L'on a eu, dans notre livraison de dimanche dernier à dresser un bilan exhaustif de la contribution tunisienne, à la fois publique et privée, en matière de secours des victimes du conflit armé libyen. L'on a eu, par là-même, à faire la lumière sur les performances et la situation de soins de santé au profit de nos frères libyens, en particulier. Or, il serait peut-être imprudent de traiter ce sujet, sans soulever un autre, sous-jacent, en l'occurrence la location des logements meublés, destinés à accueillir le public libyen, séjournant provisoirement chez nous pour des soins ; Une certaine complicité et un lien certain de causalité se sont toujours établis entre les deux créneaux. Cela, depuis le jour où, à El Manar, les premières cliniques privées ont vu le jour. Et que les premiers contingents de malades libyens nous ont dit « bonjour » ! Ce dossier afférent à ce mode de meublé, si controversé, n'a jamais (ou presque) été ouvert par les médias, ou par les autorités… C'est pour cela que nous avons cru bon, de lui consacrer une enquête sur deux épisodes. Celui, d'aujourd'hui, portera essentiellement sur les revers de cette forme de location sur secteur de l'hôtellerie. Tandis que dans le second épisode, l'on s'évertuera à examiner les mille et une incurie dont souffre constamment le créneau en question. Et aussi la fameuse réglementation, afférente, à l'hébergement des étrangers. Ce qui est loin de nous sécuriser et nous prémunir contre les dangers provenant d'ailleurs. Et le tocsin qu'on vient de nous sonner, nous commande d'être aux aguets…
Importation libyenne
Disons d'emblée que ce créneau, si porteur pour les familles démunies et cette manne du ciel inespérée est une importation libyenne par excellence. Parce que le Libyen ne peut ronfler à poing fermés que dans un logement meublé. Même s'il est aisé et, à même de se payer le luxe des hôtels les plus huppés. D'ailleurs, ce mode de location, est de tout temps, bien répandu d'une manière organisée, à travers le monde ou les touristes sont légion. Et a toujours fait le bonheur du voyageur tunisien, là où il a atterri. Pour des raisons évidentes de commodité et de modicité relative des tarifs pratiqués.
Foyers au trot… au galop…
Le présent sujet est aussi bien d'actualité, si l'on sait que les familles libyennes ont convergé chez nous par milliers à solliciter ce réseau ramifié de locaux meublés. Les unes pour accompagner et assister leurs blessés, les autres, en tant que réfugiés. Là, depuis les premiers tirs de canons, pour respirer avec nous à pleins poumons, l'air pur de la liberté et de la paix qui a soufflé chez nous depuis que le chiffre sept damné, s'est vu, par une marée de sang, multiplier par deux et, cédé la place au chiffre quatorze, à jamais… Cette forte pression, disions nous, n'a pas été sans répercussions sur la bourse du logement. Et, du coup, les prix des loyers sont.. au trot… au galop ! avec la rentrée, pas du tout rigolo… D'abord, pour être clair, on aurait bien souhaité procéder à une démarche rationnelle : présenter, d'abord, des statistiques fiables, ou, du moins, un ordre de grandeur. L'on est à cent lieues de prétendre y aspirer. Car, comme pour bien d'autres créneaux anarchiques et marginaux aucun inventaire, n'est fait. Mais, au pif et sans beaucoup de risques d'erreurs, les locaux du genre se compteraient par milliers sur le littoral de Tunis à Ben Gerdane.
Hôteliers concurrents
Disons tout de suite que ce créneau juteux pour de milliers de particuliers non patentés est l'ennemi juré de la corporation des hôteliers. Ceux-ci s'estiment frustrés et déloyalement concurrencés, par une situation de fait, aux dépens d'une situation de droit et de légitimité. Et, la célèbre UTICA, naguère un Etat dans l'Etat, pour des raisons claires qu'on n'ignore pas, provoque de temps à autres, des descentes fracassantes et terrifiantes sur terrain, de brigades de police de tous bords. Pour contraventionner, fermer et menacer là où le meublé a proliféré et prospéré. Et par ricochet, l'occasion est propice pour une poignée de mal-intentionnés de… faire chanter.. qui sait bien « chanter ». Cela dit, quel est le tort de ces particuliers si le secteur n'a pas été organisé et réglementé. Et qu'ils sont si sollicités par des clients qui ont leurs bonnes raisons d'élire le point de chute approprié ? Le «pourquoi» ?... Les parce que… Maintenant, pourquoi au juste nos frères libyens tournent-ils le dos à l'hôtel, au profit du « houch » ? Plus d'un « parce que » est à citer : - D'abord, nos chers visiteurs, généralement très conservateurs, atterrissent chez nous, souvent en familles. Et sont particulièrement jaloux de leur intimité familiale. Ils préfèrent, par conséquent vivre en « circuit ferme », volets et rideaux baissés, à l'abri des regards indiscrets, vers le « harim » sacré… - Ensuite, le Libyens sont particulièrement attachés à leur mode de vie ancestral et à leurs us et coutumes séculaires. Ils ne sont guère prêts à se priver du bonheur de se rassembler autour d'un « canoun » étincelant. On trouve majestueusement une théière chuintante, regorgeant d'un breuvage concentré rouge foncé parfumant formidablement les aires, aux alentours… Ils ne sont non moins disposés à rater leur sacro-saint rendez-vous gastronomique. Se rassembler au pluriel, masculin ici et féminin ailleurs, joyeusement accroupis sur un tapis autour d'un « tebsi » bien garni, à ras bord de « mbakbeka » ce plat traditionnel fort appétissant, dont raffole tout libyen de souche. Il s'agit d'une variété de soupe aux macaronis, à l'agneau et aux légumes les plus variés. Enfin, autre facteur non moins déterminant dans l'option de ces touristes de soins. Il est d'ordre matériel cette fois-ci. En effet, les intéressés sont enclins à se « caser » sous un toit provisoire chichement et se serrer la ceinture, pour pouvoir faire face, sans surprise, aux frais à la fois onéreux et imprévisibles des soins et explorations diverses. Tant et si bien que le coût d'une nuitée dans le meublé oscillerait généralement entre 40 et 60 dinars pour toute une famille (même nombreuse). Alors que ces montants couvriraient à peine les frais d'une nuitée (petit déjà seulement) par tête de pipe.
Entre deux feux
Cela, dit, il appartiendra peut-être aux hôteliers de s'organiser et de tirer par le haut de manière à réadapter partiellement et tous azimuts leurs produits et leur infrastructure, aux exigences incontournables de cette clientèle récalcitrante. Pour arracher adroitement leur part des contingents libyens. Mieux que la dissuation, ce serait le solution idoine de couper l'herbe sous les pieds desdits marginaux. Qui verraient alors leurs espoirs aller à vau-l'eau et leur gagne-pain tomber à l'eau. Entre les deux feux, difficile de choisir le moins brûlant. Convenons en… L.D A suivre Prochain article : II/ Le meublé pour courte durée, un créneau malade de la corruption et de sa quasi-clandestinité.