L'Observatoire national de lutte contre le terrorisme et le crime organisé est né Comment lutter efficacement contre la prolifération du fléau terroriste et du crime organisé dans un pays qui tend à rompre avec les diverses formes de monopolisation du pouvoir et leur substitution par un travail collectif basé sur le patriotisme ? Quel rôle pourrait jouer la société civile dans le combat contre ces phénomènes intrus dans notre culture et quel soutien pourrait-elle apporter aux efforts des autorités en la matière ? Ces interrogations préoccupent bon nombre de juristes, de défenseurs des droits de l'Homme et de militants du tissu associatif qui ont finalement choisi de s'unir dans le travail associatif engagé. Aussi, de multiples associations ont-elles vu le jour, notamment l'Association tunisienne de lutte contre l'extrémisme et l'exclusion ainsi que l'Association de secours des Tunisiens à l'étranger. Récemment, un nouvel acquis associatif vient enrichir la panoplie des mécanismes et structures non gouvernementales de lutte contre le terrorisme : l'Observatoire national de lutte contre le terrorisme et le crime organisé vise à conjuguer les efforts ainsi que les ONG concernées pour renforcer le travail des autorités dans ce sens et afin de réfléchir, ensemble, sur une stratégie nationale efficiente en matière de lutte contre le terrorisme, le crime organisé et le blanchiment d'argent. Pour informer le public sur ce projet, l'Observatoire a organisé, hier à Tunis, en collaboration avec l'Ordre national des avocats de Tunisie, une conférence de presse, au cours de laquelle il a été procédé à la présentation de l'Observatoire et des axes fondamentaux de la stratégie, laquelle sera proposée prochainement au gouvernement. Prenant la parole, M. Hatem Yahyaoui, président de l'Observatoire, indique que le terrorisme a su s'incruster dans notre système et ébranler nos institutions, car nourri par des facteurs favorables dont le blanchiment d'argent et l'insécurité. «Certes, la Tunisie adopte les conventions des Nations unies en matière de lutte contre le trafic des armes et les différentes manifestations de terrorisme. Cependant, faute d'une bonne synchronisation entre les institutions de l'Etat, les interventions demeurent en-deçà du requis», fait-il remarquer. La création de l'Observatoire a donc pour objectif de compenser les défaillances et renforcer le travail des autorités à travers le recensement des données de base et l'élaboration d'une stratégie nationale de lutte contre le terrorisme, le crime organisé et le blanchiment d'argent. Une stratégie en neuf points Stopper la prolifération du terrorisme implique, selon les militants de la société civile, la mise en place d'un système de renseignements indépendant, qui se chargera de la collecte des données relatives au terrorisme, notamment ses cellules, ses sources de financements, etc. Il convient, en second plan, de maîtriser désormais la couverture médiatique afin de protéger les données et les initiatives des autorités et d'éviter ainsi de prévenir, sans le vouloir, les terroristes sur d'éventuelles mesures prises à leur encontre. D'où le rôle de la Haica dans le contrôle du traitement du terrorisme par les médias. La stratégie compte également un contrôle plus rigoureux au niveau des espaces susceptibles de dogmatiser les jeunes, notamment certaines ONG, les mosquées, les centres culturels et autres, sportifs. L'observatoire recommande, également, la création d'une instance spécialisée pour le contrôle des sources de financement des associations y compris les dons. Par ailleurs, la stratégie mise sur la sensibilisation et sur l'ancrage des principes de citoyenneté, de la tolérance et de l'islam modéré, notamment auprès des jeunes afin de préserver les futures générations du spectre de l'obscurantisme. L'orateur appelle également à la révision des textes de loi relatifs au blanchiment d'argent, et qui ont été modifiés le 23 octobre 2011. Une commission élitaire pour comprendre le terrorisme De son côté, M. Mohamed Fadhel Mahfoudh, le doyen des avocats tunisiens, rappelle que la lutte contre le terrorisme ne se limite pas aux slogans scandés. Elle nécessite d'être pratiquée et ancrée pour se transformer, par la suite, en une éducation-repère. M. Kamel Laâjouz, président de l'Association tunisienne de lutte contre l'extrémisme et l'exclusion, salue la création de l'Observatoire, qui constitue, à son avis, le premier réseau associatif engagé dans la lutte contre le terrorisme. Pour M. Hichem Meddeb, responsable au ministère de l'intérieur, combattre le terrorisme relève également du social, du culturel et même du psychologique. Prenant la parole à son tour, Mme Imene Bjaoui, présidente de l'Association des jeunes avocats tunisiens, se félicite du rôle que jouera l'Observatoire dans ce sens. Outre le recensement des données sur le terrorisme, il est question de créer une commission élitaire, regroupant des chercheurs et des experts qui examineront le phénomène afin de mieux le comprendre et de proposer des solutions appropriées. De son côté, M. Badis Koubakji, président de l'Association de secours des Tunisiens à l'étranger, invite l'assistance à réciter la Fatiha en hommage aux soldats-martyrs. L'orateur attire l'attention sur l'existence de nombreuses failles juridiques qui continuent à entraver certaines enquêtes, recommandant par conséquent la réouverture de nombreux dossiers. Faire face au terrorisme représente, à son avis, un combat inéluctable, surtout que ce fléau touche pas moins de 10.000 familles tunisiennes.