Le Temps-Agences - Le procès de trois islamistes allemands et turc accusés d'avoir préparé des attentats anti-américains en Allemagne pour, selon l'accusation, égaler ceux du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, s'est ouvert hier à Düsseldorf (ouest). Fritz Gelowicz, 29 ans, Daniel Schneider, 23 ans, Adem Yilmaz, 30 ans, et Atilla Selek, 24 ans, avaient pour objectif "d'anéantir les ennemis de l'Islam, en tuant en particulier des Américains et des installations américaines" et rêvaient même "d'atteindre l'ampleur des attaques du 11 septembre", a déclaré le procureur fédéral Volker Brinkmann au premier jour du procès devant une cour d'assises spéciale, dans un tribunal de haute sécurité. Pour l'accusation, les ficelles de ces projets d'attentats ont été tirées depuis l'étranger par une organisation terroriste ouzbèke proche d'Al-Qaïda, l'Union du Jihad islamique (UJI). "Il devait y avoir au minimum trois attentats" contre des objectifs tels que "la base américaine de Ramstein, l'ambassade d'Ouzbékistan", des aéroports, des discothèques, des pubs et restaurants", dans l'ouest ou le sud de l'Allemagne, à "Francfort, dans la Ruhr, à Düsseldorf, Cologne, Stuttgart", selon l'accusation. Les accusés, tous passés par des camps d'entraînement terroriste au Pakistan, détenaient de quoi fabriquer des charges explosives "d'une puissance équivalente à 410 kg de TNT". Quatre kilos ont été utilisés dans l'attentat de Londres, qui a fait 52 morts en juillet 2005. "Gelowicz voulait mettre 250 kg de mélange explosif dans chacune des trois bombes. Il a dit +si chacune tue 50 personnes, ça fait 150 morts+ (...) et Yilmaz a dit +on a besoin de trois gros objectifs+", a détaillé le procureur, pendant une heure et demi, devant une centaine de personnes assises dans les rangs du public. Barbe courte ou barbe longue, les accusés en jeans et t-shirt ou chemises sport à manches longues ont écouté la lecture de l'acte d'accusation avec décontraction. Ils ne se sont pas exprimés. Mais Adem Yilmaz a ri, lui qui n'a accepté de se découvrir la tête qu'après sommation du président de la cour, et est resté résolument assis quand toute l'assistance s'est levée pour saluer la cour. Ce procès antiterroriste est le plus important depuis ceux de la Fraction Armée Rouge (RAF), selon les analystes, car pour la première fois depuis les attentats de ce groupe d'extrême gauche dans les années 70-80, des enfants du pays sont accusés d'avoir préparé un carnage sur le sol allemand. Il pourrait durer plus de deux ans. L'accusation s'appuie sur de nombreuses écoutes téléphoniques réalisées lors d'une enquête internationale qui a duré près d'un an et mobilisé 600 personnes, jusqu'au démantèlement de la cellule en septembre 2007. Les autorités allemandes avaient été alertées un an plus tôt par la CIA américaine de courriels suspects interceptés entre l'Allemagne et le Pakistan. Une procédure illégale, s'est insurgée la défense, pour qui, de toute façon, "le droit des accusés à un procès équitable" a été bafoué. Les avocats de Yilmaz et Selek ont aussi affirmé que "l'UJI n'existe pas". Ceux des deux Allemands convertis à l'islam ont, eux, assuré que Gelowicz et Schneider "ne connaissaient pas l'UJI jusqu'aux articles de presse" de 2007. Trois des suspects avaient été arrêté le 4 septembre 2007 dans une ferme isolée du Sauerland (ouest) en flagrant délit, alors qu'ils tentaient de concocter un mélange explosif à base d'eau oxygénée, semblable à ceux utilisés notamment lors des attentats de Londres en 2005. Le quatrième, Atilla Selek, a été arrêté en Turquie deux mois plus tard, puis extradé vers l'Allemagne. Les bombes devaient exploser avant le vote parlementaire qui a prolongé l'engagement militaire de l'Allemagne en Afghanistan, le 12 octobre 2007.