Les faucons d'Ennahdha montent au créneau et multiplient les déclarations incendiaires. La première réunion dite technique et procédurale sera abordée par des négociateurs dont les nerfs seront à vif Les déclarations de Sahbi Attig et Abdelkarim Harouni, membres du bureau exécutif d'Ennahdha, conjugées au communiqué de la présidence du gouvernement indiquant que le gouvernement Laârayedh ne démissionnera qu'au terme du parachèvement par l'ANC du processus constitutif ont brouillé les cartes et ont, semble-t-il, suscité l'inquiétude et le désarroi de beaucoup de protagonistes du Dialogue national dont on attendait le démarrage dans les jours à venir. «Beaucoup de parties nous ont contactés pour exprimer leur inquiétude et leur stupéfaction quant aux affirmations des deux responsables nahdhaouis. Ils se demandent maintenant qui croire, le président d'Ennahdha qui a livré au Quartet un document écrit annonçant l'acceptation de la feuille de route, avec tous ses points et sans conditions préalables, ou les lieutenants de Rached Ghannouchi qui donnent l'impression de tout remettre en cause», confie à La Presse Bouali M'Barki, membre du bureau exécutif de l'Ugtt. «Ces déclarations, ajoute-t-il, sont en réalité destinées aux militants de base d'Ennahdha pour leur faire comprendre que le parti n'a pas tout cédé et qu'il est toujours en position de force. A la suite de ces déclarations, nous trouvons beaucoup de difficultés à convaincre les partis de l'opposition à rallier le dialogue. Toutefois, au Quartet, nous considérons que l'engagement signé par Ghannouchi représente la position officielle et définitive d'Ennahdha». Sur le plan pratique, les préparatifs en vue du démarrage du Dialogue national vont bon train. «Nous sommes en contact quotidien avec les partis qui prendront part au dialogue en vue d'en fixer ensemble la date de démarrage et nous espérons qu'elle ne dépassera pas jeudi ou vendredi prochains. Nous n'avons pas encore décidé si les trois présidents prendront la parole ou non au cours de la séance inaugurale. Quant à l'éventualité du boycott par Ali Laârayedh de cette séance au cas où il camperait toujours sur ses positions, nous considérons que son absence n'aura pas d'impact puisque son parti Ennahdha sera de la partie. Et en tout état de cause, nous réaffirmons que le Dialogue national se tiendra entre les partis de l'opposition et de la Troïka et non entre l'opposition et le gouvernement Ali Laârayedh», précise-t-il en conclusion. Un message clair : l'aile dure peut tout chambarder «Il est clair que ces déclarations révèlent les difficultés que rencontrent les responsables nahdhaouis à persuader leurs militants de base que le parti n'a pas bradé les intérêts du mouvement», commente Abderrazak Hammami, président du Parti du travail patriotique démocratique et membre du Front du salut national. «Elles déclarations comportent aussi un autre message adressé à l'opposition : prenez en considération nos concessions, nos extrémistes peuvent tout chambarder à tout moment», tient-il à préciser. Quelles sont les parties qui prendront part au dialogue ? Abderrazak Hammami révèle : «Pour le moment, l'on examine les formules de participation des parties qui ont déjà pris part aux deux rounds précédents du dialogue du 16 octobre 2012 et du 16 juin 2013. D'autres parties ont exprimé le désir d'y participer, y compris le Front national de préservation de la légitimité qui était jusqu'à une époque récente contre le processus dans son ensemble. Moi, personnellement, je soutiens la participation de ce front, partant du principe selon lequel il faut élargir au maximum la liste des participants». Au niveau du Front du salut national, une réunion est prévue, demain, mercredi 3 octobre, en vue d'examiner les positions «que nous allons défendre lors des différentes séances du dialogue national». Participera, participera pas. Laârayedh laisse planer le doute quant à sa présence lors de la séance inaugurale du dialogue national. Selon le président du Ptp : «La présence de Laârayedh sera purement protocolaire et il ne faut pas accorder trop d'importance aux déclarations du gouvernement en place puisque les dés sont jetés et qu'Ennahdha ne peut plus reculer. Il y aura sûrement quelques escarmouches mais nous saurons les contenir». Le dernier recours Reste maintenant à savoir ce qu'on peut faire, au plan institutionnel, au cas où Ali Laârayedh refuserait de présenter la démission de son gouvernement bien que son parti ait accepté le départ de ce même gouvernement. Ghazi Ghrairi, constitutionnaliste, précise : «Dans ce cas, on a recours à la motion de censure qui sera votée par la Constituante, à condition que les constituants d'Ennahdha y adhèrent. C'est le seul recours si Laârayedh prend la décision de se rebeller contre son propre parti. Toutefois, il faut préciser que tant que le gouvernement Laârayedh bénéfice du soutien de l'ANC, personne ne peut le démettre».