par Abdelhamid Gmati Alors que le pays est engagé dans une étape cruciale de cette transition qui n'en finit pas, des polémiques, des actions, des déclarations se multiplient et freinent l'élan libérateur. Alors que des centaines de milliers d'élèves se présentent à leurs examens de fin d'année scolaire, le Syndicat général de l'enseignement de base et celui de l'enseignement secondaire ont engagé une sorte de bras de fer avec le ministère de l'Education nationale allant jusqu'à exiger le départ du ministre. Ce sont les jeunes écoliers qui subissent les effets de cette guéguerre qui, partie sur des revendications professionnelles, a glissé vers des considérations politiques. Est-ce tolérable de la part d'enseignants de prendre leurs élèves en otage alors qu'ils devraient être soucieux de leur avenir ? Alors que la saison touristique commence et que tous les intervenants devraient unir leurs efforts pour la faire réussir, les structures professionnelles du secteur s'en prennent au ministère du Tourisme et à la ministre. Est-ce le moment de se tirer dans les pattes au lieu de veiller à attirer le plus de visiteurs possible et de veiller à leur garantir le meilleur accueil et les meilleurs services. Et comme par hasard, les employés municipaux récidivent et se remettent en grève laissant le pays sombrer dans les ordures et la saleté. A notre connaissance, plusieurs de leurs revendications ont été satisfaites. Plusieurs de ces employés ont été titularisés; à peine satisfaits, ils ont arrêté de travailler. Du côté de la classe politique, on n'est pas mieux loti. Notre équipe nationale de football ne s'étant pas qualifiée au Mondial du Brésil, nos politiques livrent leur propre match en Tunisie avec le pouvoir comme trophée. L'Assemblée nationale constituante, qui s'est auto-proclamée Parlement malgré la perte de sa légitimité depuis le 23 octobre 2012, se comporte en arbitre, décidant de tout, faisant des lois à sa convenance malgré toutes les oppositions et toutes les réserves. Ainsi en est-il de cette fameuse Instance vérité et dignité qu'on a voulu substituer à la justice transitionnelle. Certains des membres de cette instance, en particulier sa présidente, suscitent un tollé général de contestation et toutes les parties déclarent refuser de collaborer avec cette instance. Du reste, l'un de ses membres les plus en vue a rapidement démissionné. L'ANC, dominée comme on le sait par le mouvement Ennahdha et ses satellites, n'en a cure et continue à faire la pluie et le beau temps et poursuit la réalisation de son agenda. Pour les élections, elle a obtenu gain de cause et on a accepté de faire précéder les législatives, la présidentielle devant se tenir un mois plus tard. Le président de l'Isie allant jusqu'à envisager la tenue du second tour en 2015. Ce même président, mal à l'aise avec ces innombrables tergiversations et ces retards, craint même que les électeurs, méfiants envers les politiques, se montrent réticents à aller aux urnes. Certains ont, par le biais des réseaux sociaux, entamé une campagne pour inciter les citoyens à ne pas aller voter. Il y a des islamistes qui prônent cela puisqu'ils ont été les principaux bénéficiaires de l'abstention de 2011 et de la multiplicité des partis dits modernistes. Mais il y a aussi des modernistes qui appuient cette campagne. Seront-ils suivis ? Les députés, eux, s'estiment au-dessus des lois qu'ils appellent à respecter. Leur refus de lever l'immunité de six des leurs, impliqués dans des affaires de justice, est une négation du principe de la séparation et de l'indépendance des trois pouvoirs, comme cela sied à une démocratie. Le mouvement Ennahdha poursuit sa politique de la diversion. Il vient de jeter un nouveau pavé dans la mare en invitant les partis à choisir un candidat unique pour l'élection présidentielle. Les partis politiques, y compris ceux de la Troïka, ont tous rejeté cette proposition, estimant à juste titre que cela « est un acte de spoliation du citoyen de son droit à choisir lui-même son président de la République ». En fait, les islamistes font miroiter leur soutien aux nombreux prétendants. Qui, bien entendu, se retrouveront fortement déçus. En fait, avec tous ces gens, responsables ou irresponsables, qui nagent à contre-courant, c'est tout le peuple tunisien qui risque de se retrouver « Gros-Jean comme devant ». En d'autres termes « trahi »