006 et encore déposées à la Banque centrale de Tunisie. Cette part qui sera utilisée s'élève à 900 millions dinars. Cette augmentation sera, en outre, couverte grâce à l'amélioration du rendement de la fiscalité conformément aux mesures signalées et autres mesures du genre, de sorte qu'il ne va pas y avoir de relèvement de l'impôt mais amélioration destinée à favoriser l'accomplissement du devoir fiscal. Comme l'a affirmé le ministre, les recettes fiscales représentent 60% des recettes de l'Etat et forment 85% des ressources propres sur lesquelles le gouvernement a tenu de s'appuyer pour financer le budget et les dépenses de l'Etat en 2012, avec un recours aux prêts étrangers, dans les limites des années passées, sans changement et il s'agit de prêts publics pour l'essentiel et accordés à des conditions plus avantageuses que les prêts contractés sur le marché financier international. Sur cette base, le déficit budgétaire sera dans les limites de 6,6%, tandis que le taux de l'endettement extérieur sera de 46% du PIB, un taux supportable selon le ministre en sachant que la moyenne mondiale dans ce domaine atteint 60%, de sorte que le taux d'endettement de la Tunisie est inférieur à la moyenne mondiale. Le taux de croissance de l'économie est fixé à 3,5 %. Le ministre s'est déclaré convaincu que l'économie tunisienne est en mesure de retrouver son rythme habituel de croissance et de le dépasser si les conditions sont réunies, notamment en ce qui concerne le rétablissement de la stabilité et de la sécurité et l'engagement en faveur du travail et de la production. Il a insisté sur les incidences éventuelles de la hausse des cours mondiaux du pétrole brut sur la situation économique et sociale en Tunisie, signalant que la Tunisie importe 70% des carburants dérivés du pétrole, comme l'essence et le gasoil, alors que l'Etat consacre une importante enveloppe budgétaire pour la subvention des carburants dans le cadre de la Caisse générale de compensation. Il a dit qu'une augmentation d'un seul dollar dans le prix du baril de pétrole, à l'échelle mondiale, occasionne à l'Etat tunisien des dépenses supplémentaires de l'ordre de 28 millions dinars, et ce outre les charges inhérentes au remboursement du service de la dette extérieure et atteignant cette année près d'un milliard de dinars, soit 650 millions dollars. Dans l'élaboration du projet de loi de finances complémentaire ,le ministère a tenu à assurer l'adéquation entre les exigences financières, économiques, sociales et politiques. Les interventions au profit des régions défavorisées, des catégories économiquement faibles et de l'emploi ont bénéficié de la grande part dans les dépenses de l'Etat en 2012, outre l'augmentation enregistrée dans l'enveloppe réservée à la Caisse générale de compensation. La pension versée aux familles pauvres a été majorée , passant à 100 dinars par mois. L'Etat a décidé de construire sur le compte du budget de l'Etat des logements populaires en faveur de certains citoyens démunis, tandis qu'une enveloppe est consacrée aux dépenses occasionnelles comme la lutte contre les catastrophes naturelles. D'autre part ,la conjoncture économique internationale est difficile, notamment dans les pays membres de l'Union européenne, le partenaire économique traditionnel de la Tunisie et il est prévu que le taux de croissance sera négatif dans les pays de l'Union européenne en 2012, au moment où la situation dans le Golfe arabo- persique est instable, ce qui pourrait avoir des conséquences négatives sur l'évolution de la production pétrolière dans le monde et favoriser une hausse des prix mondiaux du pétrole brut. Le ministre a émis l'espoir que tous ces défis seront positivement surmontés, sans dommages, et que de nouveaux horizons et d'autres perspectives prometteuses seront ainsi ouverts devant l'économie nationale pour le bien de tous les Tunisiens sans exception.