La conquête de la niche haut de gamme du marché international et de ses exigences sévères passe par la séduction des dégustateurs et des critiques gastronomiques. Eux, doivent déclarer « taste good » pour ouvrir la voie à l'extrême onction. S'adressant mercredi soir à ses convives, oléiculteurs(producteurs), oléifacteurs(transformateurs) et conditionneurs(embouteilleurs) Philippe Lotz, responsable de la composante innovation au sein de la coopération allemande GTZ commençait par décrire cette magnifique aventure qui l'a conduit à prêter son concours à la filière oléicole. Lui et son équipe s'interrogeaient sur la manière de contribuer à aider cet elixir national fétiche des exportations agroalimentaires tunisiennes à faire valoir ses lettres de noblesse à l'international et de se mesurer à ses compétiteurs sous sa véritable identité ainsi qu'il était fixé par le plan huile 2008-2011 formalisé par les pouvoirs publics. Mais que vient faire l'innovation en la matière se demandait, interrogatif et sceptique, Philippe Lotz. Et poussant la réflexion, de broyeur en presse, le jus jaillit et la lumière fut au rendez-vous. Les paramètres olfactifs d'abord puis gustatifs et enfin de « robe » de l'huile, qui sont les paramètres déterminants sur le marché international se surajoutent tout au long de la filière en commençant par l'olive, sa culture, son pressage et sa conservation. Et là il était clair qu'il fallait, pour ennoblir toutes les étapes de la chaîne qualité, innover dans les variétés les cultures la presse et in fine le conditionnement. Et c'est dans cette perspective que GTZ a calé sa contribution au secteur.
Un plan bien huilé Des projections réalisées par le ministère de l'industrie laissaient apparaître que si l'on conditionnait 10% d'ici 2011 de nos exportations contre 2% à l'heure actuelle on doublerait les recettes d'export de l'huile d'olive. Et c'est bien le mobile sur lequel a été fondé le plan huile. L'objectif principal d'entre tous semblait être le conditionnement. Et le plan y apportait des réponses propres notamment en matière d'incitations aux conditionneurs à investir dans le flaconnage. Mais le plan prévoit également un plan com' et surtout un agenda de foires. L'étape ultime était la conquête des palais des vigies du marché que sont les dégustateurs attitrés et les critiques gastronomiques. Etant très écoutés des clients ils sont très suivis par les opérateurs. C'est leur appréciation qui garnit les carnets de commande ou l'inverse. Et c'est d'abord par eux qu'il faut commencer.
La tyrannie des experts Pour aller à l'international, il faut transiter par les salons spécialisés, c'est bien connu mais étape incontournable il faut satisfaire à l'épreuve des testeurs. Le reste ne fera que prendre une suite logique. Et pour la circonstance GTZ a invité Dr Gino Celetti, panel leader entre autres du consiglio Oleico International, et palais hautement écouté de la profession à l'échelle internationale. En grande verve Dr Celetti a bien montré la corrélation entre les paramètres olfactifs et par conséquent gustatifs de l'huile d'olive avec toutes les étapes de la filière. Il a montré le degré d'expertise qui est nécessaire à chaque étape et notamment la minutie qu'il faut apporter pour décider du jour et du moment de la cueillette. L'olive est finalement un fruit bien capricieux. Il faut scruter avec minutie le moment où la première olive vire du vert au violet et c'est là où il faut y aller à l'abattage autrement l'on risque de compromettre une des composantes du goût. On était bien gênés de découvrir que l'huile n'était pas jugée sur son seul degré d'acidité et ce fameux seuil de 2 %, qui n'est, après explication, qu'une des manifestations de la composition de l'huile laquelle regorge d'arômes ceux là mêmes qui fument quand l'huile chauffe dans la poêle. Et c'est bien dans ce sens qu'a abondé Kersten Wetenkamp, correspondant du Der Feinschmecker, premier journal allemand spécialisé dans les salons oléicoles. Toutefois le critique allemand nous a annoncé une nouvelle qui a ravi les professionnels. En « blind test », c'est à dire une séance de dégustation sans indication de l'origine de l'huile pour ne pas influencer les jurés, l'huile tunisienne a tout de même obtenu le score de 7,8 sur une échelle de 10. A l'évidence la démarche innovation nous rapprochera du classement de tête occupé pour le moment par l'Espagne, l'Italie et le Portugal et depuis la première année par la Syrie. Il y a donc toujours des nouveaux arrivants dans le saint des saints, ce qui rend l'exigence d'innovation plus impérative.