Déjà reportées à plusieurs reprises, les élections municipales pourraient être une nouvelle fois repoussées à cause du retard pris au Parlement. Un retard considérable a été pris dans l'adoption du projet de loi relatif au Code des collectivités locales. Le texte soumis à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) nécessitera plus d'un réaménagement en commission et lors de la séance plénière. D'autant plus qu'il comporte plusieurs lacunes qu'il faudrait corriger comme une distinction peu claire entre les rôles du conseil municipal, du conseil régional et du gouverneur, ce qui pourrait constituer évidemment une entorse au principe de l'indépendance du pouvoir local. La deuxième entrave qui pourrait aboutir à un nouveau report de ce scrutin tant attendu tient au désaccord entre les groupes parlementaires sur les noms des nouveaux membres de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE). Ces derniers devraient remplacer le président de l'instance, Chafik Sarsar, le vice-président, Mourad Ben Mouelli et d'une des neuf membres, Lamia Zargouni, qui avaient tous les trois rendus le tablier le 9 mai dernier. Une commission spéciale avait été créée à l'ARP pour l'examen des dossiers de candidature. Après l'examen de ces dossiers, les membres de la commission ont voté pour quatre candidats pour chacune des catégories vacantes (représentants des universitaires, des juges judiciaires et des juges administratifs). Après avoir retenu les noms, la liste a été présentée pour le vote en plénière. Mais un désaccord sur les noms des candidats a éclaté. Plusieurs députés ont estimé que les candidats présélectionnés sont soutenus par un tel ou tel parti politique et n'ont pas été retenus pour leurs compétences. La guerre est ouverte entre les élus du peuple qui sont prêts à défendre bec et ongles leur poulain, qui ne lâchent rien, bloquant ainsi le vote. L'élection du juge administratif a nécessité le recours à un deuxième tour, le premier n'ayant donné la majorité à aucun candidat. Mais avant même le démarrage du second tour les députés de Nidaâ Tounes se sont retirés de la plénière sans expliquer leur démarche. Ainsi, le vote a été reporté sine die, et l'ISIE continuera à travailler jusqu'à une date indéfinie sans président et sans deux autres membres. Face à cette situation, une dizaine d'associations, dont l'Association tunisienne pour l'intégrité et la démocratie des élections (ATIDE) Al-Bawsala, Mourakiboun et Chahed, ont publié lundi un communiqué dans lequel elles appellent l'ARP à tenir une session parlementaire extraordinaire qui doit être réservée à l'adoption du Code des collectivités locales et à l'élection des trois nouveaux membres de l'ISIE. «Suite à l'achèvement de la session parlementaire ordinaire sans l'élection des nouveaux membres de l'ISIE et l'adoption du Code des collectivités locales, nous considérons que le processus relatif aux élections municipales du 17 décembre 2017 est désormais menacé », ont estimé ces associations, notant que l'ARP et les parties politiques qui ont manœuvré pour empêcher le vote qui aurait servi à combler les postes vacants au sein de l'ISIE «assumeront la responsabilité de tout éventuel report du scrutin». Côté inscription sur les listes électorales, le bilan est peu reluisant. Jusqu'au 7 août, quelque 45 7830 nouveaux électeurs seulement ont été enregistrés sur un réservoir potentiel de près de 3 millions de personnes en âge de voter non inscrites. Plusieurs facteurs expliquent l'inquiétante faiblesse des inscriptions sur les listes électorales. D'abord, la période d'inscription choisie n'est pas adéquate dans la mesure où elle coïncide avec la fin du mois de ramadan, la période des examens, les fêtes et les vacances d'été. La campagne de sensibilisation relative à cette opération d'inscription a été aussi lancée très en retard malgré une récente accélération du rythme de cette campagne. De plus, les partis et les organisations nationales ne se sont impliqués dans l'opération de sensibilisation que très tardivement. A cela s'ajoute la désaffection des jeunes et des moins jeunes, notamment dans les régions intérieures, pour la chose publique. Les aspirations des populations, qui étaient énormes au lendemain de la chute de Ben Ali, n'ont pas été satisfaites par les divers gouvernements qui se sont succédé depuis la révolution, ce qui a engendré une grande déception.