Raouf KHALSI - Le «bonnet blanc», «blanc bonnet» est une technique exclusivement française. Fillon qui sort par la porte de service pour rentrer, une heure après, par la porte officielle. Le procédé hérité de De Gaulle et auquel Pompidou avait conféré ses lettres de noblesse et son signe distinctif, fut par la suite érigé en subtil jeu politicien par Mitterrand et, aujourd'hui, Sarkozy montre qu'il maîtrise ses leçons d'histoire. Sans doute, le président français n'aura-t-il pas, d'ici la prochaine présidentielle, à devoir en découdre – comme ses prédécesseurs immédiats, Chirac et avant lui Mitterrand - avec la paralysie politique que favorise une commodité constitutionnelle : la cohabitation. Espèce d'hérésie politique qui ligote un président élu au suffrage universel et le condamne à vivre assiégé par un gouvernement qui lui est opposé mais, néanmoins, élu légitimement aux législatives. A quelques variantes près, puisque la France est d'abord un régime parlementaire et l'Amérique, un régime présidentiel, le processus se produit à mi-mandat à Washington comme c'est le cas actuellement : l'opposition républicaine s'empare du Parlement et met Obama et son gouvernement en minorité. Elle va légalement l'empêcher de faire ce qu'il veut. Sarkozy a, en effet, été habile à éviter que cette cohabitation ne s'installe. Il l'avait calculé, déjà, en formant son premier gouvernement : jouer sur les divisions de la gauche et sur celles des centristes ; en débaucher quelques uns – Kouchner, par exemple - ; jouer sur le fantasme pluriel de la France avec Fadela Amara et Rama Yade et, pour ne pas trop mécontenter l'extrême droite, jeter en pâture Eric Besson, un repenti du parti socialiste pour fignoler le dossier sur l'identité nationale et mener à terme le vote sur le retrait de l'identité. Justement, « l'identité nationale » : le portefeuille disparaît du nouveau gouvernement Fillon. Mais le débat est-il pour autant clos ? Les passions qu'il a suscitées se sont-elles pour autant apaisées ? Ce qui est évident c'est que la bien-pensance française et ses intellectuels ont eu pour ainsi dire une « complicité » ou du moins une complaisance suspectes à force de « non-dits » face à ce dossier. Oui, comme l'ont toujours pensé les humanistes de gauche, l'identité française reste « un mystère ». Ce mystère qui avait fait dire à Kateb Yacine : « J'écris en français pour dire aux Français que je ne suis pas Français ». Ce même mystère justement qui avait fait de Léopold Sedar Senghor, le chantre de la négritude, un Académicien de premier ordre… C'est, quand même, une autre dimension. Et ni Besson, ni personne en France, ne saurait pénétrer ce mystère. Mieux valait donc en enterrer le portefeuille.