Ils sont américains, australiens, jamaïcains, français, allemands, belges… Nés de parents chrétiens, juifs ou athées… Fraîchement convertis à l'islam le plus rigoriste par des imams extrémistes, ils ont gagné les camps d'entraînement de Bosnie et d'Afghanistan, où ils ont acquis une solide formation militaire, avant de devenir des «petits soldats du jihad» contre l'Occident mécréant. Certains sont morts dans les montagnes de Tora Bora ou en Irak. D'autres ont été arrêtés dans le cadre de la campagne internationale de lutte contre le terrorisme, jugés et écroués. Leurs parcours, qui se ressemblent en plusieurs points, peuvent être résumés en deux formules: quête désespérée de soi et folie destructrice. Dans ce quatrième article de la série, nous présentons l'Allemand d'origine polonaise Stephan Josep Smyrek, Abdel Karim après sa conversion à l'islam, qui a été recruté par le Hezbolllah libanais pour mener des opérations de reconnaissance en Israël.
Allemand d'origine polonaise, converti à l'islam peu après sa sortie de prison en 1994 – il avait été condamné pour trafic de drogue –, Stephan Josep Smyrek, alias Abdel Karim, a été condamné à dix ans de prison, en 1999, par une cour israélienne pour contribution à la préparation d'un attentat en Israël et appartenance à une organisation terroriste. Né le 25 février 1971 à Braunschweig, en Westphalie orientale (Allemagne), Smyrek a eu une enfance difficile. Après le divorce de ses parents, il a commencé par se droguer, avant de devenir lui-même un dealer et de sombrer dans la criminalité. Ce qui lui a valu d'être condamné pour trafic de drogue et incarcéré. Ayant accepté de coopérer avec les autorités judiciaires et de balancer certains gros poissons du milieu, il a bénéficié d'une réduction de peine et d'une protection spéciale de la police. Après sa conversion à l'islam, dont les circonstances sont restées mystérieuses, Smyrek a pris le nom de Abdel Karim. C'est Fahdi Hamdar, un agent de liaison du Hezbollah basé en Allemagne, qui l'a recruté dans la mosquée Braunschweig où l'Allemand avait pris l'habitude de prier. Hamdar avait un cousin, Mohammed, chargé des relations extérieures du Hezbollah. Les deux hommes ont convaincu Smyrek de servir la cause de l'islam en travaillant pour le mouvement islamiste chiite libanais. C'est ainsi que Smyrek s'est retrouvé à Beyrouth au milieu de l'année 1997. Après plusieurs semaines dans la capitale libanaise, où son attachement à la cause islamiste a été mis à l'épreuve par les cadres du mouvement, Smyrek a été transféré à une base du mouvement près de la frontière syro-libanaise, où il a reçu, entre août et novembre 1997, une formation intensive dans le maniement des mitraillettes et des explosifs. Ses officiers traitants lui ont donné ensuite 4 000 dollars, une caméra et un billet d'avion pour Israël, via les Pays-Bas. Sa mission: identifier des objectifs potentiels pour des attaques à Tel Aviv ou Haïfa. Smyrek, qui avait été pisté par le Mossad, les services de renseignement israéliens, depuis son arrivée au Liban, fut arrêté, le 18 novembre 1997, aussitôt que son avion eut atterri à l'aéroport de Ben-Gourion, à Tel Aviv. Les Israéliens trouvèrent dans ses bagages des cartes et plans relatifs à des endroits considérés comme sensibles et une caméra vidéo. Pendant l'interrogatoire, Smyrek a avoué qu'il travaillait pour le Hezbollah et qu'il a été envoyé en Israël pour y identifier des endroits susceptibles d'être des cibles d'attentats. Il a expliqué aussi qu'un plan alternatif avait été élaboré qui prévoyait un attentat contre l'ambassade israélienne à Bonn ou l'assassinat d'un diplomate israélien en poste en Allemagne. La presse israélienne a prétendu que la visite de Smyrek en Israël était une «expédition de reconnaissance» et qu'elle constituait la première étape d'une mission qui devrait s'achever par un attentat suicide. Elle a prêté à l'Allemand cet aveu: «Deux jours avant mon départ du Liban, on m'a filmé avec une caméra vidéo. J'ai expliqué en anglais que j'allais mourir en martyr en combattant les sionistes, nos ennemis.» Au cours de son procès, Smyrek est cependant revenu sur tous ses aveux, qui ont été obtenus, selon lui, sous la torture dans les locaux du Shin Beth et du Shabak, les services de contre-espionnage israéliens. Le porte-parole du Hezbollah a catégoriquement démenti, lui aussi, toute relation de son organisation avec l'Allemand et accusé les services israéliens d'avoir monté l'affaire de toutes pièces. Cela n'a pas empêché la Cour de justice de Tel Aviv de juger Smyrek coupable de préparation d'attentat en Israël et d'appartenance à une organisation terroriste. Et de le condamner, le 17 août 1999, à 10 ans de prison. Smyrek, qui a toujours clamé son innocence dans des entretiens accordés aux journaux allemands, a été libéré, en janvier 2004, dans le cadre d'un échange de prisonniers entre Israël et le Hezbollah. Il vit actuellement en Allemagne. Demain 5 - John Walker Lindh : le Taliban américain