Le dialogue de sourds se poursuit entre le ministère de l'Enseignement supérieur et la Fédération générale de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique (FGESRS) au sujet du décret relatif aux élections des directeurs, doyens et des recteurs ainsi que des membres des conseils de tous les établissements d'enseignement supérieur et de recherche. Alors que le ministère continue à affirmer que le décret controversé fait l'objet d'un large consensus et s'apprête à publier le calendrier des élections prévues en juillet, la Fédération syndicale rattachée à l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) réclame une nouvelle séance de dialogue sur le décret électoral avant de le soumettre au conseil des Universités pour approbation. Aux dernières nouvelles, le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi, vient d'intervenir auprès du président du gouvernement pour demander le report des élections à la prochaine rentrée universitaire, et ce à la demande des recteurs du grand Tunis et d'autres personnalités universitaires. Le but de ce report est de donner le temps à de larges concertations visant à procéder à une évaluation objective du décret électoral promulgué récemment par le ministère et à converger vers une conception consensuelle. «Devant l'autisme du ministre, nous avons dû recourir à une intervention du secrétaire général de l'UGTT afin d'éviter des élections tronquées », souligne le syndicaliste Sami Aouadi. La FGESRS a fustigé récemment un décret électoral «préparé dans les bureaux clos du ministère de l'Enseignement supérieur» et qui comprend plusieurs «mesures anti-démocratiques » et des «incohérences manifestes». Parmi les mesures dénoncées par la Fédération, on citre notamment l'autorisation des chefs de département à participer aux élections du doyen ou du directeur de chaque établissement d'enseignement supérieur. «Cette mesure constitue un fait sans précédent dans l'histoire de l'Université tunisienne. Elle est inacceptable vu que les chefs de département ne bénéficient que d'une légitimité électorale très réduite parce qu'ils ne sont élus que par les membres de ce département (le nombre de ces membres dépasse pas une dizaine dans certains cas) tandis que les membres des conseils scientifiques sont élus par l'ensemble des enseignants permanents », explique le secrétaire général de la FGESRS, Houcine Boujarra. Et d'ajouter : «La participation des chefs de département aux élections rend aussi quasi-impossible le retrait de confiance au directeur ou au doyen puisque cette procédure qui vise à éviter toute propension à la gestion unilatérale de l'université nécessitera désormais le feu vert des deux tiers (2/3) des membres des conseils scientifiques et des chefs de département ». Autre incohérence évoquée par la Fédération générale: l'adoption du scrutin uninominal pour l'élection du doyen ou du directeur de chaque établissement universitaire et du mode de scrutin de liste pour l'élection du président de chaque université et de ses deux adjoints. « Cette incohérence risque de transformer l'Université en un espace de luttes partisanes et idéologiques. De plus, elle risque de conduire au rejet de l'ensemble du décret électoral en cas d'introduction d'un recours auprès du Tribunal administratif», commente M. Boujarra. Du côté du ministère, on assure que le décret électoral a fait l'objet de consultations approfondies avec le syndicat et les instances pédagogiques.