D'ici peu, le prix du baril de pétrole risque de dépasser les 85 dollars. En 2020, et selon le dernier rapport de l'Agence internationale de l'énergie, AIE, le prix serait de plus de 100 dollars, alors qu'en 2030, il dépasserait la barre des 115 dollars. Pis, selon le même rapport, et son scénario «noir», la demande mondiale connaîtrait un rythme d'évolution assez accéléré. On parle d'une moyenne de 40% d'ici 2030. Cette évolution de la demande est d'autant plus grave que sa majorité est basée en grande partie sur les énergies fossiles (environ 77%), ce qui place les acteurs internationaux devant l'obligation de mobiliser des investissements importants. L'AIE parle de 26.000 milliards de dollars, soit 1.100 milliards par an. Or, la crise économique internationale pourrait rendre incertaine la mobilisation de tels fonds. Et c'est bien là une éventualité qui peut menacer la production mondiale et risque de tirer les prix beaucoup plus vers le haut. Même si de telles prévisions ne sont pas forcément alarmantes, elles sont tout de même préoccupantes. Car elles confirment, encore une fois, l'instabilité d'un marché international et tout le climat d'incertitude qu'il suscite. Et c'est cette instabilité qui place tous les pays devant l'obligation d'anticiper cette éventuelle envolée des cours du pétrole, pour réagir et mettre en place les solutions appropriées. En Tunisie, cette réaction devrait reposer essentiellement sur l'approfondissement des programmes nationaux d'économie d'énergie, la garantie d'une bonne rationalisation de la consommation des produits énergétiques, l'introduction des technologies nouvelles, la généralisation de l'utilisation du gaz naturel et aussi, et surtout, la promotion continue des énergies renouvelables. Le tout dans l'optique de s'assurer une efficacité énergétique fiable et durable. Au niveau de l'économie d'énergie et la rationalisation de la consommation, l'effort devrait être orienté essentiellement vers les Industries grandes consommatrices d'énergie (Igce), qui accaparent à elles seules environ le tiers de notre consommation énergétique. Les ménages sont appelés à réduire significativement leur consommation en faisant montre de plus de responsabilité et de vigilance, et en optant davantage pour les équipements modernes économes en énergie. D'ailleurs, toutes les études confirment qu'on est en mesure de réduire sa consommation de plus de 20% tout en gardant le même confort. En parallèle, un recours plus soutenu au gaz naturel est un choix irréversible. Actuellement, le nombre des ménages raccordés au réseau est de 530.000. Un niveau encore timide par rapport au potentiel réel national qui a besoin plus que jamais d'une meilleure exploitation. En plus de toutes ces questions, la promotion des énergies renouvelables et la généralisation de l'utilisation des technologies nouvelles sont une orientation stratégique du programme présidentiel «Ensemble, relevons les défis». Il faut reconnaître que notre pays a réussi à limiter la pression énergétique à la faveur de multiples et importants programmes. D'ailleurs, les dernières statistiques (voir le dernier numéro de la revue L'Energie), le programme national de maîtrise de l'énergie (2005-2007), accompagné par la création d'un fonds national, a assuré des résultats encourageants. Ce programme a permis justement d'économiser 700k tep en 2007, soit 8% de la consommation nationale de la même année. Le lancement d'un deuxième programme quadriennal (2008-2011) devrait conforter ce résultat. Les projections tablent, en effet, sur la réduction de la demande de 20% d'ici la fin de 2011 et sur l'augmentation de la part des énergies renouvelables pour atteindre 4% de la demande nationale en énergie électrique. Toutefois, il est absolument nécessaire de faire des projections à long terme. Car, comme le soutiennent les experts internationaux, certaines questions, comme l'envolée des cours du pétrole, sont conjoncturelles et donc immédiates, alors que d'autres, notamment l'épuisement des réserves et donc la rupture énergétique, portent sur le long terme. Il faut donc agir en conséquence. Précisons que le court terme est toujours plus facile à gérer. Il suffit de prendre les dispositions adéquates. A ce stade, on peut avancer que l'ajustement des prix des produits pétroliers est parfois une option incontournable. En effet, selon le ministère de l'Industrie et de la Technologie, «le système d'ajustement des prix, aussi bien dans le sens de la hausse ou de la baisse, est essentiellement basé sur une procédure qui tient compte de l'évolution des cours sur le marché mondial, tout en veillant bien entendu à la préservation des équilibres globaux du pays». De ce fait, «on procède à l'ajustement chaque fois que, sur une période de trois mois successifs, le différentiel entre le prix d'équilibre de référence du baril de pétrole brent et son prix sur le marché mondial atteint au moins 10 dollars». C'est bien là la loi du marché.